En 2020-2021, grâce à son économie diversifiée, le Kenya avait relativement mieux résisté au choc de la pandémie que les autres économies d’Afrique sub-saharienne. Mais, en 2022-2023, la reprise sera bridée par les effets indirects de la guerre en Ukraine et soumise à d’importants risques baissiers. Le pays fait face à une dégradation des termes de l’échange. L’accélération de l’inflation va peser sur la demande domestique avec le risque de nourrir l’instabilité sociale, ce qui pourrait compliquer les efforts entrepris de consolidation budgétaire. Or, celle-ci est nécessaire pour préserver le soutien des créanciers multilatéraux, notamment celui du FMI. Le nouveau président exclut l’option d’une restructuration préventive de la dette
Au lendemain des élections générales au Kenya, l’incertitude demeure forte. Dans un contexte socio-économique sensible, le nouveau président William Ruto devra d’abord poursuivre la consolidation budgétaire et la réduction de l’endettement public. S’il exclut une restructuration préventive de la dette, le niveau élevé du risque souverain requiert de freiner la dégradation des finances publiques. Le déficit budgétaire s’est élevé à -7,7% du PIB en moyenne sur la période 2015/21 et la dette publique a atteint près de 70% du PIB en 2021 (vs. 49% en 2015). En outre, la charge d’intérêt sur la dette publique représente désormais plus de 20% des revenus budgétaires et son service total absorbe 50% des revenus (vs. 38% en 2015)
Au Royaume-Uni, les marchés financiers ont été récemment confrontés à une « ruée sur les liquidités » qui a amené les investisseurs à céder des actifs, y compris sûrs, comme les obligations d’État, pour obtenir des liquidités. Le catalyseur a été l'annonce d'une politique budgétaire expansionniste. Celle-ci pourrait obliger la Banque d'Angleterre à relever plus fortement les taux d'intérêt compte tenu de possibles conséquences inflationnistes. L’effet de levier et les appels de marge qui en ont découlé ont accéléré la hausse des rendements du Gilt. Cette situation montre la nécessité de coordonner les politiques économiques
Les résultats des élections législatives ont conduit une coalition de droite, menée par Giorgia Meloni, au pouvoir. La nouvelle administration devrait être rapidement mise à l’épreuve puisqu’elle prendra les rênes d’une économie en proie à des difficultés croissantes, avec un risque de récession élevé cet hiver. Nos prévisions actuelles tablent sur un repli du PIB réel de 0,4% t/t au quatrième trimestre, suivi d’une baisse de 0,2% t/t le trimestre suivant. Le secteur industriel, premier pan de l’économie affecté par les perturbations liées à la guerre en Ukraine et la hausse des coûts de production, subit un coup d’arrêt important.
La croissance britannique s’est légèrement contractée au T2 mais l’économie ne devrait pas entrer en récession avant le T4. D’une part, le marché du travail continue d’opérer au plein-emploi, ce qui permet d’amortir en partie le choc d’inflation sur le pouvoir d’achat. D’autre part, le nouveau plan gouvernemental de soutien aux ménages et aux entreprises devrait atténuer la hausse des prix de l’énergie à venir. Face à une inflation persistante, la Banque d’Angleterre (BoE) accélère encore sa normalisation monétaire, au risque de précipiter la contraction de l’économie.
Après huit années passées dans l’opposition, les conservateurs ont repris les rênes du pouvoir en Suède dans un contexte peu favorable. Si l’activité économique a bien résisté jusqu’ici, elle montre des signes nets de ralentissement. Face à une inflation de plus en plus prégnante, la population demande davantage de soutien de la part des pouvoirs publics. Par ailleurs, le gouvernement devra rapidement se positionner à propos du processus d’adhésion à l’OTAN, avant de prendre la présidence de l’Union européenne le 1er janvier 2023. Toute la difficulté sera de parvenir à former un gouvernement de coalition allant des Libéraux (centre-droit) aux Démocrates de Suède (extrême droite).
