L’Allemagne est le pays d’Europe de l’Ouest où la croissance du PIB a été la plus négative au 4e trimestre 2022 (-0,4% t/t). De plus, les indicateurs conjoncturels, bien qu’ils s’améliorent, sont restés relativement dégradés au début de l’année 2023. Une nouvelle contraction du PIB au 1er trimestre 2023 reste donc notre scenario central. Toutefois, des signaux plus favorables (pic d’inflation dépassé, réouverture de la Chine, réduction des tensions sur les approvisionnements dans l’automobile) pourraient engendrer un retour de la croissance à partir du 2e trimestre. Ceci transparait déjà dans la confiance des ménages, même si la faiblesse de la croissance en zone euro, depuis le 4e trimestre 2022, pourrait limiter l’intensité de cette reprise.
Avec un pic d’inflation à l’automne dernier et la crainte de pénuries d’énergie pendant l’hiver, l’IFO avait atteint un plus bas en octobre 2022. Son redressement relève d’une normalisation, l’hiver s’étant mieux passé que redouté. Il ne permet néanmoins pas de conclure à autre chose qu’un rebond « technique » de l’activité après la mauvaise performance du 4e trimestre.
L’activité industrielle a connu un net rebond en janvier (+3,5% m/m), après un repli également notable en décembre (-2,4% m/m).
Les indicateurs du climat des affaires témoignent d’une amélioration relative (par exemple, l’IFO a rebondi de 84,3 en septembre 2022 à 91,1 en février 2023), qui souligne une activité meilleure que prévu, notamment parce que les craintes d’une aggravation du choc lié à l’énergie ne se sont pas matérialisées. Ces indicateurs restent toutefois inférieurs à la normale, en cohérence avec une croissance négative du PIB allemand au 4e trimestre.
Les indicateurs du climat des affaires ont été marqués ces derniers mois par le poids du choc lié à l’énergie, ainsi que par les craintes que ce choc s’intensifie pendant l’hiver. Les difficultés liées au contexte international (avant la réouverture de la Chine) ont également pénalisé l’économie allemande.
La Chine est le principal partenaire commercial de l’Allemagne depuis 2016. Les importations allemandes en provenance de Chine représentent près de 12 % du commerce total de l’Allemagne et les exportations 8 %. Dans l’ensemble, les échanges commerciaux avec la Chine atteignent désormais près de 20% des échanges commerciaux allemands.Si, par le passé, le déficit commercial de l’Allemagne vis-à-vis de la Chine a été relativement limité, il se creuse substantiellement depuis le début de l’année 2021.L’Allemagne, dont le niveau de gamme de la production industrielle est particulièrement élevé, est très dépendante de la Chine en matière d’intrants stratégiques, et en particulier dans son approvisionnement en terres rares
La croissance pour le moins inattendue du PIB allemand, +0,4% t/t au T3, ne doit pas être l’arbre qui cache la forêt. Si la puissance des derniers effets de rattrapage a surpris le consensus, qui ne s’attendait pas à un tel dynamisme de l’activité au T3, nul doute que les moteurs de la croissance allemande sont en train de caler un à un. La conjoncture est en effet extrêmement défavorable : inflation record, crise énergétique, chute de la demande mondiale, etc. Après un baroud d’honneur au T3, il semble donc peu probable que l’Allemagne puisse continuer d’afficher une croissance positive sur les trois derniers mois de l’année. Si l’entrée en récession est quasiment entérinée, la question de son intensité est beaucoup plus ouverte.
Le paysage économique ne s’améliore guère outre-Rhin. Les enquêtes de conjoncture du mois de novembre confirment qu’il ne s’agit pas d’un simple trou d’air, mais que l’économie allemande est bel et bien en train de s’enliser. Si le PMI composite du pays est ressorti en légère hausse (46,3 après 45,1), il demeure à un niveau très dégradé, bien inférieur au seuil théorique d’expansion. En revanche, l’activité dans les services, qui avait porté la croissance au 3e trimestre, recule significativement avec un PMI publié à 46,1 en novembre, en contraction pour le cinquième mois consécutif.
