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Eco Emerging // 3 trimestre 2021
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Enfin, l’autorisation a été donnée à un grand nombre de salariés de
puiser dans leur épargne retraite, à trois reprises depuis le mois de
juillet 2020 (en juillet et décembre 2020, puis en avril 2021). D’après
les estimations du FMI, en avril 2021, les retraits représentaient un
montant équivalant à 15% du PIB, compensant en partie les pertes de
revenus liées à la pandémie.
Par ailleurs, depuis mai 2020, le Chili bénéficie d’une facilité de
financement auprès du FMI (ligne de crédit flexible) d’un montant
de USD 24 mds (soit environ 2/3 du montant des réserves de change
au moment de l’obtention de la ligne de crédit), pour une durée de
deux ans. Destinée à rassurer les investisseurs financiers et prévenir
les crises, cette facilité est réservée aux pays dont les fondamentaux
économiques sont estimés « très solides » par le FMI. Seuls le Chili,
la Colombie, le Mexique, le Pérou et la Pologne en bénéficient pour
l’instant. Le FMI a renouvelé son soutien en mai 2021, estimant les
fondamentaux économiques du pays toujours solides (vulnérabilité
externe modérée, et dégradation des finances publiques induite par les
plans de soutien à l’économie soutenable à court terme).
RÉSERVES EN DEVISES ET TAUX DE CHANGE
CLP/USD
Réserves de changes (USD mds, é.d.)
9
8
7
6
00
00
00
00
42
41
40
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38
37
36
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500
4
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00
3
200
100
0
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
La banque centrale s’est également engagée en janvier 2021 à
augmenter graduellement le niveau des réserves de change de
USD 12 mds sur 15 mois. En mai 2021, leur montant atteignait près
de USD 48 mds.
GRAPHIQUE 2
SOURCE : BANQUE CENTRALE
Par ailleurs, les réformes qui ont permis aux salariés de puiser
dans leur épargne retraite ont été perçues négativement par les
LE CLIMAT POLITIQUE RESTE TENDU
Contrairement à la situation économique, la situation politique et investisseurs, d’une part, parce qu’elles vont à l’encontre des pratiques
sociale s’est détériorée. En particulier, la crise politique en cours depuis usuelles du pays, et, d’autre part, parce que ces retraits auront une
octobre 2019 n’est pas terminée.
incidence sur l’équilibre des régimes de retraite à moyen-long terme.
En effet, les retraits ont certes en partie compensé la perte de revenu
en 2020, mais ils ont aussi diminué les taux de remplacement pour
de nombreux salariés (c’est à dire le pourcentage du revenu d’activité
perçu par un salarié lorsqu’il fait valoir ses droits à la retraite). D’après
les estimations du FMI, environ 25% des cotisants avaient mobilisé la
totalité de leur épargne retraite après les deux premières vagues de
retraits.
La mécontentement populaire - face à la montée des inégalités, à
l’accès à l’éducation et aux soins et à la réforme du système de retraites
-
a donné lieu à des manifestations spontanées à l’automne 2019. En
réponse, le gouvernement a proposé plusieurs vagues de réformes et
un nouveau pacte social avec l’adoption d’une nouvelle constitution.
La consultation publique tenue en octobre 2020 a permis à une large
majorité de Chiliens de confirmer qu’ils souhaitaient abandonner
l’actuelle constitution (datant de 1980 alors qu’Augusto Pinochet
était au pouvoir). Le nouveau texte doit être rédigé par une assemblée
constituante entièrement composée de citoyens nouvellement élus (et
non de membres de l’actuel Congrès).
L’assemblée constituante, élue en mai 2021, est très divisée : aucun
parti ne dispose seul du nombre de voix nécessaire pour imposer des
amendements, ce qui suppose de nombreuses coalitions et discussions
durant le processus de rédaction (prévu pour durer jusqu’à la fin de
l’année 2022) de la nouvelle constitution.
Au total, une plus forte instabilité politique et la perspective d’une
détérioration des finances publiques pourraient peser sur les
perspectives d’investissement et de croissance à moyen terme. Par
ailleurs, le Chili souffre de faiblesses structurelles (dépendance aux
matières premières, baisse de productivité dans le secteur minier). En
avril 2021, le FMI a baissé sa prévision de croissance à cinq ans à 2,5%,
alors que celle-ci était à 3,2% en octobre 2019.
Achevé de rédiger le 5 juillet 2021
En outre, les partis indépendants, de gauche et d’extrême gauche ont
remporté plus de sièges qu’attendu, au détriment des partis proches
du gouvernement (centre-droit et droite). Cela reflète une fois encore
l’aspiration populaire à de profondes réformes sociales, et le rejet du
parti gouvernemental aussi bien que le manque de confiance dans la
classe politique établie. Enfin, à ces discussions se mêlent les débats
relatifs aux élections qui doivent se tenir en novembre prochain
Hélène DROUOT
helene.drouot@bnpparibas.com
(
élection présidentielle, parlementaire et régionale ; deuxième tour de
l’élection présidentielle en décembre).
Le climat politique tendu et les discussions relatives au contenu de
la nouvelle constitution (notamment en termes de droits sociaux,
éducation, santé, retraite…) auront un effet sur les finances publiques
du pays, ce qui pourrait inquiéter les investisseurs nationaux et
étrangers.
La banque
d’un monde
qui change