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Derrière les watts, un grand contraste

01/02/2023

La guerre en Ukraine n’a pas eu partout les mêmes conséquences, loin s’en faut. Avec le conflit à ses portes, l’Union européenne (UE) a dû s’affranchir dans l’urgence et au prix fort de sa dépendance aux combustibles russes. À 800 milliards d’euros en 2022, sa facture énergétique importée a plus que doublé[1]. Les États-Unis, de leur côté, ont tiré un bénéfice record de leurs échanges d’hydrocarbures, en se positionnant comme le tout premier fournisseur de gaz naturel liquéfié (GNL) du Vieux Continent. Les prix de l’électricité ont fait le grand écart. En 2022, le mégawattheure s’est négocié en Europe au triple du tarif pratiqué outre-Atlantique, soit à 256 euros en moyenne[2]. La référence historique (50 euros environ entre 2000 et 2019) est, quant à elle, largement dépassée.

Le coup porté à la compétitivité des Vingt-Sept apparaît d’autant plus sévère que Washington a fait voter, en août dernier, l’Inflation Reduction Act, une loi à caractère protectionniste visant à subventionner la filière nord-américaine des batteries et véhicules électriques.

À l’heure où la transition énergétique accélère, l’UE part donc avec un handicap, mais elle loin d’avoir épuisé tous ses atouts. D’abord parce que ses infrastructures de transports ou d’énergie ne souffrent pas de la même obsolescence qu’aux États-Unis, tandis qu’elles émettent moins de CO2, ce qui dans une optique d’électrification du parc automobile constitue un avantage « hors coût » (graphique). Ensuite parce que les investissements du « pacte vert » (au moins un tiers des EUR 1 800 milliards du plan de relance NextGeneration EU) ne sont pas insignifiants et contribuent à attirer les capitaux étrangers, y compris américains (Financial Times, 2023[3]). Enfin parce que la baisse du prix des énergies renouvelables couplée à la mise en place d’un mécanisme d’ajustement carbone au frontières (MACF) peuvent, à terme, rééquilibrer en faveur de l’UE le jeu de la concurrence.

Intensité carbone de l'électricité


[1] De janvier à novembre 2022, les importations extra-UE d’énergie se cumulent à EUR 766 milliards, soit en données annualisées EUR 836 milliards (766 x 12/11) ; en 2021, elles étaient de EUR 390 milliards. Source : Eurostat.

[2] En 2022, le mégawatheure d’électricité s’est échangé au prix moyen de EUR 256 sur l’Amsterdam Power Exchange (principale plateforme européenne de négoce) contre EUR 73 sur le Pennsylvania-New Jersey-Maryland Interconnexion (PJM, principale plateforme nord-américaine de négoce). Source : Refinitiv.

[3] Financial Times, 2023, US fund managers turn away from China and look to Europe for growth, January 23.

LES ÉCONOMISTES EXPERTS AYANT PARTICIPÉ À CET ARTICLE