Depuis le début de l’année 2022, la croissance allemande n’a cessé de surprendre par sa résistance, bien aidée par la fin des effets de rattrapage post-Covid. Pour autant, la dégradation de la situation conjoncturelle est désormais telle que tous les moteurs de la croissance plient et s’éteignent un à un. De la consommation, l’investissement, en passant par le commerce extérieur, tous sont orientés à la baisse pour le 4ème trimestre. Il semble donc peu probable que l’Allemagne continue d’afficher une croissance positive de son PIB sur les trois derniers mois de l’année. Malgré tout, la récession qui attend l’Allemagne en 2023 devrait être d’ampleur modérée et limitée dans le temps du fait d’un soutien public massif.
Contre toute attente, le PIB allemand a progressé de 0,3% au 3e trimestre (t/t). Ce chiffre a de quoi surprendre puisque le ministre de l'Économie lui-même, Robert Habeck, annonçait le 12 octobre dernier que « l'économie allemande devrait se contracter aux troisième et quatrième trimestres de cette année ainsi qu'au premier trimestre de 2023 ». Si le détail des composantes du PIB n’est pas encore disponible, d’après l’institut national de statistiques Destatis, la consommation privée aurait porté la croissance au 3e trimestre. Mais cette mention est difficile à concilier avec la baisse de 3,5% des ventes au détail (y.c. les ventes de véhicules) entre le T2 et le T3 2022 et celle de 2,6% des ventes dans le commerce de gros.
Si le PMI manufacturier est un indicateur performant sur longue période pour apprécier la dynamique de la production industrielle d’un pays, les récentes contraintes sur l’offre ont fait ressurgir un problème méthodologique lié à la prise en compte des délais de livraison. Le traitement des délais de livraison dans le PMI manufacturier doit distinguer les types de choc afin de mieux refléter l’activité industrielle. Nous proposons une méthode permettant de détecter la présence d’un choc de demande positif ou d’offre négatif. Le PMI manufacturier est ensuite corrigé en fonction du choc. Il est également possible de recalculer le PMI manufacturier par une analyse en composantes principales à partir de l’ensemble des sous-soldes disponibles dans l’enquête de S&P Global
Alors que le gouvernement allemand a déjà mis en œuvre une batterie de mesures budgétaires pour un montant de EUR 65 mds (soit 1,8% du PIB), Olaf Scholz a annoncé le 29 septembre dernier « une double dose », selon ses propres termes, avec l’instauration d’un bouclier énergétique d’une enveloppe maximum de EUR 200 mds. L’ensemble de l’enveloppe ne devrait pas être consommé, mais seulement la moitié d’après les premières estimations. Après deux décennies de rigueur, l’Allemagne entre dans une nouvelle ère budgétaire alors que son bien le plus précieux, l’industrie, est en pleine crise.
La question n’est plus désormais de savoir si l’Allemagne tombera ou non en récession, mais plutôt de savoir quand et dans quelle ampleur. La surprenante résistance de son PIB au 2e trimestre ne doit pas cacher les perspectives très dégradées d’ici la fin d’année. Entre les contraintes d’approvisionnement qui perdurent, le nouveau risque de pénuries d’énergie, l’envolée des coûts de production et une inflation élevée et généralisée qui détériore fortement le pouvoir d’achat des ménages, l’Allemagne ne devrait pas échapper à un recul de son PIB. L’ampleur de la baisse devrait néanmoins rester modérée.
Alors que Gazprom a annoncé le 2 septembre l’interruption jusqu’à nouvel ordre des livraisons de gaz via NordStream1, arguant des fuites d’huile, l’amplification des livraisons promises par l’entreprise russe via d’autres gazoducs (comme ceux traversant l’Ukraine) ne compensera que marginalement l’arrêt de NordStream1. Même si les stocks de gaz devraient être pleins d’ici début novembre, la probabilité de coupures d’électricité cet hiver se renforce. Dans le même temps, les prix à la consommation continuent d’accélérer outre-Rhin. L’inflation, telle que mesurée par Destatis, est ressortie à +7,9% sur un an en août. Le choc énergétique s’est très rapidement propagé aux biens dont les prix sont en hausse de 14,7% a/a, tandis que la dynamique dans les services reste modérée (+2,2% a/a).
