Le PIB belge a dépassé de 2% son niveau d’avant la pandémie juste avant l’été. La consommation privée a accéléré en avril, mai et juin. En revanche, la formation brute de capital fixe s'est tassée du premier au deuxième trimestre 2022. Enfin, la balance commerciale a peu contribué à la croissance, les volumes d’importation et d’exportation ayant affiché des taux de croissance négatifs proches.
Les pressions haussières sur les prix et l’incertitude géopolitique continueront à peser sur les perspectives économiques, tandis que le soutien budgétaire compensera quelque peu le resserrement monétaire.
Nous prévoyons une entrée en récession d'ici la fin de l'année, car la demande intérieure devrait ralentir davantage. Une normalisation des marchés de l’énergie ouvre la voie à une normalisation de la croissance d’ici le second semestre 2023. La croissance du PIB sur l’ensemble de 2022 atteindrait 2,4%, principalement en raison de la forte croissance enregistrée en 2021 et de l’effet d’acquis qui en résulte. Pour 2023, nous prévoyons une croissance de 0,4% seulement.
Une inflation à deux chiffres
L’inflation en glissement annuel, mesurée par l’IPCH, métrique préférée de la BCE, a franchi la barre des 10% en juin. Elle devrait rester à deux chiffres durant le reste de l'année. L’impact des prix de l’énergie semble avoir culminé cet été, mais l’inflation sous-jacente et la hausse de la composante alimentaire accélèrent désormais. En effet, les prix moyens des aliments et des boissons non alcoolisées ont augmenté de plus de 1% par mois depuis le début de l’année.
L’indexation des salaires est une caractéristique de l’économie belge : les salaires et les transferts de revenus dans l'ensemble de l'économie sont liés à l'indice de santé et augmentent automatiquement pour s'aligner sur cet indice. Ainsi, les salaires pourraient mettre un certain temps à rattraper l'inflation galopante actuelle.
Le pouvoir d'achat moyen se stabiliserait cette année et augmenterait de 0,7% en 2023, selon les calculs du Bureau fédéral du Plan. Toutefois, cette moyenne cache des situations individuelles très diverses. Pour les plus démunis qui ne bénéficient pas pleinement du soutien social, l’inflation pourrait atteindre jusqu’à 2 points de plus que pour la moyenne de la population.
Le taux de chômage s’est établi à 5,3% juste avant l’été, à peine au-dessus de son plancher d’avant la pandémie (5,1%). La confiance des consommateurs a poursuivi son redressement inégal depuis la chute record enregistrée au début de l’invasion russe.
La consommation de biens non durables a été élevée avant l’été, ce qui a compensé la baisse des achats de biens durables. Les chiffres récents laissent toutefois présager une détérioration des ventes au détail. L'appétit pour les achats importants diminue également, car la hausse des taux hypothécaires pèse sur la capacité de remboursement des ménages. Depuis le début de l’année, le nombre de permis de construire dans l’immobilier résidentiel a ainsi diminué de 3,4% au cours des cinq premiers mois par rapport à 2021.
Les entreprises souffrent dans presque tous les secteurs. Le secteur manufacturier, en particulier, est gagné par le pessimisme. La réduction des carnets de commandes s’ajoute aux difficultés persistantes d’approvisionnement en matières premières et de recrutement. Jusqu’à présent, on n'observe toutefois pas d’augmentation significative du nombre de faillites. En fait, sur une base hebdomadaire, on en dénombre moins qu’avant le début de la pandémie. Au cours de l’été, on a constaté une légère hausse du nombre de faillites d'entreprises de la construction, mais la vague très attendue de fermetures ne s'est pas concrétisée.
L’investissement des entreprises reste en revanche décevant. Le rebond du premier trimestre a été de courte durée et a été suivi d’une nouvelle baisse marquée, qui laisse l’investissement des entreprises 4% sous son niveau d’avant-Covid. Il reste à voir dans quelle mesure les entreprises vont suspendre, voire annuler, les investissements prévus en raison de la détérioration de l'environnement économique.
Finances publiques
Les dépenses induites par la Covid-19 ont creusé le déficit budgétaire persistant du gouvernement. La crise énergétique a encore aggravé la situation, le gouvernement fédéral ayant déjà dépensé près de 1% du PIB pour soutenir les ménages et les entreprises à mesure que les prix du gaz et de l’électricité grimpaient. Un rapport récent du Bureau fédéral du Plan dresse un tableau noir : le déficit devrait osciller autour de 5%, du moins dans un avenir prévisible. Par conséquent, la dette publique pourrait dépasser 110% du PIB d’ici fin 2025. Comme le cycle des taux d'emprunt toujours plus bas est désormais rompu par une BCE énergique, le gouvernement De Croo doit relever les défis qui se présentent à lui.