Alors que l’Allemagne sort à peine d’une récession, enregistrée au 4e trimestre 2022 et au 1er trimestre 2023, les enquêtes de conjoncture soulignent le risque que le pays y retombe au 2nd semestre. La détérioration relevée par l’IFO est nette (85,7 en août, de retour à son faible niveau d’octobre 2022), tant dans l’industrie que dans les services. Dans l’enquête du ZEW, l’indicateur lié aux conditions d’activité actuelles est tombé à -79,4 en septembre. Or, par le passé, un tel niveau s’est toujours traduit par une croissance négative.
La confiance des ménages, mesurée par l’indice GFK, se stabilise à un niveau historiquement bas depuis cinq mois. En septembre, elle se rapproche de -25,5, son niveau du mois de mai. Elle s’est certes redressée depuis son point bas de -42,8 (octobre 2022), à la faveur du reflux de l’inflation, mais elle reste très dégradée au regard de son niveau moyen d’avant-Covid (+6 entre 2001 et 2019). De plus, la proportion de ménages considérant opportun un achat important dans l’immédiat continue de chuter et a touché un plus bas historique en août 2023 à 5,8% (selon la Commission européenne). Cette détérioration devrait peser sur la consommation des ménages, alors qu’elle était déjà inférieure de 2% à son niveau d’avant-Covid au 2e trimestre.
Les dernières données ont marqué une stabilisation de l’inflation à un niveau encore significatif (6,4% a/a en août 2023, contre 6,3% en mai), ce qui souligne le manque d’impulsion, à ce stade, dans le sens d’une désinflation au-delà des prix de l’énergie et de l’alimentation. L’inflation dans les services dépasse ainsi les 5% depuis juin (5,1% en août), une première depuis la réunification du pays.
La perte de dynamisme est plus nette du côté du marché du travail que de celui de l’inflation avec 42 000 créations d’emplois au 2e trimestre 2023 (après deux trimestres à plus de 100 000 créations nettes). Le climat de l’emploi de l’enquête IFO a reculé à 97 en août, un niveau qui (hors période de Covid) n’avait plus été atteint depuis juin 2010, suggérant une poursuite de ce ralentissement.
Au vu de ces éléments négatifs, nous anticipons une croissance négative aux 3e et au 4e trimestres (à chaque fois -0,1% t/t). Après une récession au tournant de 2022-2023 et une croissance nulle au 2e trimestre 2023, l’économie traverse une période prolongée de sous-performance, l’Allemagne étant l’un des rares pays où le PIB est inférieur à son niveau précédant le déclenchement de la guerre en Ukraine (-0,2% entre le T1 2022 et le T2 2023).
Stéphane Colliac (achevé de rédiger le 21/09/2023)