Si la date de la première baisse de taux de la Fed est désormais prévisible (ce sera lors du FOMC des 17-18 septembre), tout le reste demeure incertain : son ampleur ainsi que la teneur globale du cycle de baisses et son calendrier. L’évolution du marché du travail américain revêt une grande importance dans ce calibrage. Du côté de l’inflation, d’importants progrès ont été réalisés sur le front du retour à la stabilité des prix et ce, des deux côtés de l’Atlantique, mais la partie n’est pas encore totalement gagnée. Cela plaide pour la prudence dans la phase de détente monétaire qui s’amorce
Croissance du PIB, inflation, taux d'intérêt et de change.
La relation historique entre les indicateurs économiques joue un rôle central dans les attentes des marchés. Aux États-Unis, la règle de Sahm est un « fait stylisé » d’importance : lorsque la hausse du taux de chômage atteint un certain seuil, comme on l'a vu récemment, une récession s’ensuit ou est déjà amorcée. Les statistiques de l'emploi publiées début août ont montré que ce seuil critique avait été franchi, entraînant une détérioration du sentiment des investisseurs. À Jackson Hole, Jerome Powell a expliqué que l'attention de la Fed se tournait désormais vers le marché du travail et a envoyé un message clair indiquant que le cycle de baisse des taux commencerait en septembre
L’économie marocaine s’est illustrée par sa capacité de résistance ces dernières années. Les pertes de PIB induites par la crise du COVID ont été rapidement effacées et le choc inflationniste de 2023 est passé. Tombée en dessous de 1% depuis le début de l’année contre un pic de 10% début 2023, l’inflation n’est plus une source de préoccupation majeure. En juin, la Banque Centrale a décidé d’assouplir sa politique monétaire. La solidité des comptes extérieurs et la consolidation en cours des finances publiques ont également rassuré les autorités monétaires dans leur prise de décision.
Depuis le début de l’année, la croissance des pays émergents résiste toujours très bien. Elle se reflète dans la confiance des entreprises et des ménages mais également dans celle des investisseurs étrangers sur les places obligataires et boursières. Le durcissement monétaire américain du début 2022 jusqu’à la mi-2023 a pourtant eu un impact négatif important sur les flux d’investissement de portefeuille. Mais cet impact a été largement compensé par l’attrait que constituent les places émergentes pour les investisseurs, privés comme institutionnels, soit pour des considérations purement financières (carry trade) ou par souci de stratégie de diversification
En Chine, l’activité du secteur manufacturier reste dynamique, mais la montée des tensions avec la plupart de ses partenaires commerciaux et la multiplication des mesures protectionnistes pèsent dorénavant sur les perspectives d’exportations. Dans le même temps, la demande intérieure reste bridée par la crise du secteur immobilier et la croissance du crédit ralentit malgré les mesures d’assouplissement monétaire. Les autorités devraient donc encore assouplir, de manière prudente, leur politique économique à court terme. Les difficultés financières des collectivités locales et, plus généralement, la dégradation des finances publiques ont réduit la marge de manœuvre budgétaire. Le gouvernement central est contraint à prendre un rôle plus direct dans les mesures de soutien.
