Les révisions négatives des chiffres du PIB ont assombri le climat économique belge. Nous prévoyons une croissance stable au second semestre 2023, sous l’effet du resserrement monétaire. Une volatilité à court terme des chiffres de l’inflation est probable, ce qui pourrait entraîner un épisode temporaire de déflation vers la fin de l’année. Le marché du travail demeure en bonne santé, ce qui présage un atterrissage en douceur de l’économie. Un cycle d’émission d’obligations d’État réussi pourrait inciter le gouvernement d’Alexander De Croo à engager des dépenses de dernière minute avant les élections, mais les perspectives à long terme des finances publiques restent sombres.
L’économie belge est sur une trajectoire descendante depuis le début de l’année, la croissance trimestrielle ayant ralenti de 0,4 % t/t au T1 à 0,2 % t/t au T2. Cette situation a été encore renforcée par les révisions à la baisse des prévisions de la banque centrale (BNB), alors que les effets de la politique monétaire commencent à se faire sentir. Bien que notre estimation nowcast de la croissance au T3 s’établisse à +0,1 % t/t, nous nous attendons à ce que le PIB reste stable au second semestre 2023. Nous estimons peu probable l’apparition d’une récession. En outre, la situation devrait se normaliser progressivement en 2024.
L’inflation sous-jacente reste élevée
L’inflation, mesurée par l’IPCH, a atteint 2,4 % en glissement annuel en août, interrompant la baisse amorcée à la fin de l’année dernière. L’IPCH atteint son niveau le plus élevé de l’année, mais son niveau reste inférieur de près de 3 % au pic d’octobre 2022. L’inflation sous-jacente a diminué au cours de l’été mais elle demeure élevée (6,1 %). Les prix des denrées alimentaires continuent d’augmenter, tendance constatée au cours de la majeure partie des deux dernières années, avec une augmentation mensuelle moyenne de 1,0 %. Les prix de l’énergie, proches de leur niveau le plus bas depuis 12 mois, continuent de tirer l’inflation globale vers le bas.
Compte tenu des mesures d’aide aux ménages liées aux factures d’énergie, la Belgique pourrait connaître une brève déflation à la fin de cette année, suivie d’un rebond temporaire de l’inflation totale. D’ici à la fin de 2024, l’inflation devrait être proche mais supérieure à 3,0 %.
Un marché du travail stable
Malgré le ralentissement économique général, le taux de chômage n’a pratiquement pas bougé. Il s’élevait à 5,7 % selon les derniers chiffres, soit son niveau de début 2019. Les créations d’emplois semblent avoir ralenti au début de l’année, passant de +30 000 à leur pic à +15 000, revenant ainsi sur leur rythme tendanciel. Le taux de postes vacants reste élevé, mais diminue quelque peu, comme dans les pays voisins de la Belgique. L’indice Federgon résume le mieux la situation. Cet indice, qui mesure la demande de main-d’œuvre temporaire, a connu une forte baisse au début de la pandémie avant de repartir à la hausse rapidement. Toutefois, le travail temporaire était déjà sur une tendance baissière depuis 2019. L’état actuel du marché du travail s’apparente donc à un ralentissement cyclique classique.
Plus important, l’économie belge semble, jusqu’à présent, effectuer un atterrissage en douceur. Après avoir été ébranlée par le double choc de la pandémie de Covid-19 et de la crise énergétique, la confiance des consommateurs a retrouvé une situation proche de sa moyenne à long terme. Les ménages se montrent modérément positifs quant à leur situation financière, probablement du fait de l’indexation des salaires sur l’inflation et du ralentissement de celle-ci.
Parallèlement, le marché de l’immobilier devrait continuer de ralentir, les nouvelles demandes de prêts ayant chuté d’environ un tiers par rapport à 2022. Néanmoins, les prix n’ont pas beaucoup baissé, ils ont même légèrement augmenté selon les derniers chiffres de la BRI, la BNB indiquant qu’il pourrait s’agir d’une conséquence temporaire d’effets de composition.
Le climat des affaires s’est stabilisé après quatre mois consécutifs de baisse, selon le dernier baromètre de confiance de la BNB, mais il varie selon les secteurs. Dans le commerce, les entreprises notent une amélioration des perspectives tant du côté de la demande que de l’offre. Les constructeurs sont, en revanche, confrontés à une baisse de la demande, sans doute due à la hausse des taux d’intérêt. Au niveau agrégé, les faillites sont encore inférieures de 10 % aux niveaux antérieurs à la pandémie (moyenne mobile sur 12 mois). Dans certains secteurs, tels que l’industrie manufacturière, la construction, le transport et l’entreposage, les faillites sont toutefois nombreuses.
Après plusieurs émissions obligataires réussies, l’appétit des investisseurs place le gouvernement d’Alexander De Croo dans une position confortable, les besoins de financement pour cette année ayant été largement couverts. La situation des finances publiques belges reste toutefois difficile. Le déficit budgétaire (près de 4 % du PIB en 2022) devrait encore se creuser, même si la part des mesures temporaires liées à la pandémie et à la crise énergétique dans le budget total est moins importante. Dans le contexte actuel de taux élevés, l’effet boule de neige refait surface. Selon des hypothèses prudentes, le taux d’endettement (déjà important puisqu’il s’élève à 105 %) devrait augmenter de plus d’un point de pourcentage par an.
Achevé de rédiger le 26 septembre 2023