Berceau de la social-démocratie, la Suède fait face à une possible percée de l’extrême droite. Douze ans seulement après leur entrée au Parlement, avec seulement 5,7% des voix, les Démocrates de Suède (SD, extrême droite) menacent désormais les forces politiques traditionnelles. Après une campagne marquée par les débats sur la criminalité en Suède, la coalition gouvernementale actuelle, centrée autour du Parti social-démocrate suédois, pourrait échouer le 11 septembre prochain à briguer un troisième mandat consécutif (après ceux de 2014 et 2018)
Au cours des cinq prochaines années, la politique économique française devra continuer de traiter des sujets structurels, tels que le plein emploi, le retard en termes de robotisation et la compétitivité des entreprises, ou encore la place de l’industrie dans l’économie. Elle continuera aussi très probablement de s’attacher, au moins à court terme, à soutenir le pouvoir d’achat des ménages, comme elle le fait depuis 2019. Autant de chantiers à mener de front qu’il s’agira de concilier avec le coût de la transition écologique et énergétique, alors que la dette publique a déjà fortement augmenté dans un contexte de remontée, encore contrôlée, des taux d’intérêt.
Depuis le 8 juillet, un dispositif permet aux 2,7 millions de ménages espagnols les plus modestes de bénéficier d’un chèque « anti-inflation » de 200 euros par personne. Cette mesure fait partie d’une enveloppe totale de EUR 9 mds, officialisée fin juin par les autorités. Elle comprend également un nouvel allègement de la TVA sur l'électricité (de 10 à 5%) et une baisse du coût des transports. Ces dispositifs de soutien au pouvoir d’achat sont les bienvenus car l’inflation continue de gagner du terrain.
Après avoir été pénalisée par le variant Omicron, l’activité économique est repartie à la hausse dès le mois de février et devrait continuer de progresser, permettant à la croissance d’atteindre 4% en 2022. À son corps défendant, la Norvège est la grande gagnante de la guerre en Ukraine grâce à la hausse substantielle de ses rentes pétro-gazières qui devraient atteindre NOK 1 500 mds en 2022 (environ EUR 143 mds). Malgré une inflation plus modérée que dans les autres pays européens, la Banque centrale norvégienne s’est dite déterminée à resserrer autant que nécessaire les conditions monétaires pour casser la dynamique inflationniste. Pour ramener l’inflation à sa cible, la NorgesBank prévoit de relever, progressivement, son taux de dépôt jusqu’à 2,5% d’ici la fin 2023.
Après une contraction sans précédent en 2020, le fort rebond de l’activité économique en 2021 n’a pas permis à l’Afrique du Sud de renouer avec son niveau de PIB d’avant-crise, contrairement à la plupart des pays émergents. En 2022, l’activité devrait rester modérée et la croissance inférieure à 2% à moyen terme. Les perspectives économiques demeurent largement contraintes par la nécessité d’une consolidation budgétaire, le climat social et politique tendu et, de façon structurelle, par les fortes contraintes pesant sur les infrastructures, en particulier l’approvisionnement en électricité. Le choc induit par le conflit en Ukraine pourrait par ailleurs compliquer les efforts d’assainissement budgétaire engagés
La hausse spectaculaire des prix de l’énergie depuis avril 2021 constitue le principal levier de la flambée actuelle de l’inflation en zone euro. Cette hausse s’est accentuée depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine, le 24 février dernier, entraînant la composante « énergie » de l’indice des prix à la consommation harmonisé (IPCH), qui a crû de 44,4% a/a en mars 2022. Les gouvernements des quatre principales économies de la zone euro se sont mobilisés pour tenter d’amortir le choc pour les acteurs économiques, en particulier sur le pouvoir d’achat des ménages, via différentes mesures : subventions directes, baisses de taxes, réglementation des prix ou revalorisation des revenus
L’environnement économique et financier international n’est pas favorable à l’économie indienne. Même si le pays produit et exporte du blé, il sera pénalisé par l’envolée des prix des matières premières. Dans un contexte de ralentissement de la croissance, la consolidation budgétaire annoncée devrait être fragilisée. Le gouvernement sera contraint d’augmenter sensiblement ses subventions sur les engrais s’il veut contenir la hausse des prix alimentaires, lesquels constituent près de 46% du panier de consommation des ménages. Par ailleurs, l’Inde n’échappera pas à une dégradation significative de son déficit courant, induite par la hausse des prix du pétrole et les pressions à la baisse sur la roupie, surtout si les récentes sorties d’investissement de portefeuille se poursuivent
