L’éventualité d’une récession américaine consécutive au resserrement monétaire semble désormais écartée face à la résilience d’une économie qui a encore progressé de 0,8% t/t au T4 2023 et 2,5% en moyenne sur l’ensemble de l’année. Notre scénario central est désormais celui d’un ralentissement sensible sans trimestre de contraction au S1 2024. La Réserve fédérale peut désormais entrevoir un atterrissage en douceur et envisager des baisses de taux en 2024 – une année où l’actualité politique monopolisera l’attention.
En marge des questions relatives à la réglementation et à la supervision bancaires, le rôle joué par les Federal Home Loan Banks (FHLB) en amont de la ruée bancaire du printemps 2023 est âprement discuté. Désireux de corriger les distorsions associées à leur statut et de recentrer les FHLB sur leur mission première, leur régulateur, la Federal Housing Finance Agency (FHFA), a proposé plusieurs pistes de réforme. Entraver la capacité des FHLB à soutenir la liquidité des banques pourrait toutefois avoir des effets importants sur les marchés monétaires et accroître structurellement les besoins des banques en monnaie centrale.
L’enquête ISM indique une amélioration de l’activité non-manufacturière aux États-Unis en novembre, l’indice associé s’élevant à 52,7 (+0,9pp). En revanche, l‘ISM manufacturier est resté stable, à 46,7, se situant en zone de contraction pour le treizième mois consécutif. Dans ce secteur, l’amélioration des nouvelles commandes a été contrebalancée par la détérioration de la production et des embauches. Ce résultat conforte notre prévision d’un ralentissement de l’économie au T4, avec un taux de croissance du PIB qui atteindrait +0,4% t/t (contre +1,3% au T3 et +0,6% selon le GDPNow de la Fed d’Atlanta). Cependant, l’éventualité d’une récession s’éloigne progressivement, et nous ne prévoyons désormais qu’un trimestre de contraction en 2024 (-0,3% t/t au T2, après une stabilité au T1).
La dernière déclaration de la Réserve Fédérale – les projections de taux du FOMC et les commentaires de Jerome Powell, Président de la Fed – confortent l’anticipation d’un atterrissage en douceur pour l’économie américaine. Ces annonces devraient apaiser les craintes potentielles sur les perspectives de cash-flow des entreprises et du revenu des ménages. On a assisté à un fort rally des marchés tant obligataires, qu’actions, suscitant l’euphorie chez les investisseurs en cette fin d’année. Toutefois, le scénario d’un atterrissage en douceur devrait maintenant entrer dans une phase plus critique : les investisseurs ne tarderont pas à s’interroger sur le calendrier et l’ampleur des baisses de taux
La position nette vendeuse des hedge funds sur le marché à terme des titres du Trésor américain s’est considérablement élargie au cours de l’année. À la fin novembre, elle s’établissait à un niveau inédit de près de USD 800 milliards. Les gestionnaires d’actifs, désireux de se couvrir contre le risque de taux, ont, quant à eux, accru, leur position nette acheteuse.
La FHFA a récemment proposé de réformer les Federal Home Loan Banks, accusées d’avoir endossé un habit taillé bien trop grand pour elles, celui de «?prêteur d’avant-dernier ressort?».
Selon la première estimation du BEA (Bureau of Economic Analysis), l’économie américaine a franchement accéléré au T3, la croissance du PIB s’élevant à +1,2% t/t (+0,7 pp). Cette progression, la plus importante depuis sept trimestres, s’appuie sur le dynamisme de la consommation des ménages (+1,0% t/t) et sur la contribution significative des stocks (+0,3 pp). En revanche, l’investissement des entreprises a marqué le pas, après deux trimestres très soutenus, sous l’effet conjoint du resserrement monétaire et de l’effritement de l’impulsion apportée par l’IRA et le CHIPS Act.
En octobre dernier, plus de USD 1 500 mds de transactions ont été réalisées en moyenne, chaque jour, sur les marchés de pensions livrées de Treasuries par le biais de la Fixed Income Clearing Corporation (FICC) ; c’est USD 500 mds de plus qu’en octobre 2022. Si les opérations entre membres compensateurs de la FICC sont relativement stables, les prêts repo « sponsorisés » ont nettement progressé.
La remontée significative des taux d’intérêt sur les emprunts hypothécaires des ménages américains a conduit à un assèchement du stock de logements anciens disponibles à la vente. Ce « gel » des ventes dans l’ancien a entraîné un report sur le neuf.