En 2021, les négociations salariales ont été difficiles dans un contexte de reprise économique fragile et inégale. Les hausses de salaires devraient être plus élevées en 2022 sans toutefois compenser les effets de la forte inflation. Le très puissant syndicat allemand, IG Metall, a obtenu une revalorisation des salaires inédite depuis 30 ans dans le secteur de la métallurgie : +6,5%. Mais cette progression est à relativiser puisque l’accord a été signé sur 18 mois, ce qui ramène le taux de croissance annuel à +4,5 % en 2022. Les négociations salariales en Allemagne s’effectuent principalement de façon centralisée (secteur, branche)
L’Allemagne a enregistré pour la première fois depuis 1991 un déficit de sa balance commerciale au mois de mai 2022. Du fait d’une hausse des importations nettement plus importante que prévu (+2,7% m/m) et du recul inattendu des exportations (-0,5% m/m), le solde commercial allemand est passé en territoire négatif pour un montant de EUR 1 Md. Pour rappel, l’Allemagne dégageait, un excédent mensuel de près de EUR 20 Mds fin 2019.
L’Allemagne fait partie des pays de la zone euro les plus touchés par le conflit russo-ukrainien, ce qui se traduit par de faibles perspectives de croissance et une inflation élevée. Le PIB allemand progresserait d’à peine +1,3% en 2022, contre +2,5% pour la zone euro. En moyenne annuelle, le PIB resterait inférieur de 0,9% à son niveau de fin 2019. En parallèle, l’inflation atteindrait +8,1% en 2022, sous le poids des prix de l’énergie. Entre la hausse du salaire minimum promise par le gouvernement et les revalorisations attendues dans de nombreuses branches, la croissance des salaires devrait fortement accélérer en 2022, mais serait insuffisante pour compenser le choc inflationniste.
Les perspectives défavorables pour le deuxième trimestre 2022, d’abord considérées comme un risque dans les enquêtes de conjoncture, se matérialisent concrètement en Allemagne. Après le très net repli du commerce extérieur en mars (provenant d’une baisse de 4 % des exportations en volume et d’une hausse symétrique de 4,1% des importations), l’excédent commercial allemand s’est à peine amélioré en avril grâce à un léger redémarrage des exportations (+1 % m/m), mais il reste à un niveau extrêmement bas.
La bonne tenue des indices PMI du secteur manufacturier jusqu’en avril surprend tant les contraintes sur l’offre et les pressions sur les prix des intrants se sont amplifiées depuis le début du confit russo-ukrainien le 24 février dernier. C’est notamment le cas en Allemagne. Malgré une industrie fortement exposée au choc, son PMI manufacturier continue de se maintenir bien au-dessus de 50 points (54,6 en avril 2022), suggérant que l’activité dans le secteur demeure confortablement en expansion alors que la production industrielle s’est repliée de - 4,4% entre janvier et mars 2022. Ce message contradictoire tient avant tout à un biais méthodologique : celui de la prise en compte des délais de livraison dans l’indice agrégé
Bien que l’Allemagne ait retrouvé le chemin de la croissance au 1er trimestre 2022, avec un PIB qui a progressé de +0,2 % (t/t) d’après la première estimation publiée par l'Office fédéral de la statistique (Destatis), le mois de mars porte déjà les séquelles du conflit russo-ukrainien et des confinements stricts dans plusieurs régions de Chine. La production industrielle, dont le secteur représente 24 % du PIB allemand, s’est fortement repliée au mois de mars (–4,6 % m/m) après une croissance quasi-nulle en février. Elle reste très éloignée du son niveau d’avant-crise (T4 2019), à –5,2 %. Pire, cette nette baisse sur le dernier mois du 1er trimestre constitue un acquis de croissance nettement négatif pour le 2e trimestre à –3 %.