La Pologne est bien armée pour affronter les conséquences économiques du conflit en Ukraine. Fin 2021, le choc de la Covid-19 a été absorbé. Le niveau d’activité a dépassé de 5% celui de fin 2019, la reprise est équilibrée dans ses composantes et le taux de chômage est revenu à un niveau frictionnel. De plus, le déficit budgétaire a été fortement réduit en 2021 et le ratio de dette publique reste en deçà de la norme maastrichienne grâce à un écart substantiel entre la croissance et les taux d’intérêt. Le solde courant est de nouveau déficitaire mais reste largement couvert par des sources de financement non génératrices de dette. Seule ombre au tableau, l’accélération de l’inflation a conduit la banque centrale à durcir sa politique monétaire de façon plus incisive depuis l’automne 2021
L’économie roumaine a fortement ralenti au S2 2021, l’accélération de l’inflation ayant entraîné une baisse du pouvoir d’achat des salariés pour la première fois depuis 2010. Pour autant, la croissance est restée déséquilibrée et l’endettement public et privé s’est alourdi entre 2019 et 2021. Le resserrement monétaire est intervenu trop tardivement en 2021 et demeure très mesuré depuis le début de l’année. Le choc externe du conflit en Ukraine ne peut qu’accentuer le ralentissement de la croissance. Le coût de l’accueil des réfugiés retardera l’assainissement budgétaire. C’est à la politique monétaire qu’il incombe de veiller à la stabilité financière dans les circonstances exceptionnelles actuelles.
Fin 2021, l’économie sud-africaine n’avait pas retrouvé son niveau d’activité d’avant-Covid. La hausse des prix des matières premières que le pays exporte représente une bouffée d’air à court terme, en attestent les dernières prévisions budgétaires plus optimistes que celles publiées fin 2021. Pour autant, les vulnérabilités structurelles, exacerbées pendant la crise, demeurent. Même si l’économie affiche peu de liens commerciaux avec l’Ukraine et la Russie, elle subit, comme les autres économies émergentes, une poussée inflationniste qui va peser sur la demande. L’augmentation de la masse salariale du secteur public et le soutien financier aux entreprises d’État freinent la baisse du déficit budgétaire
Les perspectives économiques de l’Égypte se sont brusquement dégradées avec le déclenchement de la guerre en Ukraine et ses conséquences sur les prix des matières premières. Leur hausse généralisée va entraîner une chute du pouvoir d’achat des ménages et donc gripper le principal moteur de l’activité. L’érosion de la liquidité en devises s’est accélérée depuis un mois avec des sorties massives de capitaux. En outre, le déficit courant devrait se creuser en raison de la difficile compression des importations, la fréquentation touristique pourrait baisser et l’effet de la dépréciation de la livre sur les exportations devrait être limité. Ces difficultés soulignent la persistance de la vulnérabilité de l’économie aux chocs externes et la nécessité de soutiens extérieurs
En raison de sa forte dépendance aux importations de pétrole et de blé, le Maroc va souffrir des conséquences de la guerre en Ukraine. Néanmoins, des réserves de change confortables vont permettre d’absorber le choc commercial. De plus, l’orientation expansionniste de la politique budgétaire n’est pas remise en cause par la hausse des subventions énergétiques et alimentaires et la banque centrale compte maintenir son biais accommodant en dépit de pressions inflationnistes fortes. Le soutien de la puissance publique demeure en effet crucial au moment où l’économie doit aussi faire face à une chute significative de la production agricole, et donc de sa croissance. À court terme, la solvabilité budgétaire et la liquidité extérieure ne sont pas menacées
Le temps du soutien budgétaire et monétaire sans limite est révolu au Royaume-Uni, où la priorité est de réduire les déficits et l’inflation. Face au choc provoqué par l’invasion russe de Ukraine, qui promet d’alourdir un peu plus encore la facture énergétique et alimentaire des Britanniques, les mesures gouvernementales de soutien au pouvoir d’achat apparaissent limitées. En 2022, un ralentissement marqué de l’économie est à prévoir.
