Le ratio de dette publique augmente de nouveau dans la zone euro, tandis que son équivalent pour les entreprises non-financières (ENF) diminue. Le Fiscal Monitor d’octobre 2025 du FMI anticipe que le ratio de dette publique va croître de 5 points de PIB en zone euro d’ici à 2030 par rapport à son niveau de 2024 (87,2% du PIB, contre 83,6% en 2019). A contrario , la dette des entreprises non-financières a atteint au T2 2025 son plus bas niveau depuis le T3 2007, à 66,6% du PIB.
Taux d’intérêt souverain à 10 ans, taux swap et taux des prêts bancaires aux ENF
En parallèle, le taux d’intérêt moyen accordé par les banques aux entreprises non financières a diminué, tandis que le taux souverain à 10 ans a augmenté dans plusieurs pays de la zone euro. Focus sur la France, où tous deux ont atteint un niveau de près de 3,4% en août 2025, une convergence relativement inhabituelle. Est-ce une anomalie ou un phénomène appelé à durer ?
Le taux d’intérêt qu’octroie une banque à ses contreparties dépend du coût auquel elle se finance (taux swap) plus une prime reflétant le risque lié à l’emprunteur (voir : « Zone euro : l’essentiel de la baisse du coût du crédit est derrière nous » ). Or, si le taux d’intérêt que les banques octroient aux ENFs est proche du taux souverain, c’est que le coût de leur financement lui est inférieur. Ainsi, le taux swap 3 mois / 10 ans a diminué et se rapproche désormais du taux allemand, référence européenne (et donc taux sans risque dans l’univers des taux souverains).
La remontée des taux souverains, liée à l’endettement croissant observé dans des pays clés comme la France, mais aussi en Allemagne, n’a pas empêché la baisse du taux swap et donc celle des taux bancaires aux ENFs. Il s’ensuit donc une convergence entre le taux souverain français et le taux aux ENFs, déjà observée lors de la crise de la zone euro : l’effet de la hausse des taux souverains sur les conditions de crédit au secteur privé avait donc pu être amorti (et a de nouveau pu l’être en 2025). Tout ceci avant que le quantitative easing de la BCE ne vienne rétablir, à partir de 2015, une hiérarchie plus habituelle, en permettant la baisse des taux souverains.
Les perspectives de politique monétaire sont différentes aujourd’hui. D’après nos prévisions, la BCE a terminé son cycle de baisses de taux. Elle a ramené sa politique monétaire en territoire globalement neutre, où elle devrait la laisser à l’horizon des 12 prochains mois. En parallèle, nous anticipons que le taux souverain reste sur une note plus haute (notamment parce que les taux allemands devraient subir une pression à la hausse, en raison de l’endettement public croissant outre-Rhin). Tant que la politique de la BCE restera neutre, la nouvelle hiérarchie avec un taux swap inférieur au taux souverain français, et un taux aux ENFs comparable au taux souverain, devrait donc être appelée à durer. Une convergence des coûts de financement entre ENFs et souverains qui est également valable (et le resterait) dans les autres pays de la zone euro.