Eco Perspectives

Après le sprint de la reprise, le marathon de la consolidation budgétaire

16/12/2021

Le PIB belge a crû de 2 % t/t au T3, un résultat nettement meilleur que les attentes du consensus. Le PIB dépasse ainsi son niveau pré-Covid pour la première fois depuis le début de la pandémie. Nous anticipons une croissance de 6,1 % sur l’ensemble de l’année 2021, puis un ralentissement à 3,1 % l’année prochaine. Un rythme qui reste supérieur à la croissance potentielle. La crise semble ne pas avoir laissé de cicatrices sur l’économie belge. Le gouvernement De Croo aura toutefois fort à faire tandis que le niveau élevé de la dette publique revient sur le devant de la scène.

Après une contraction de 5,7 % en 2020, l’économie belge a achevé son redressement au T3 2021 en retrouvant son niveau de PIB d’avant-crise ; la consommation a été la dernière composante du PIB à y parvenir. Une nouvelle phase de la reprise semblait pouvoir s’engager, avec une croissance plus lente, mais toujours supérieure à la croissance potentielle.

CROISSANCE ET INFLATION

Toutefois, le variant Omicron s’est invité dans l’équation, sur fond de forte progression du nombre de nouveaux cas de Covid-19 en Belgique et dans les pays voisins. Notre scénario est désormais clairement assorti d’un risque baissier, même s’il reste à voir quel sera l’impact négatif direct (mesures de distanciation sociale plus strictes) et indirect (à travers le canal de la confiance) d’Omicron sur l’activité.

Notre évaluation nowcast pour le T4 implique un ralentissement significatif de la croissance, de 2,0 % t/t au T3 à seulement 0,3 % t/t. L’annonce récente de mesures plus strictes de restriction sanitaire, juste avant les fêtes, n’est pas sans rappeler la situation d’il y a un an. Le PIB avait alors reculé au T4 2020, un scénario qui pourrait se répéter au T4 2021.

L’inflation en Belgique, mesurée par l’indice des prix à la consommation harmonisé (IPCH) d’Eurostat, a atteint 7,1 % a/a en novembre (estimation flash). C’est le niveau le plus élevé jamais enregistré depuis la création de l’indice, en 1992. Comme ailleurs, le regain d’inflation est imputable en majeure partie à la flambée des prix de l’énergie.

La confiance des ménages s’est établie en novembre à son plus bas niveau depuis avril quand les mesures de distanciation sociale étaient encore plus strictes. Par rapport à début 2021, les ménages sont davantage inquiets de leur situation financière et se déclarent moins en capacité d’épargner. Un rapport récent de la Banque nationale de Belgique (BNB) fournit une indication de l’impact asymétrique de la crise sanitaire sur l’épargne. Dans l’ensemble, l’épargne forcée et, dans une moindre mesure, celle de précaution ont concouru à accroître le taux d’épargne en Belgique par rapport à son niveau d’avant-crise. Néanmoins, celui des ménages aux revenus les plus faibles n’a pas augmenté. L’accroissement de l’épargne est ainsi majoritairement le fait des ménages aisés. Leur propension plus faible à consommer permet de douter du rattrapage tant attendu de la demande.

Concernant le marché du travail, on note un regain d’optimisme par rapport au début de l’année. Les craintes de chômage ont pratiquement disparu des dernières enquêtes auprès des ménages. Cette tendance est étayée par la baisse observée du taux de chômage pendant la majeure partie de l’année et par un niveau d’emploi total record de 5 millions au T3 2021.

La confiance des entreprises est restée stable en novembre, le secteur du bâtiment apparaissant comme le plus optimiste. Le secteur des services fait état de perspectives légèrement dégradées. D’après une enquête ad hoc de l’ERMG (Economic Risk Management Group), près de la moitié des entreprises interrogées déclarent des effectifs insuffisants. Les pénuries d’intrants (40 %) et la hausse des prix de ces derniers (22 %) figurent, en outre, parmi les principales inquiétudes des entreprises belges.

Le déficit public s’est dégradé en 2020 sous l’impact de la pandémie, passant de 1,9 % à 9,4 % du PIB. Avec des recettes plus ou moins stables en pourcentage d’un PIB diminué, la hausse des dépenses a lourdement pesé sur le déficit. La situation s’est quelque peu améliorée cette année, principalement du fait de la baisse des dépenses visant à contrer l’impact économique de la crise sanitaire. Toutefois, même dans un contexte de baisse continue du service de la dette, le déficit reste élevé. La BNB prévoit un déficit primaire de plus de 3 % du PIB en 2023, à comparer à un solde à l’équilibre en 2019. Améliorer la situation budgétaire ne sera pas tâche aisée pour la large coalition emmenée par le Premier ministre De Croo.

LES ÉCONOMISTES EXPERTS AYANT PARTICIPÉ À CET ARTICLE

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