Les finances publiques de la Colombie ont été sous le feu des projecteurs ces dernières années. Alors que la fréquence des chocs externes et les pressions pour accroître les dépenses sociales se multiplient, le pays continue de rencontrer des difficultés à augmenter ses recettes budgétaires. La suspension du processus de consolidation budgétaire consécutive au choc de la Covid-19, les fréquents biais (optimistes) en matière de planification budgétaire, la progression rapide du ratio d’endettement public et les doutes quant aux capacités futures d’ajustement de l’action politique sont autant de motifs d’inquiétude qui ont mené à la perte du statut d’ « investment grade » à l’été 2021
L’euro fiduciaire a fêté ses 20 ans le 1er janvier 2022, plutôt en bonne forme. Les chantiers pour améliorer et renforcer la construction et l’intégration européennes restent toutefois nombreux. Les sujets au menu de la présidence française du Conseil de l’Union européenne (PFUE), au cours des six prochains mois, en attestent. Parmi les priorités, la réforme des règles budgétaires européennes sera un débat majeur de 2022. La discussion est lancée et doit aboutir cette année. Le défi est que « la montagne n’accouche pas d’une souris »
Gabriel Boric, le candidat de la très large coalition des partis de gauche, a remporté le second tour de l’élection présidentielle chilienne, le 19 décembre dernier, face à J. Kast, candidat d’extrême droite. Bien que les fondamentaux économiques soient restés relativement solides au cours des deux dernières années, le gouvernement (qui entrera en fonction en mars) devra faire face à de nombreuses difficultés. L’évolution de la situation sanitaire, l’inflation élevée et la politique monétaire restrictive pèseront sur la croissance à court et moyen terme. Dans le même temps, les attentes populaires sont très fortes concernant la réforme du système de retraite, l’accès aux soins et l’éducation
La crise de l’immobilier, le maintien de la stratégie zéro covid face aux résurgences de l’épidémie, et la fragilité persistante de la consommation des ménages sont parmi les principaux facteurs de risque pesant sur la croissance chinoise. À court terme, les autorités devraient renforcer prudemment leur soutien monétaire et budgétaire à l’activité, tout en maintenant le cap de l’assainissement du marché immobilier, de la réduction des risques financiers et du resserrement réglementaire.
Après la victoire du Parti libéral-démocrate aux élections législatives d’octobre dernier, le Premier ministre, Fumio Kishida, a toute latitude pour dérouler son programme. En novembre, il a présenté un plan de relance record de quelque JPY 55 700 mds, soit 10 % du PIB. En 2022, la croissance du PIB pourrait atteindre 2,6% (après 1,7% en 2021), en grande partie portée par la consommation privée.
Dans la plupart des pays européens, le déficit structurel primaire devrait baisser en 2022. Une telle contraction constitue une impulsion budgétaire négative qui pourrait freiner la croissance économique. Toutefois, le solde primaire reste important et correspond à une politique budgétaire accommodante. Les politiques nationales, les dépenses au titre de la facilité pour la reprise et la résilience, et les autres aides européennes devraient soutenir la croissance en 2022. En outre, elles devraient accompagner et renforcer la reprise actuelle et l’efficacité de la politique accommodante de la BCE.