LE CREUSEMENT DU DÉFICIT STRUCTUREL SE POURSUIT  La politique budgétaire restera très expansionniste en 2021. Le ministère des Finances espagnol prévoit ainsi un déficit public pour cette année de 7,7% du PIB1 , ce qui constituerait un niveau historiquement très élevé, bien qu’en baisse par rapport à 2020. Étant donné l’incertitude sur l’évolution de l’épidémie, et donc sur les restrictions d’activité, ces chiffres pourraient être révisés au cours des prochains mois.   2  3 . En part du PIB, les postes de dépenses qui devraient le plus augmenter d’ici à la fin 2022 sont les transferts sociaux, les compensations salariales et les consommations intermédiaires.
1ER OBSTACLE : UN BOND DES DÉPENSES DE « SOLIDARITÉ » POST-COVID ? DÉPENSES PUBLIQUES: UN AVANT ET APRÈS COVID? Même si les dispositifs d’aide au maintien de l’emploi (programme ERTE de chômage partiel, durcissement des conditions de faillites d’entreprises, etc.) ont indéniablement contenu le choc économique sur le marché du travail, le chômage en Espagne a d’ores et déjà bondi de près de 725 000 (+22%) au cours de l’année 2020.4  Compte tenu de la nature de la crise actuelle (exogène), une grande partie de ces nouveaux chômeurs pourraient retrouver un emploi une fois l’épidémie endiguée et les restrictions d’activité levées. Néanmoins, la crise actuelle laissera des traces sur le marché du travail : selon les dernières prévisions de la Banque d’Espagne, le taux de chômage ne retrouverait son niveau d’avant-crise pas avant la fin 2023.5  6  Au total, ces nouvelles sources de revenus rapporteraient, selon le gouvernement, 6,1 mds d’euros supplémentaires en 2021, une somme qui ne comble que très partiellement l’écart entre les recettes et les dépenses structurelles primaires de l’État, qui se situait autour de 42 mds d’euros en 2020 (Commission européenne).7  
2E OBSTACLE : LES DÉPENSES DE RETRAITE CONTINUENT LEUR PROGRESSION Le deuxième axe de dépense majeur est le financement des retraites, dont le coût continuera de croître progressivement dans les années à venir en raison du vieillissement de la population. En part du PIB, les dépenses de retraite augmenteront de 0,4 point de PIB d’ici à 2030 pour atteindre 9,4% du PIB.8  9  À terme, l’Espagne posséderait ainsi le ratio le plus élevé en Europe et le second parmi les pays de l’OCDE, derrière le Japon. Il est important cependant de noter que l’âge légal de départ à la retraite augmente progressivement en Espagne depuis 2013, ce qui limitera quelque peu le déséquilibre entre cotisants et bénéficiaires : de 65 ans en 2013, l’âge légal est passé à 66 ans en 2021, et il atteindra 67 ans d’ici à 2027. 10 
3E OBSTACLE : UN POTENTIEL DE CROISSANCE TROP FAIBLE POUR ABAISSER DURABLEMENT LE RATIO DE DÉFICIT PUBLIC SUR PIB PIB POTENTIEL : ESPAGNE ET ZONE EURO  ESPAGNE : DETTE PUBLIQUE CONSOLIDÉE (% DU PIB) Cette hausse attendue des dépenses publiques se déroule dans un contexte de croissance économique « sous-jacente » peu dynamique. La croissance potentielle du pays, déjà mise à mal par les crises successives de 2008 et 2011, pourrait être encore une fois freinée par le choc économique du coronavirus. La contraction du PIB a, en effet, été sans précédent en 2020 (certainement supérieure à 11%). Une étude récente de la Banque centrale européenne souligne notamment l’impact négatif de la Covid-19 sur la contribution du facteur travail à la croissance à long terme.11  Cela s’explique principalement par la chute du nombre d’heures travaillées qui, elle-même, résulte du placement de nombreux travailleurs en chômage partiel. Selon les estimations de la Commission européenne, entre 2019 et 2022, le PIB potentiel de l’Espagne serait en hausse de 1,4%, l’un des rythmes de croissance les plus faibles au sein de la zone euro, et il serait inférieur à l’augmentation des dépenses publiques structurelles. La trajectoire du PIB potentiel espagnol resterait donc bien en deçà de celle du PIB de la zone euro dans son ensemble (cf. graphique 3). 12  Le grand plan de relance national de 140 mds d’euros stimulera l’investissement et la croissance potentielle dans les prochaines années, sans conséquences majeures sur les finances publiques espagnoles puisque la quasi-totalité de ce programme sera financée par les sommes perçues du fonds de relance européen. Néanmoins, avec une croissance potentielle toujours fragile, les marges de manœuvre pour abaisser sensiblement le ratio de déficit sur PIB sur le moyen et long terme restent minces.  .13  Néanmoins, des inquiétudes à long terme pourraient refaire surface, une fois la crise sanitaire passée et la relance économique durablement enclenchée. La Commission européenne, en réponse à la hausse du déficit structurel, a évoqué fin 2020 la possibilité de conditionner une partie des sommes allouées par le fonds de relance européen à la mise en place, entre autres, de mesures permettant de pérenniser l’équilibre du système de sécurité sociale.14 Tôt ou tard, des questions sur les conséquences, en termes de stabilité financière, de l’endettement croissant du secteur public se poseront. D’ici à fin 2022, la dette espagnole pourrait approcher la barre des 125% du PIB, ce qui représenterait une hausse supérieure à 25 points de PIB par rapport au niveau d’avant-Covid (cf. graphique 4).