Eco week 21-08 // 26 février 2021
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ÉDITORIAL
ÉTATS-UNIS : LA REMONTÉE DES RENDEMENTS OBLIGATAIRES DOIT-ELLE INQUIÉTER LES INVESTISSEURS EN ACTIONS ?
Jusqu’à une date récente, la hausse des taux d’intérêt à long terme n’a pas empêché le marché actions de grimper,
mais à en juger par les évolutions de la semaine, l’inquiétude semble gagner les investisseurs. L’impact potentiel de
la remontée des taux obligataires sur les cours des actions dépend des facteurs à l’origine de cette augmentation :
accélération de la croissance, baisse de l’incertitude, hausse des anticipations d’inflation. Ce dernier facteur est le
plus délicat car il pourrait entraîner une réévaluation en profondeur des perspectives de politique monétaire. Au
cours des deux dernières décennies, la relation entre la hausse des taux et le marché actions n’a pas été significative
d’un point de vue statistique, ce qui s’explique entre autres par l’approche gradualiste de la politique monétaire.
Comme le montrent ses déclarations récentes, Jerome Powell sait parfaitement combien il est important de ne pas
prendre le marché par surprise.
L’année dernière, les rendements des Treasuries ont fortement baissé, des anticipations d’inflation. L’impact sur le cours des actions est alors
la pandémie de Covid-19 ayant provoqué une fuite vers les valeurs ambigu. L’accélération de la hausse des prix pourrait signifier une
refuge. D’autres facteurs, comme la politique de la Réserve fédérale progression des bénéfices nominaux, mais cela suppose que les prix
et les perspectives d’inflation, ont aussi joué un rôle. Le rendement à relatifs restent inchangés. L’augmentation des anticipations d’inflation
1
0 ans a atteint un plus bas pour l’année, en août, à 0,52 %. Depuis, pourrait laisser craindre, et c’est plus important, un resserrement de la
les taux d’intérêt à long terme sont sur une tendance haussière. La politique monétaire, ce qui, normalement, devrait peser sur les cours
décomposition de la variation cumulée des rendements nominaux des des actions.
Treasuries montre que, à la fin du mois de janvier, les rendements
Comme le montre le tableau, la relation observée entre les rendements
nominaux étaient plus ou moins équivalents à la hausse des points
obligataires et le marché actions a évolué dans le temps. Pour la période
1
morts d’inflation . Le rendement obligataire réel - rendement des
commençant en 1983, une progression durable des rendements à 1 et
obligations indexées sur l’inflation -, après avoir progressé jusqu’au
1
0 ans – il faut entendre par « durable » une augmentation sur une
début du mois de novembre, était revenu à son niveau du mois d’août.
En février, cependant, la hausse des rendements nominaux a été
alimentée par la progression des rendements réels alors que les points
morts d’inflation ont, en fait, légèrement diminué.
période de quatre semaines – ainsi qu’une pentification de la courbe
de taux sont associées à une baisse statistiquement significative du
marché actions.
Jusqu’à une date récente, la hausse des taux longs n’a pas empêché
l’ascension du marché actions, mais l’accélération récente de la
remontée des rendements obligataires a fait craindre un impact
possible sur les marchés boursiers. Ainsi, cette semaine, le mouvement
mondial de remontée des taux obligataires a poussé les marchés
actions à la baisse. Toutes choses égales par ailleurs, une hausse
durable des rendements obligataires correspond à une augmentation
du taux d’actualisation utilisé pour le calcul de la valeur actualisée nette
des dividendes futurs, entraînant ainsi un repli des cours des actions.
Cependant, toutes les hausses de taux obligataires ne se ressemblent
pas. Lorsqu’elles reflètent des anticipations d’accélération de la
croissanceduPIBréel,latrajectoiredesdividendesfutursdoitégalement
être révisée à la hausse. Avec une augmentation du numérateur et du
dénominateur, les cours des actions ne baissent pas nécessairement en
réaction à la remontée des rendements. La progression des taux à long
terme peut également traduire le sentiment d’un repli de l’incertitude
et d’une diminution de la probabilité de résultats économiques très
négatifs. Cela devrait entraîner une réduction de l’autre composante
du taux d’actualisation, à savoir la prime de risque actions exigée. Les
rendements peuvent également augmenter sous l’effet d’une hausse
RENDEMENT DES TREASURIES À 10 ANS ET INFLATION « BREAKEVEN »
Variation cumulée depuis le 4 août 2020
0
.90
0.80
Taux réel
0
0
0
0
.70
.60
.50
.40
Inflation « breakeven »
Taux nominal
0.30
0.20
0
.10
.00
0
-
0.10
020-08-05
2
2020-10-05
2020-12-05
2021-02-05
SOURCES : FRED, BNP PARIBAS
1
Il s’agit de l’écart entre le rendement des obligations nominales et celui des obligations
indexées sur l’inflation.
En l’absence d’une forte hausse surprise de l’inflation, l’attention
du marché actions, dans les prochains mois, se portera
probablement davantage sur l’évolution de la croissance
bénéficiaire que sur les taux d’intérêt.
La banque
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