Les banquiers centraux restent confrontés à une inflation élevée qui s’est généralisée à la quasi-totalité des postes de l’indice des prix à la consommation. Si l’inflation des produits alimentaires reste l’un des principaux moteurs de la hausse des prix, la dynamique dans les services reste très vigoureuse. Elle s’inscrivait en légère baisse en mars aux États-Unis (+7,3% en g.a.), tandis qu’elle gagnait en vigueur au Royaume-Uni (+6,6%), en zone euro (+5,2%, avril 2023), et, dans une bien moindre mesure, au Japon (+1,5%). La hausse des loyers explique en grande partie cette poussée des prix plus importante dans les deux économies anglo-saxonnes. On constate néanmoins dans toutes ces régions des hausses de prix de plus en plus prononcées sur d’autres postes dans les services, notamment le transport (principalement aux États-Unis), les loisirs et la culture (zone euro, Royaume-Uni), l’enseignement (zone euro, Royaume-Uni), et la santé (Royaume-Uni).
L’inflation sous-jacente reste élevée
L’inflation élevée épargne très peu de postes de l’indice des prix à la consommation (IPC). En Europe et aux États-Unis, plus des deux-tiers des composantes de l’IPC enregistraient en mars une hausse annuelle supérieure à 4%. Le Royaume-Uni s’en sort le moins bien avec 80% des composantes concernées, tandis qu’au Japon le seuil des 50% est franchi, également du jamais-vu pour le pays dans le passé récent.
L’inflation en zone euro a progressé de 6,9% en mars en g.a. à 7,0% en avril, selon l’estimation préliminaire d’Eurostat. La baisse importante des prix de l’énergie en avril 2022 (-4,0% m/m) a engendré, en avril 2023, un effet de base défavorable qui a contribué au rebond de l‘inflation de cette composante. Une rechute est vraisemblable en mai : l’IPCH « énergie » a notamment continué de baisser en rythme mensuel en avril (-0,8% m/m), pour le troisième mois consécutif.
Les pressions sous-jacentes se sont renforcées au cours du premier trimestre 2023 en zone euro, avant d’enregistrer un tassement en avril à 5,6% (IPCH hors énergie, alimentation, alcool et tabac). L’inflation core aux États-Unis est légèrement repartie à la hausse en mars (+5,6% en g.a.), après une décélération les mois précédents.
L’inflation des produits alimentaires reste l’un des principaux moteurs de l’inflation dans toutes les régions étudiées avec les biens ménagers et les activités de loisirs et culturelles (voir cartes thermiques). Toutefois, même si le poste « alimentation » progresse vigoureusement aux États-Unis (+8,5% en g.a. en mars), sa contribution à l’IPC total est moindre qu’en zone euro ou au Japon, du fait du poids important du poste « logement » outre-Atlantique, qui augmente tout aussi fortement (+8,2% en g.a. en mars, mesure IPC).
La situation est bien plus détériorée au Royaume-Uni, où la poussée des prix énergétiques reste conséquente et contribuait encore pour près d’un quart à l’inflation totale en mars. La hausse des prix à la consommation dans le pays est toujours supérieure à 10% sur un an, ce qui constitue de loin le niveau le plus élevé des pays du G7. Cette forte progression est alimentée par de fortes hausses de salaires (+7,0% en g.a. en février), elles-mêmes entretenues par un marché du travail tendu.
Les enquêtes PMI permettent néanmoins d’espérer une phase de désinflation plus marquée : l’indicateur de pressions sur les prix (agrégat d’indicateurs PMI) a baissé très nettement au cours des derniers mois dans l’ensemble des pays couverts. Cela corrobore l’évolution des prix à la production, dont la progression est en net repli depuis plusieurs mois.
Les anticipations d’inflation des ménages, à horizon d’un an, ont bondi aux États-Unis, à 4,6% en avril selon l’enquête de l’Université du Michigan, tandis qu’elles restent stables, autour de 4%, au Japon (JCER). Les chiffres pour le mois de mars en zone euro seront dévoilés le 11 mai par la BCE. Les prévisionnistes affichent des attentes plus mesurées, avec une inflation qui ne dépasserait pas la barre des 3% d’ici un an aux États-Unis, au Japon et en zone euro. Les anticipations des marchés restent, pour leur part, stables, mis à part au Japon où le point mort d’inflation, structurellement plus bas qu’en Europe ou aux États-Unis, a néanmoins atteint son plus haut niveau depuis 2014.