Au troisième trimestre, l'économie américaine a réalisé l’équivalent d’un sprint en montée : une croissance impressionnante malgré le niveau élevé des taux d'intérêt. La consommation des ménages a été un facteur clé de cette performance, mais les dépenses publiques, la reconstitution des stocks et le rebond de la construction résidentielle ont également soutenu la croissance. Cependant il faut s'attendre à ce qu'elle ralentisse à l'avenir.Des taux hypothécaires élevés pèseront sur l'activité de construction, si elles s'attendent à une demande plus faible, il y a un risque que les entreprises préfèrent réduire leurs stocks. Par ailleurs, on ne sait pas dans quelle mesure les ménages continueront à réduire leur taux d'épargne ainsi que l'excédent d'épargne accumulé pendant la pandémie.
Le climat des affaires a connu un affaiblissement marginal aux États-Unis au mois de septembre en raison de développements divergents dans les secteurs manufacturier et non-manufacturier. Ce dernier a ralenti à 53,6 (-0,9pp) dans l’enquête ISM, tiraillé entre une activité dynamique (Business Activity à 58,8) et un ralentissement sensible des nouvelles commandes (-6,7pp à 51,8). En revanche, l’indice manufacturier a progressé pour un troisième mois d’affilée.
L’économie américaine poursuit sa croissance ; elle continue ainsi de repousser une récession toujours probable, mais qui n’interviendrait pas en 2023 et dont l’ampleur serait limitée. Si la consommation des ménages a, pour l’heure, résisté au resserrement monétaire, l’effet cumulatif et retardé de celui-ci devrait finir par impulser une dynamique récessive. Les premiers effets sont déjà visibles sur le secteur de l’immobilier, tandis que le marché de l’emploi montre des signes de ralentissement. Les hausses de taux sont probablement terminées, ce qui est loin d’être le cas de l’approche restrictive de la politique monétaire dans son ensemble.
Les rendements des obligations d’État américaines ont sensiblement augmenté depuis la fin du mois de juillet, une dynamique qui s’est accélérée au cours des trois dernières semaines. La hausse de la prime de terme semble déterminante même si les causes sous-jacentes ne sont pas clairement identifiées. En revanche, les conséquences ne font aucun doute : elles sont négatives pour l’économie. L’un des principaux canaux de transmission est le marché immobilier, et la demande de crédit en général devrait en pâtir. L’autre facteur à surveiller est le marché actions, le rendement des bénéfices (earnings yield) du S&P500 étant à présent inférieur à celui des obligations d’État à 10 ans
Dans l’univers des banques centrales, les apparences sont trompeuses. Le dernier relèvement des taux de la Banque centrale européenne a été jugé dovish (accommodant) tandis que la pause décidée par la Réserve fédérale américaine a été qualifiée de hawkish (restrictive). Ces réactions montrent qu’au-delà de la décision sur les taux, le message qui l’accompagne a aussi son importance. Celui de la BCE a été perçu comme indiquant que le taux terminal avait été atteint. Aux États-Unis, les dernières projections de taux d’intérêt (dot plot) des membres du FOMC indiquent une nouvelle hausse avant la fin de l’année, avec un taux des fonds fédéraux qui devrait rester élevé pendant longtemps
Les États-Unis ont bénéficié en août d’un redressement du climat des affaires, qui semble écarter pour quelques mois encore le risque de récession. L’ISM manufacturier a gagné 1,2 pp en août pour s’établir à 47,6, mais demeure toutefois clairement en zone de contraction (depuis novembre 2022, un record depuis 2009).
Le discours d’ouverture de Jerome Powell au symposium de la Réserve fédérale à Jackson Hole était au centre de l’attention et s'est focalisé sur le court terme et l’inflation. Le message à retenir ? La lutte contre l'inflation n’est pas encore terminée – un message repris et appuyé par Christine Lagarde lors de son propre discours.
Si la trajectoire du climat des affaires pouvait en mai laisser augurer une récession à venir, celle de juin est plus ambivalente. Certes, la nouvelle baisse de l’ISM manufacturier, à 46 en juin, a porté ce dernier à son plus bas niveau depuis la crise de 2008 (hors période de Covid). Le message de l’ISM non-manufacturier est toutefois clairement divergent avec un rebond à 53,9 en juin contre 50,3 en mai.
