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Baromètre de l'inflation - mai 2024 | L’inflation reste sur un plateau

17/05/2024
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La désinflation sur les biens alimentaires et les biens manufacturés se poursuit, dans son ensemble, tandis que la déflation sur les prix de l’énergie s’est – à l’exception du Royaume-Uni- largement atténuée. Hormis au Japon, les indicateurs de pression sur les prix (côté offre) ont rebondi ces derniers mois (page 19) et la progression des salaires dépasse celle de l’inflation dans l’ensemble des zones couvertes (page 27).

Aux États-Unis, l’inflation mesurée par l’IPC a légèrement reflué, passant de 3,5% en glissement annuel en mars à 3,4% en avril, tandis que l’inflation sous-jacente est passée de 3,8% à 3,6%. Une déflation plus importante sur les véhicules d’occasion (de -2,2% en mars à -6,9%) est le principal facteur de cette baisse. L’inflation dans les services est, en revanche, restée stable à 5,3%. Ce chiffre masque toutefois des dynamiques contrastées puisque la composante « logement » décélère, certes lentement, mais de manière continue depuis un an (+ 5,5% a/a en avril), tandis que l’inflation dans les services « hors logement » (+4,9% en g.a. en avril) a réaccéléré depuis septembre 2023.

Le mois d’avril a marqué une nouvelle baisse de l’inflation sous-jacente en zone euro, qui est passée de 2,9% à 2,7%. Cela conforte les attentes d’une première baisse des taux directeurs de la part de la BCE en juin. Cette dernière prendra également bonne note du repli des mesures alternatives d’inflation : deux nouvelles mesures (médiane pondérée, moyenne ajustée à 10%) sont repassées sous les 3% en mars. La Belgique connait néanmoins un rebond assez net de l’inflation (4,9% en avril contre une déflation de 1,7% en octobre 2023).

Au Royaume-Uni, l’inflation totale est restée stable à 3,8% en mars. La déflation sur l’énergie s’est atténuée mais elle reste importante (de -13,8% à -12,7%) et l’inflation sous-jacente a sensiblement ralenti (4,5% à 4,2%). La phase d’atterrissage vers la cible des 2% se heurtera toutefois à une croissance des salaires de base soutenue et en légère progression en mars à 6,2% (contre 5,9% en février). Par ailleurs, les tensions sur le marché immobilier s’amplifient. L’indice des loyers effectifs (actual rent) a franchi un nouveau cap en mars, avec une progression en glissement annuel supérieure à 7%, une première en trente ans. L’indice des loyers équivalent des propriétaires (owner-equivalent rent) suit une trajectoire similaire, tout en affichant néanmoins une progression inférieure (6,3% a/a). Cela explique l’augmentation importante de la part des composantes de l’IPC affichant une hausse supérieure à 6% (graphique de généralisation de l’inflation en page 13).

Au Japon, l’inflation sous-jacente (hors « alimentaire périssable » et « énergie ») est repassée sous la barre des 3% en mars pour la première fois depuis novembre 2022. À 2,0%, l’inflation dans les services est restée stable mais le 3m/3m annualisé est retombé à 0%, soit le chiffre le plus bas en deux ans. Cela dit, le point mort d’inflation (page 25) est reparti à la hausse, après un repli en fin d’année dernière. Malgré une poussée notable des salaires (page 27), la demande intérieure reste très fragile et contribue à limiter la dynamique d’inflation. Selon les résultats préliminaires, le PIB japonais s’est en effet replié de 0,5% t/t au T1, tirée vers le bas par la consommation des ménages (-0,7% t/t).

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Graphique du mois : États-Unis - zone euro : harmonisation de l'inflation

INFLATION HARMONISÉE AUX ÉTATS-UNIS ET EN ZONE EURO

Selon les mesures les plus connues, l’inflation américaine dépasse d’1 point de pourcentage celle de la zone euro. Elle se situe à 3,4% en glissement annuel en avril 2024 selon l’indice des prix à la consommation (IPC) publié par le BLS tandis que l’inflation de la zone euro s’établit à 2,4% selon l’indice harmonisé des prix à la consommation (IPCH) publié par Eurostat pour la zone euro (estimation finale inchangée par rapport à la préliminaire publiée fin avril). Outre un chiffre inférieur, la tendance de l’inflation est plus favorable dans la zone euro car elle demeure orientée à la baisse, même si le mouvement a ralenti ces derniers mois, tandis que l’inflation américaine est plus ou moins stable depuis octobre 2023, oscillant autour de 3,3% en moyenne. À noter que derrière le reflux important de l’inflation de la zone euro depuis 1 an (près de 5 points en moins), c’est l’inflation alimentaire qui a le plus baissé (de 13 points, contribuant à hauteur de 2,2 points à la désinflation générale). La baisse de l’inflation des produits manufacturés contribue à hauteur de 1,4 point à cette désinflation, celle dans les services à hauteur de 0,6 point et celle de l’inflation énergétique pour 0,4 point.

La situation sur le front de l’inflation apparaît plus problématique pour les États-Unis si l’on s’en tient à la mesure traditionnelle du BLS. Or, ce n’est pas la mesure privilégiée par la Réserve fédérale américaine qui lui préfère l’indice des prix des dépenses de consommation (PCE) publié par le BEA. Sans rentrer dans le détail des différences méthodologiques et des raisons justifiant cet écart, d’après cet indicateur, l’inflation américaine est un peu mieux orientée et sensiblement plus basse (2,7% a/a en mars, dernier point disponible). On gardera aussi à l’esprit que l’écart observé actuellement entre les deux mesures (environ 1 point de pourcentage) est plus important que l’écart moyen (un demi-point depuis 1987).

Par ailleurs, le BLS publie également un IPCH comparable à celui de la zone euro[1] : c’est l’objet de notre graphique du mois. Selon les derniers chiffres disponibles (mars 2024), l’inflation américaine et celle de la zone euro étaient identiques, à 2,4% a/a. Si, des deux côtés de l’Atlantique la désinflation est devenue plus asymptotique, l’inflation n’est, semble-t-il, plus très loin de sa cible de 2%.


[1] Lien vers la méthodologie : R-HICP Homepage : U.S. Bureau of Labor Statistics (bls.gov).

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