Parmi les quatre plus grandes économies de la zone euro, l’Allemagne affiche les perspectives de croissance à l’horizon 2022 les moins bonnes. Selon nos prévisions, le PIB allemand augmenterait d’environ 2% quand la croissance avoisinerait 3% en France et en Italie et frôlerait 5% en Espagne. L’acquis de croissance au T4 2021 est moins élevé outre-Rhin, l’exposition aux répercussions économiques de la guerre en Ukraine est plus grande et elles s’ajoutent aux difficultés d’approvisionnement préexistantes de l’industrie. La chute de l’indice ifo en mars, en particulier des anticipations des entreprises, en atteste et alerte sur le risque de récession.
Si l’Allemagne n’est pas le pays de la zone euro où l’inflation est la plus élevée, la dynamique n’en reste pas moins inconfortable. Les prix à la consommation y enregistraient encore une hausse conséquente à 5,1% en g.a. en janvier (indice harmonisé), en retrait néanmoins par rapport à décembre 2021 (5,7%). La disparation des effets de base positifs, induits par le retour des taux de TVA à leur niveau antérieur après leur baisse au second semestre 2020, ne s’est donc pas matérialisée par une chute marquée de l’inflation. D’autres facteurs se sont fortement renforcés, au premier rang desquels l’augmentation des prix énergétiques.
D’après les indicateurs disponibles pour la fin de l’année 2021, l’Allemagne aurait enregistré au T4 2021 au mieux une croissance très faible, mais une contraction du PIB n’est pas à exclure. Les commandes industrielles restent, certes, à un niveau relativement soutenu, mais la production demeure significativement freinée par des problèmes d’approvisionnement.
Après une croissance robuste au T2 et au T3, le climat des affaires s’est détérioré. En cause : les difficultés d’approvisionnement, la hausse des prix et la flambée des cas de Covid-19. La production va probablement stagner vers la fin de l’année. Le nouveau gouvernement compte mettre l’accent sur les politiques sociales et environnementales, tout en respectant pleinement l’orthodoxie budgétaire chère à l’Allemagne. La consommation privée sera le principal moteur de la croissance en 2022.
Notre Baromètre annonce clairement du mauvais temps. La détérioration est notable dans tous les secteurs, à l’exception du bâtiment. L’indice Ifo du climat des affaires s’est détérioré dans le secteur manufacturier en novembre pour le cinquième mois consécutif. L’activité industrielle est freinée par les goulets d’étranglements du côté de l’offre et par la hausse des prix des intrants. L’amélioration des anticipations, en particulier dans l’industrie automobile, pourrait annoncer une diminution des pénuries de pièces détachées dans ce secteur.
La République fédérale d’Allemagne est une république parlementaire dirigée par un chancelier et un président. Le pays est organisé en seize Länder (ou Bundesländer). Chacun d’eux a sa propre constitution et jouit d’une large autonomie. Les plus prospères sont la Bavière et le Bade-Wurtemberg dans le sud du pays, où le PIB par habitant est supérieur d’environ 15 % à la moyenne allemande. Le dynamisme de cette région est en grande partie dû à sa spécialisation sectorielle. La production manufacturière, qui représente environ 30 % de la production totale, est concentrée dans les industries de haute technologie.
La République fédérale d’Allemagne compte 83 millions d’habitants. Il s’agit de la première économie de la zone euro. Son produit intérieur brut représente plus d’un tiers de celui de la zone. Le PIB par habitant est supérieur de 20 % à la moyenne de la zone euro, faisant de ce pays l’un des plus prospères de la région. De plus, l’Allemagne est la quatrième puissance économique mondiale, derrière les États-Unis, le Japon et la Chine et le troisième exportateur, derrière la Chine et les États-Unis.
L’industrie manufacturière joue un rôle crucial dans l’économie allemande. Elle représente près de 20% de l’emploi et près d’un quart de la valeur ajoutée totale. Cependant, du fait du rôle central de l’industrie, elle est plus exposée aux fluctuations du cycle économique que l’économie de certains de ses voisins.