En moyenne, depuis un an, les fonds monétaires américains (MMF) « déposent » quotidiennement près de USD 2 200 mds de cash auprès de la Réserve fédérale (Fed) en échange de la prise en pension, au jour le jour, de titres du Trésor inscrits au bilan de la Fed (Overnight Reverse Repo Facility, ON RRP). Depuis quelques mois, ces « dépôts » se sont nettement amoindris. Le 17 juillet, ils atteignaient « seulement » USD 1 730 mds.
L’économie américaine continue de croître et de créer des emplois mais à un rythme progressivement plus lent. De plus, la Réserve fédérale n’en a pas tout à fait terminé avec les hausses de taux. Nous continuons d’anticiper une récession, à compter du T3 2023 et jusqu’au T1 2024, sous l’effet du resserrement monétaire. La Fed, qui a opté pour le statu quo en juin, à la faveur d’une inflation qui confirme son reflux, et pour prendre le temps d’évaluer les effets du resserrement monétaire opéré jusqu’ici, procèderait à une dernière hausse de 25 pb en juillet, portant la fourchette des Fed funds à 5,25-5,50%.
Les projections de taux d’intérêt (« dots ») des membres du FOMC constituent un élément de référence pour les investisseurs et les agents économiques en général quand il s’agit de formuler des anticipations de taux d’intérêt. Elles peuvent être tout particulièrement utiles lorsque l’environnement monétaire connaît une évolution rapide, comme ce fut le cas ces deux dernières années. En comparant les projections de taux des fonds fédéraux, issues de l’enquête auprès des opérateurs de marché (Survey of Market Participants, SMP), et celles des membres du FOMC, il semble que ces dernières jouent un rôle-clé dans l’ancrage des anticipations à long terme de taux d’intérêt
D’après l’estimation GDPNow de la Réserve fédérale d’Atlanta, la croissance américaine s’élèverait à +0,5% t/t au T2 2023, un chiffre légèrement supérieur à notre prévision et légèrement meilleur que celui du T1.
Le retour de l’inflation forte a vu la réapparition du débat sur le coût d’une politique désinflationniste, très vif au début des années 80. Il porte sur le ratio de sacrifice – la perte de production comparée à sa tendance pour une baisse donnée de l’inflation – et si l’atterrissage sera brutal ou se fera en douceur. Les termes du débat ont évolué dernièrement et des commentateurs s’interrogent désormais sur une possible « désinflation immaculée » : la Réserve fédérale parviendrait à ramener l’inflation à sa cible grâce à une politique monétaire restrictive avec un faible coût en matière de chômage. Ceci suppose une baisse des tensions dans le marché du travail ainsi que de la croissance des salaires. Néanmoins, cela prendra du temps
D’après les dernières données publiées, en zone euro comme aux États-Unis, l’inflation est essentiellement portée par sa composante sous-jacente et donc, à première vue, par la demande. Des facteurs d’offre sont aussi à l’œuvre via la diffusion du choc sur les prix de l’énergie et des matières premières et l’inflation alimentaire. Ces effets de premier tour montrent des premiers signes de dissipation, ce qui devrait tirer plus nettement à la baisse l’inflation à l’horizon des prochains mois. La dynamique des salaires est à surveiller compte tenu de son caractère inflationniste qui serait modeste mais persistant, justifiant la réponse monétaire.
Au 1er trimestre 2023, la croissance américaine s’est établie à +0,3% t/t. Ce résultat est nettement en-deçà des attentes : le chiffre est deux fois moindre que l’estimation GDPNow de la Réserve fédérale d’Atlanta et que notre prévision (0,6%). La croissance ne serait donc pas si imperméable que cela au choc inflationniste et au resserrement monétaire.
Lors de sa dernière conférence de presse, le président de la Réserve fédérale, Jerome Powell, a estimé que la politique monétaire américaine pourrait être déjà suffisamment restrictive. Certes, les données économiques occuperont une place particulière dans ses décisions à venir mais les autorités monétaires ne se limiteront pas aux derniers chiffres pour autant. Les effets différés des relèvements de taux antérieurs doivent être pris en compte or ils n’apparaîtront dans les données publiées que dans les prochains mois. C’est pourquoi, lors des précédents cycles de resserrement, la Fed a eu tendance à cesser de relever les taux alors même que le rythme des créations d’emploi était encore assez soutenu, et bien avant que le taux de chômage ne reparte significativement à la hausse