Les déficits d’aujourd’hui sont les impôts de demain. En bonne logique, les ménages devraient donc épargner plutôt que consommer les transferts publics qu’ils reçoivent, dès lors qu’ils se font à crédit et dans l’optique de les rembourser tôt ou tard.
UNE ESTIMATION DU TAUX D'ÉPARGNE DES MÉNAGES DE LA ZONE EURO Des soupçons, mais pas de preuve Rationnel sur le papier, cet effet de vases communicants dit aussi « ricardien » (du nom du maître de la pensée libérale anglaise, David Ricardo) reste difficile à mesurer dans les faits. En France, l’actualité lui ferait pourtant écho. L’omniprésence du débat sur la viabilité des comptes publics en général, et du système des retraites en particulier, pousserait les ménages à épargner, jusqu’à des niveaux jamais atteints depuis 45 ans (18,9% du revenu disponible au deuxième trimestre de 2025 selon l’Insee). Reste à savoir s’il s’agit d’un réflexe dû à l’instabilité politique du moment ou bien la manifestation d’une inquiétude plus ancienne, pas seulement française, liée à la dérive de la dette de l’État.
Pour répondre, il peut être utile de confronter l’évolution de l’épargne à celle de ses déterminants traditionnels, afin de voir si un quelconque comportement « ricardien » y trouve sa place. Or l’analyse empirique, retranscrite dans notre graphique et couvrant les vingt-cinq dernières années d’existence de l’UEM (Union économique et monétaire) ne fournit pas de preuve. Statistiquement, l’évolution des comptes publics (donnée par les déficits ou les variations du taux d’endettement) n’a pas d’influence significative sur l’épargne des particuliers, une fois prise en compte celle des revenus disponibles, des taux d’intérêt et du taux de chômage (retenu en tant que motif précaution). Ce constat vaudrait pour la France comme pour la moyenne de la zone euro.
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L’absence d’effet ricardien empiriquement mesurable peut s’expliquer par le fait que la préoccupation quant à la santé financière des États est à la fois variable en Europe (elle a même pu régresser en Italie) et relativement récente en France. Dans une optique de baisse du taux d’épargne, le recul du chômage ainsi que celui des taux d’intérêt réels restent des facteurs importants. À défaut d’être déterminante, une levée de l’incertitude entourant la trajectoire des comptes publics ne pourrait toutefois qu’aider.