La croissance économique indienne a atteint 8,2% pour l’année budgétaire 2023/2024. Mais une telle performance n’a pas permis au BJP, le parti au pouvoir de Narendra Modi, de conserver la majorité au parlement. Au cours des cinq prochaines années, le BJP devra composer avec les petits partis partenaires de la coalition qu’il conduit pour diriger le pays. L’adoption de nouvelles réformes pour libéraliser davantage l’économie pourrait être difficile. Par ailleurs, le Premier ministre pourrait avoir à modifier la structure des dépenses budgétaires afin d’accroître de nouveau la part des subventions et autres transferts sociaux, en baisse depuis cinq ans
Le nouveau président taiwanais Lai Ching-te a pris ses fonctions le 20 mai dernier. Il devrait poursuivre l’agenda de politique intérieure et de politique étrangère de sa prédécesseuse, dans un climat plus tendu. D’une part, Pékin pourrait accroître ses manœuvres militaires autour de l’île. D’autre part, le Parlement est désormais dominé par les partis d’opposition, qui devraient ralentir ou bloquer de nombreux projets du gouvernement. Au moins la nouvelle administration pourra-t-elle compter sur une conjoncture économique favorable pour entamer son mandat. La croissance accélère depuis un an, tirée par le rebond du cycle électronique mondial
L’entrée de plusieurs pays d’Europe centrale et orientale au sein de l’UE en 2004 s’est accompagnée d’une progression impressionnante de leurs économies respectives. L’amélioration de la productivité du travail a permis un rattrapage des salaires réels au cours des 20 dernières années, mais les pressions salariales sont restées très fortes sur la période récente sans toutefois entamer la compétitivité des économies jusqu’à présent. La région reste par ailleurs attractive pour les investissements directs étrangers et continue de bénéficier des activités de nearshoring. A court terme, la consolidation des comptes publics constitue une priorité pour tenir les engagements dans le cadre du Pacte de stabilité et de croissance
Les perspectives de croissance s’améliorent pour 2024 mais le rebond sera sans doute contenu en raison d’une demande domestique encore peu dynamique. Sur le marché des changes, le forint hongrois subit des pressions baissières sur la période récente. Du côté des comptes publics, la consolidation budgétaire commencée depuis l’été 2022 n’a pas permis de réduire significativement le déficit. Pour 2024, il sera probablement moins prononcé que l’an dernier mais restera de toute façon élevé (autour de 5% du PIB). Ainsi, la Hongrie, fera probablement l’objet d’une procédure de déficit excessif en 2024
Les messages envoyés par les marchés financiers et ceux de l’économie réelle peinent à s’harmoniser. La vigueur de la croissance économique, la faiblesse du chômage et une inflation contenue ont en effet été éclipsées par la montée des risques politiques et budgétaires, qui pèsent plus fortement sur la monnaie, le cours des actions et la courbe des taux. Les déroutes parlementaires de Lula, ses frictions avec la banque centrale et un interventionnisme plus marqué agitent les investisseurs, déjà ébranlés par d’importantes révisions de projections de taux d’intérêt aux niveaux mondial et local. Le défi pour la seconde moitié de l’année sera de renforcer la confiance des agents économiques et stabiliser leurs anticipations.
Claudia Sheinbaum a été élue présidente du Mexique le 2 juin dernier. Les défis politiques et économiques auxquels elle sera confrontée au cours de son mandat sont nombreux et concernent surtout la soutenabilité des finances publiques, la réforme du secteur de l’énergie (point particulièrement sensible au Mexique, surtout dans le contexte de nearshoring et d’un regain d’attraction de la part des investisseurs étrangers) et la renégociation du traité commercial avec le Canada et les États-Unis (UMSCA) en 2026. Dans l’immédiat, membre du parti la Morena de l’ancien président sortant, la nouvelle présidente doit trouver la bonne distance vis-à-vis d’Andres Manuel Lopes Obrador et de ses soutiens. Les discussions concernent notamment la réforme de la justice qu’il avait lui-même proposée.
La Ley Bases (ensemble de mesures destinées à la libéralisation de l’économie et, plus généralement, de la société) présentée par J. Milei au sortir de son investiture en décembre dernier a finalement été adoptée fin juin. Le parti du président ne disposant de majorité ni à la Chambre des députés, ni au Sénat, la version finale a été édulcorée. Pour autant, c’est une victoire pour J. Milei qui mène une course contre la montre entre une économie qui sombre dans une récession profonde et les premiers signes de désinflation. La lutte contre l’inflation justifie, pour le gouvernement, les coupes sombres dans les dépenses publiques et le maintien d’une stratégie d’appréciation du taux de change réel
Portée par des cours mondiaux de l’énergie relativement élevés et une demande soutenue pour son gaz, l’économie algérienne continue d’enregistrer des performances solides. En 2023, la croissance a été une des plus fortes des pays producteurs d’hydrocarbures de la région, et les perspectives pour 2024 restent favorables. Cependant, l’orientation expansionniste de la politique économique commence à montrer certaines limites, en particulier à cause de la hausse des déséquilibres budgétaires. Si les risques d’instabilité macroéconomique sont largement contenus à court terme, le rééquilibrage des moteurs de la croissance reste un défi d’envergure à moyen terme
Depuis le début de l’année 2024, les autorités nigérianes ont accéléré la mise en œuvre des réformes qui visent à endiguer la détérioration des comptes extérieurs et retrouver la stabilité macroéconomique. Avec l’assouplissement du régime de change et le relèvement des taux d’intérêt, la banque centrale a envoyé un signal fort aux investisseurs étrangers. Cependant, il faudra du temps et la mise en œuvre d’importantes réformes structurelles pour que les entrées de capitaux décollent significativement et durablement. En parallèle, la consolidation budgétaire est compliquée par un choc inflationniste sans précédent et son impact sur la croissance économique. Le coût élevé de la mise en œuvre des réformes pourrait contraindre le gouvernement à faire marche arrière.
