La crise de l’immobilier, le maintien de la stratégie zéro covid face aux résurgences de l’épidémie, et la fragilité persistante de la consommation des ménages sont parmi les principaux facteurs de risque pesant sur la croissance chinoise. À court terme, les autorités devraient renforcer prudemment leur soutien monétaire et budgétaire à l’activité, tout en maintenant le cap de l’assainissement du marché immobilier, de la réduction des risques financiers et du resserrement réglementaire.
La crise de l’immobilier se diffuse à l’économie
La croissance a marqué le pas depuis l’été. Dans l’industrie, l’activité a été gênée par d’importantes contraintes d’offre liées aux perturbations dans les chaînes d’approvisionnement et, surtout, dues à des coupures d’électricité dans les usines en septembre et octobre. Les autorités ont rapidement réagi, demandant aux mines de charbon d’accroître leur production et autorisant les producteurs d’énergie à augmenter leurs prix de vente aux consommateurs, jusqu’à 20% au-dessus du tarif réglementé. La production d’électricité a ainsi été relancée et la croissance industrielle a pu réaccélérer avant la fin octobre. Cette reprise devrait se poursuivre. La production et l’investissement dans le secteur manufacturier restent notamment soutenus par la performance toujours solide des exportations. Celles-ci ont augmenté de 26% en g.a. en moyenne sur la période de mai à octobre, tirées par le rebond de la demande mondiale et des gains de part de marché.
Dans les services, l’activité économique a d’abord été pénalisée par le durcissement réglementaire touchant des secteurs considérés comme sensibles par Pékin (par exemple le numérique et le soutien scolaire). Elle a ensuite été affectée par les nouvelles restrictions introduites en août face à la résurgence de l’épidémie de Covid-19. Surtout, la crise de l’immobilier s’est diffusée à l’économie. En raison du resserrement des règles prudentielles et des conditions de crédit s’imposant aux promoteurs immobiliers, ces derniers ont rencontré des problèmes croissants de financement et de trésorerie au cours des derniers mois. L’investissement immobilier s’est contracté. Les projets en construction, les projets nouvellement démarrés et les transactions immobilières se sont effondrés depuis juillet. Les prix moyens des logements ont entamé une baisse, qui devrait se poursuivre à court terme.
Dans ce contexte, la consommation privée est toujours à la peine. Les volumes de ventes au détail ont progressé de moins de 2% en g.a. sur la période août-octobre, contraints par la stratégie « zéro covid » et les effets du recul des ventes de logements. En outre, les difficultés de certaines entreprises de services (en particulier les PME) et la crise de l’immobilier pèsent sur le marché du travail, et ont freiné la hausse des revenus des ménages au T3 2021.
L’assouplissement budgétaire et monétaire sera prudent
Le ralentissement de la croissance s’explique amplement par le durcissement de la politique économique, de l’environnement réglementaire et des règles prudentielles dans le secteur immobilier depuis un an.
Ces mesures s’inscrivent dans la stratégie de moyen terme des autorités, visant à désendetter les entreprises, à réduire les risques financiers, à assainir le marché immobilier et à promouvoir la « prospérité commune ». Ce cap devrait être maintenu, en dépit de ses conséquences sur la croissance du PIB.
Néanmoins, sans changer les limites prudentielles imposées aux promoteurs, les autorités devraient procéder à des ajustements afin d’éviter un effondrement dévastateur du marché immobilier. Les conditions sur les prêts hypothécaires et l’accès des promoteurs à certains financements de court terme ont de fait été assouplis ces derniers jours. En outre, le soutien monétaire et budgétaire à la demande intérieure devrait être renforcé prudemment, principalement via un redressement modéré de l’investissement public et des mesures ciblées d’assouplissement du crédit. Les autorités ont par exemple récemment lancé des programmes de prêts dédiés aux PME et d’autres visant à accompagner les efforts de réduction des émissions carbone. La croissance des crédits à l’économie, qui avait ralenti depuis la fin 2020 jusqu’en septembre, s’est stabilisée en octobre et devrait se redresser légèrement à court terme.