La courte récession néerlandaise semble avoir pris fin, grâce au dynamisme de la consommation privée et publique. L’inflation continue de ralentir, même si elle reste plus forte que prévu dans certains secteurs. Le nouveau gouvernement n’a pas encore été formé, mais un large consensus estime qu’une fois qu’il le sera, les dépenses publiques augmenteront, ce qui donnera un coup de fouet à l’économie. Celle-ci devrait donc suivre une trajectoire différente, plus positive, de celle de ses voisins.
L’économie néerlandaise a progressé au quatrième trimestre 2023, mettant fin à la légère récession qui a frappé le pays en 2023 et entraîné une baisse cumulée du PIB de 1,1 % entre le 1er et le 3e trimestre 2023. Au 4e trimestre, le PIB a augmenté de 0,4% t/t portant ainsi la croissance pour l’ensemble de l’année tout juste au-dessus de zéro, à +0,1%, l’une des plus mauvaises performances de la zone euro. La croissance a été soutenue par les dépenses des ménages, ainsi que par celles des collectivités. L’investissement, quant à lui a pâti de la persistance d’un climat des affaires négatif, et qui s’est même détérioré.
Au total, l’investissement a reculé de 2,1 % t/t au 4e trimestre. Le niveau élevé des taux d’intérêt et le contexte géopolitique morose ont vraisemblablement pesé, donnant peu de visibilité aux entreprises. Dans un contexte, où les stocks continuent d’être majoritairement qualifiés de « trop élevés », le déstockage est resté le mot d’ordre des derniers mois de l’année. Les stocks de gaz ont également été réduits.
En 2024, nous prévoyons une poursuite de la baisse de l’investissement, toujours pénalisé par la hausse des coûts de financement. En revanche, la consommation des ménages devrait continuer de soutenir la croissance, essentiellement grâce aux gains supplémentaires attendus de pouvoir d’achat (hausse des salaires plus rapide que l’inflation, en baisse). En outre, le marché du travail devrait rester tendu, malgré la légère augmentation anticipée du taux de chômage. Les ménages néerlandais, connus pour vivre à crédit, semblent avoir modéré cette mauvaise habitude au fil du temps. Exprimé en pourcentage du PIB, le taux d’endettement des ménages est passé de 120% en 2010 à moins de 90% à la fin de l’année dernière. Par rapport aux pays voisins, ce ratio reste toutefois assez élevé (moins de 60% en Belgique), mais sa diminution au fil du temps est une bonne nouvelle pour la stabilité économique. Pour 2024, la Commission européenne prévoit une croissance modeste du PIB néerlandais, de 0,4%, avant une reprise plus nette en 2025, où la croissance atteindrait 1,6% (prévisions d’hiver).
L’inflation est à la baisse
L’inflation néerlandaise a fortement diminué par rapport à son niveau record de plus de 17% a/a en septembre 2022, pour atteindre 2,6% a/a en février 2024 (mesure IPCH). L’inflation sous-jacente reste légèrement supérieure à ce niveau, à 3%. Comme c’est le cas dans de nombreux pays, l’inflation reste plus persistante que prévu dans les services, ainsi que dans l’alimentaire. C’est pourquoi les baisses de taux attendues de la BCE ont été quelque peu retardées au fil des semaines en 2024. Il faudra probablement faire preuve de patience, même s’il ne fait aucun doute que les taux d’intérêt baisseront cette année. Pour l’ensemble de l’année 2024, la Commission européenne s’attend à ce que l’inflation néerlandaise soit d’environ 2,6%, et de 2% l’année suivante.
Remontée des prix de l’immobilier
Le secteur néerlandais du logement a été particulièrement touché par le resserrement de la politique monétaire. En mai 2023, les prix enregistraient une chute de 5,8% en glissement annuel. Toutefois, ils connaissent déjà une reprise, les taux d’intérêt ayant probablement atteint leur pic et les taux d’emprunt ayant même déjà entamé leur décrue. En février 2024, les prix de l’immobilier résidentiel étaient en hausse de plus de 4% a/a. Les principales causes de cette remontée des prix sont les fortes augmentations des salaires et l’offre limitée. Cette reprise rapide du marché du logement est certainement un autre argument pour expliquer la nette amélioration de la confiance des ménages.
Le nouveau gouvernement n’a pas encore été constitué, mais les choses bougent
Lorsque Geert Wilders a obtenu le plus grand nombre de voix lors des élections de l’année dernière, sa victoire a été perçue comme une illustration claire de la manière dont l’extrême droite pouvait s’emparer du pouvoir en Europe. Mais quatre mois plus tard, il en reste exclu, les partis traditionnels des Pays-Bas serrant les rangs pour obliger son Parti de la liberté à renoncer au poste de Premier ministre en échange de la mise en place d’un gouvernement de coalition. À quelques mois des élections européennes du 9 juin, la situation néerlandaise met en avant l’une des caractéristiques d’un des systèmes démocratiques les plus fragmentés d’Europe : gagner une élection ne signifie pas obtenir le pouvoir.
À plus long terme, une fois le gouvernement néerlandais formé, un large consensus estime que les dépenses publiques augmenteront, ce qui donnera plus de pouvoir d’achat aux ménages et soutiendra également davantage l’économie grâce à des investissements publics plus importants. En conséquence, le solde budgétaire devrait passer plus nettement dans le rouge, à hauteur de -2% du PIB cette année et l’année suivante, comparativement à un léger déficit de -0,6% en 2023. Le faible niveau de la dette publique (moins de 50% du PIB en 2023) est toutefois une caractéristique importante, qui permet d’augmenter les dépenses sans problème, au contraire d’autres pays européens.
Achevé de rédiger le 27 mars 2024