ÉTATS-UNIS
L’économie américaine a poursuivi sa croissance au T4, bien que sur un rythme un peu plus modéré qu’au T3, notamment soutenue par la consommation des ménages et la croissance des stocks, deux déterminants fragiles, suggérant que le ralentissement devrait se poursuivre. Le marché du travail reste sous tension, avec des créations d’emplois qui restent élevées, un taux de chômage bas et une croissance des salaires dynamique. L’inflation semble avoir atteint son pic mi-2022, mais sa décrue est lente et elle devrait rester nettement supérieure à la cible de 2% à l’horizon de la fin 2023. De ce point de vue, la Réserve fédérale n’en a probablement pas encore tout à fait terminé avec la remontée de ses taux directeurs. Le resserrement monétaire engagé devrait entraîner l’économie américaine en récession au second semestre 2023 et limiter la reprise attendue en 2024.
CHINE
Après une année de croissance lente et déséquilibrée en 2022, l’activité économique devrait se renforcer en 2023. L’abandon de la politique zéro Covid a entraîné un rebond de la demande privée et du secteur des services depuis fin janvier, et la consommation des ménages continuera de bénéficier d’effets de rattrapage importants à court terme. Cependant, alors que les perspectives d’exportation et de production industrielle sont assombries par l’affaiblissement de la demande mondiale, des freins continueront de peser sur l’activité tirée par le marché intérieur. De fait, le redressement du marché du travail reste incertain, l’amélioration dans les secteurs immobilier et de la construction sera probablement limitée, et la fragilité des finances des collectivités locales devrait contraindre l’investissement public. Les autorités prévoient un soutien modéré à la croissance des politiques budgétaire et monétaire. L’inflation des prix à la consommation, qui s’est établie à 2% en moyenne en 2022, ne devrait accélérer que légèrement cette année.
ZONE EURO
La croissance économique en zone euro a été nulle au T4 2022, mais meilleure qu’attendu sur l’ensemble de 2022, à 3,5%. Elle a continué de surprendre favorablement sur les premiers mois de 2023 au regard de l’amélioration des données d’enquêtes (climat des affaires et, dans une moindre mesure, confiance des consommateurs). Mais la conjonction du choc inflationniste, de la crise énergétique et du resserrement monétaire à marche forcée et la montée en puissance de leurs effets négatifs fragiliseront l‘activité en 2023. La croissance du PIB réel serait faiblement positive en 2023 et 2024, respectivement à 0,7% et 0,5%. Bien qu’attendue en reflux tout au long de 2023, l’inflation restera élevée, nettement supérieure à l’objectif de 2% en fin d’année et encore légèrement supérieure fin 2024, obligeant la politique monétaire à rester en territoire restrictif.
FRANCE
La croissance du PIB s’est modérée au 2e semestre 2022 (+0,2% au T3 et +0,1% au T4 t/t) après +0,5% t/t au 2e trimestre. Elle est restée soutenue par l’investissement des entreprises et par leur comportement de restockage. A contrario, la consommation et l’investissement des ménages se sont tous deux nettement contractés au T4 (-1,2% et -0,9% t/t respectivement). L’accroissement en février 2023 de l’inflation vers un nouveau pic (7,2% a/a en indice harmonisé) et la remontée des taux d’intérêt devraient continuer de peser sur la demande des ménages en 2023, et donc sur la croissance, attendue à 0,5% en 2023, après 2,6% en 2022.
TAUX ET CHANGES
Aux États-Unis, la Réserve fédérale devrait poursuivre sa politique de resserrement monétaire mais le point d’arrivée du taux des fonds fédéraux semble s’être rapproché compte tenu du durcissement engagé des conditions monétaires et financières et d’accès au crédit. Nos prévisions le situent désormais plus tôt et 50 points de base plus bas, à 5,25% (limite supérieure de la fourchette cible) en mai 2023. Compte tenu de la baisse lente attendue de l’inflation, et malgré l’entrée en récession de l’économie américaine, ce niveau devrait être maintenu tout au long de 2023 et n’être suivi de baisses de taux qu’en 2024. Si un potentiel à la hausse des taux longs subsiste à court terme au regard du biais de la Fed, même un peu moins affirmé, à poursuivre son cycle, les rendements devraient ensuite baisser avec pour toile de fond un recul progressif de l’inflation et une perspective de desserrement du taux officiel en 2024.
Le Conseil des gouverneurs de la BCE devrait également poursuivre le relèvement de ses taux directeurs lors de ses deux prochaines réunions, en mai et juin. La même incertitude que pour la Fed pèse toutefois sur le taux final, c’est-à-dire le pic cyclique. Nos prévisions mises à jour le 21 mars le situent à 3,50% en juin pour le taux de dépôt (contre 4% en juillet, précédemment). À court terme, les rendements des obligations d’État pourraient repartir à la hausse en cas de poursuite du resserrement monétaire. Mais par la suite, les taux devraient baisser, dans le sillage de la baisse graduelle attendue de l’inflation. Le repli des rendements aux États-Unis devrait également jouer un rôle dans la baisse des rendements de la zone euro.
La Banque du Japon (BoJ) a rehaussé à 0,5% la limite supérieure de sa cible pour le rendement des obligations souveraines à 10 ans. De nouveaux ajustements de sa politique de contrôle de la courbe des taux ne peuvent être exclus. Néanmoins, nous ne nous attendons pas à ce que la BoJ procède à une hausse de ses taux directeurs.
Nous anticipons un léger repli du dollar face à l’euro. Le billet vert est surévalué, les positions sont très longues sur le marché et le différentiel de taux d’intérêt à long terme devrait se resserrer. Le yen devrait se maintenir autour des niveaux actuels à court terme avant de se renforcer face au dollar US puisque les fonds fédéraux devraient avoir atteint leur taux final.