Au Royaume-Uni comme ailleurs, le retour en force de l’inflation ne laisse pas de surprendre et pousse la Banque centrale à agir. Le Comité de politique monétaire (MPC) s’attend à ce que la hausse annuelle des prix atteigne 7% en avril (elle dépasse actuellement 5%), du jamais-vu depuis trois décennies. Il renchérit par conséquent le loyer de l’argent. Fixé à 0,1% pendant la crise, le taux d’intérêt directeur de la Banque d’Angleterre a été porté à 0,25% en décembre, puis à 0,50% en février. D’autres hausses suivront, l’objectif du MPC - qui épouse les anticipations du marché - étant de porter le Bank rate à 1,50% en milieu d’année 2023.
Ce n’est pas tout. À l’instar de la Réserve fédérale américaine, la Banque d’Angleterre va réduire la taille de son bilan, en cessant de réinvestir à l’échéance dans les actifs acquis au titre du quantitative easing (dont l’encours atteint GBP 895 milliards, soit 40% du PIB, et se trouve essentiellement constitué d’obligations du Trésor). La normalisation monétaire intervient alors que l’économie retrouve son niveau de fin 2019. Très entamé par la pandémie - la récession britannique fut l’une des plus marquées dans le monde en 2020 - le PIB a connu un rebond spectaculaire en 2021 (+7,5%), notamment parce que le « quoi qu’il en coûte » est allé très loin. D’après les calculs du Fonds monétaire international (FMI), les transferts gouvernementaux aux ménages et aux entreprises (hors prêts et garanties) ont représenté 19 points de PIB, pratiquement le double de l’effort consenti en zone euro, qui bénéficie il est vrai de stabilisateurs automatiques plus puissants.
Le contrecoup a été une explosion du déficit public qui, bien qu’en régression du fait du retour de la croissance, reste élevé d’un point de vue structurel (l’Office for Budget Responsabililty l’évalue à 8,3 points de PIB potentiel pour l’exercice fiscal 2021-22). Priorité est donc donnée à sa réduction. Tout ou partie des dispositifs « Covid » (TVA réduite sur la restauration, abattements spéciaux sur les droits de mutation…) ont été supprimés, tandis qu’il est prévu d’augmenter les prélèvements sociaux dès avril 2022 et le taux de l’impôt sur les sociétés en avril 2023.
Jean-Luc Proutat