La croissance de l'économie américaine a connu un net ralentissement au premier semestre et les derniers chiffres des prix des dépenses de consommation, l'indicateur préféré de la Réserve fédérale pour mesurer l'inflation, ont été bien accueillis par la Fed et par les marchés, lesquels tablent désormais sur une première baisse des taux en septembre. Face à un taux de chômage encore faible, mais en augmentation, la Réserve fédérale a entrepris de redéfinir ses priorités. Au lieu de s'intéresser exclusivement à l'inflation, elle accorde désormais une importance accrue à l'activité économique et à l'emploi, d'autant plus que le processus de désinflation a récemment repris.
Il est important de bien comprendre la fonction de réaction d’une banque centrale. Elle influence les anticipations d’inflation et de taux d’intérêt, le niveau des rendements obligataires, l’appétit pour le risque des investisseurs et la confiance économique en général. Aux États-Unis, différents types d’informations contribuent à améliorer notre compréhension de la fonction de réaction de la Réserve fédérale. Tout d’abord, les règles de politique monétaire, qui jouent un rôle important dans les travaux des équipes de la Fed en vue des réunions du FOMC. Ensuite, la relation entre l’inflation, la croissance, le chômage et le taux des fonds fédéraux dans le Résumé des Projections économiques des membres du FOMC
Le mandat dual de la Réserve fédérale (Fed) confie à cette dernière, de jure depuis une réforme de 1977, les objectifs d’emploi maximal et de stabilité des prix (attendu que le second favorise le premier à long terme). Néanmoins, il peut advenir que les objectifs entrent en contradiction et imposent, comme c’est le cas depuis mars 2022, à la Fed de nettement prioriser la réduction de l’inflation au risque de léser l’emploi et la production. Ceci renvoie à la notion de ratio de sacrifice ou d’arbitrage (trade-off), c’est-à-dire la détérioration cumulée attendue de ces derniers pour favoriser le retour de l’inflation à sa cible (2%).
Notre scénario central d’un décollage de la zone euro et d’un atterrissage en douceur de l’économie américaine, confirmé par les derniers indicateurs disponibles, se caractérise par une convergence des taux de croissance. Il, pourrait, toutefois se trouver perturbé par les incertitudes politiques des deux côtés de l’Atlantique (issues incertaines des élections législatives anticipées en France et de l’élection présidentielle américaine). Par ailleurs, si la BCE a amorcé, comme attendu, son cycle de détente monétaire en juin, apportant un soutien opportun à la croissance, la Fed temporise encore. Ce prolongement du statu quo, même s’il paraît fondé pour l’heure, constitue un autre risque baissier
Si l’inconnue des résultats des élections européennes est désormais levée, leurs implications, en particulier l'issue des élections législatives anticipées françaises, restent incertaines. Notre scénario central d’un décollage de la zone euro et d’un atterrissage en douceur de l’économie américaine, caractérisé par une convergence des taux de croissance, pourrait se trouver perturbé par les incertitudes politiques des deux côtés de l’Atlantique. La croissance bénéficie toutefois de facteurs de soutien et de résistance, au premier rang desquels les gains de salaires réels. Le bilan conjoncturel reste, pour l’heure, positif pour la zone euro : notre nowcast estime à +0,3% t/t la croissance du deuxième trimestre. C’est sur la poursuite de cette reprise que pèse une plus grande incertitude.