Après une croissance robuste au T2 et au T3, le climat des affaires s’est détérioré. En cause : les difficultés d’approvisionnement, la hausse des prix et la flambée des cas de Covid-19. La production va probablement stagner vers la fin de l’année. Le nouveau gouvernement compte mettre l’accent sur les politiques sociales et environnementales, tout en respectant pleinement l’orthodoxie budgétaire chère à l’Allemagne. La consommation privée sera le principal moteur de la croissance en 2022.
Après la levée des mesures de confinement, le PIB allemand a fortement rebondi au T2 et au T3, portant l’activité à un niveau proche des valeurs de pré-crise. Les indicateurs conjoncturels pointent vers une poursuite du ralentissement de l’économie, voire une stagnation au T4. En novembre, l’indice Ifo du climat des affaires s’est inscrit en retrait pour le cinquième mois d’affilée, les problèmes d’approvisionnement continuant de freiner l’activité dans l’industrie manufacturière. Dans les services, la quatrième vague de la pandémie de coronavirus a ébranlé la confiance des chefs d’entreprises. De plus, la forte hausse de l’inflation entraîne une érosion du pouvoir d’achat. L’inflation harmonisée a atteint 6 % a/a en novembre, en grande partie en raison de la flambée des prix de l’énergie et des denrées alimentaires. Sans surprise, dans un tel contexte, la confiance des ménages s’effrite et leur propension à acheter a chuté à un plus bas sur neuf mois en novembre. Le gouvernement a pris des mesures pour limiter la propagation du virus. En interdisant l’accès des non-vaccinés aux commerces non essentiels, il espère une accélération de la vaccination, dont le taux est relativement faible par rapport aux pays voisins.
Les projets partisans dilués dans l’accord de coalition
Après deux mois d’intenses négociations, suite aux élections législatives de fin septembre dernier, le SPD (sociaux-démocrates), les Verts et le FDP (libéraux) sont parvenus à un accord sur la formation du nouveau gouvernement, dirigé par Olaf Scholz (SPD). Le programme de la coalition insiste sur la nécessité d’accomplir des progrès audacieux. Pour autant, les propositions économiques ne devraient pas être considérées comme une rupture radicale, mais plutôt comme une correction, des politiques mises en œuvre pendant les années Merkel. Ce compromis soigneusement élaboré reflète les différentes sensibilités des membres de la coalition. Tous les partis se sont mis d’accord sur la nécessité d’encourager l’investissement dans les infrastructures. Il s’agit d’accélérer la transition énergétique et la transformation numérique, avec un financement partiel par le programme Next Generation EU. Cependant, pour le FDP en particulier, ce soutien européen devrait être limité tant dans sa durée que dans son ampleur. Le SPD, quant à lui, a obtenu que le salaire horaire minimum soit relevé de EUR 9,60 à EUR 12,00. Pour les Verts, la priorité réside dans l’alignement sur les objectifs pour le climat de l’Accord de Paris via la sortie anticipée des centrales au charbon et la fermeture des mines à charbon « dans la mesure du possible » à l’horizon 2030. Le nouveau ministre des Finances, Christian Lindner (FDP), devrait maintenir les règles budgétaires en Allemagne et au niveau européen. Cependant, le premier défi que le nouveau gouvernement doit affronter est celui de la quatrième vague de Covid-19. L’orientation budgétaire sera probablement moins accommodante en 2022 avec le retrait progressif des mesures d’aides spéciales.
Rebond de la production avec la réduction des pénuries
La pandémie freinera probablement la croissance au tournant de 2021 et début 2022. Avec la progression de la vaccination, cet effet négatif devrait, toutefois, se faire de moins en moins sentir et céder la place à un net rebond de l’activité. Dans un premier temps, la consommation privée jouera un rôle moteur une fois les mesures de confinement levées. La croissance rapide de l’emploi est, par ailleurs, de nature à amortir les pertes de pouvoir d’achat liées à la flambée des prix de l’énergie. En puisant dans l’épargne accumulée pendant la crise, les ménages vont également soutenir la consommation. Les exportations de produits manufacturés vont probablement rebondir en 2022 avec la réduction attendue des pénuries de pièces détachées et de semi-conducteurs. L’amélioration des perspectives pour le secteur manufacturier devrait encourager les entreprises à investir. Autre facteur de soutien pour l’investissement : les politiques publiques visant à accélérer la transition énergétique et la transformation numérique de l’économie. L’inflation totale se maintiendra à des niveaux plutôt élevés, en particulier au cours du premier semestre 2022, principalement en raison de l’envolée des prix de l’énergie. Dans les années à venir, la décarbonation de l’économie aura un effet inflationniste supplémentaire. Dès lors, dans un contexte de tensions sur le marché de l’emploi, l’un des risques majeurs serait le déclenchement d’une spirale salaires-prix.