Malgré des flux nets de dette publique à long terme négatifs sur la période 2021-2023 (voir graphique), la Chine reste en tête des pays qui prêtent le plus aux États d’Afrique subsaharienne[1], devant la France, le Royaume-Uni et les États-Unis. Cependant, la dette publique à long terme due à la Chine s’est contractée de 4,5% en dollars courants entre 2019 et 2023 alors que celle due à l’ensemble des créanciers de la région a augmenté de 15,6%.
La part de la Chine dans le stock de dette publique extérieure à long terme de l’Afrique subsaharienne a ainsi diminué chaque année entre 2019 et 2023, reculant de 18,9% à 15,3%. Plus précisément, entre 2020 et 2023, les décaissements chinois se sont fortement réduits alors que les remboursements sont restés élevés et se sont même alourdis en 2022-2023.
Pour 2024, on constate un fort rebond des décaissements chinois de prêts à long terme, à hauteur de USD 13,3 mds, soit 0,7% du PIB d’Afrique subsaharienne, selon les estimations provisoires de la Banque mondiale. Il s’agit d’un record depuis 2016. Cependant, ce rebond n’indique pas un revirement de stratégie de la Chine sur le continent africain : depuis 2020, la Chine se contente principalement de refinancer les crédits qui arrivent à maturité. En 2024, la hausse subite des nouveaux décaissements est simplement allée de pair avec la reprise du service de la dette des principaux États africains bénéficiaires des crédits chinois. C’est le cas du gouvernement angolais, qui a capté à lui seul 34% des nouveaux crédits chinois en 2024, et dont le service de la dette due à la Chine a repris en juillet 2023 après un moratoire de trois ans. C’est également le cas de la Zambie qui avait fait défaut sur sa dette extérieure en novembre 2020, et qui est parvenue à un accord de restructuration de dette avec ses créanciers bilatéraux et obligataires au premier semestre 2024. En fait, parmi les partenaires privilégiés de la Chine[2], seul le Nigéria a bénéficié de flux nets positifs, c’est-à-dire de nouveaux crédits, chaque année depuis 2020.
La nouvelle stratégie chinoise à l’œuvre depuis 2020 ne signifie pas pour autant la fin de sa relation privilégiée avec l’Afrique subsaharienne. Malgré une plus grande prudence dans l’octroi de crédits, la Chine souhaite conserver des liens diplomatiques et financiers forts avec les économies de la région, notamment avec les pays riches en ressources naturelles[3] (pétrole et minerais nécessaires à la transition énergétique). En outre, elle reste de loin un créancier incontournable de la région. L’encours de ses crédits aux États d’Afrique subsaharienne est cinq fois supérieur à celui de la France, six fois supérieur à celui du Royaume-Uni, et onze fois supérieur à celui des États-Unis.