Le PIB de la Belgique a crû de 1,7 % au deuxième trimestre, et s’établit par conséquent 2 % en deçà de son niveau pré-Covid. Selon nos prévisions, la croissance en année pleine devrait s’inscrire à 5,5 % cette année, puis ralentir à 3,0 % en 2022. L’augmentation des dépenses publiques a permis d’éviter le pire pour le marché du travail et les entreprises belges. Résultat : un redressement rapide des dépenses d’investissement dans tous les secteurs. Dans un contexte d’essoufflement de la croissance du PIB, la consommation privée connaît un rebond plus progressif.
La croissance devrait marquer le pas au S2
En raison de l’épidémie de Covid-19 qui a frappé l’économie, la croissance du PIB belge a été amputée de 6,3 % l’année dernière. Le succès de la campagne de vaccination et l’assouplissement consécutif de la plupart des mesures de distanciation sociale l’ont, depuis, stimulée. Après avoir évolué à un rythme supérieur au potentiel depuis le début de 2021, la croissance devrait, selon nos prévisions, marquer le pas au second semestre de cette année. Nous prévoyons une poursuite de la normalisation en 2022, avec une croissance trimestrielle légèrement supérieure au potentiel.
Perspectives économiques
D’après notre modèle nowcast, le PIB s’est inscrit en hausse de 1,2 % au troisième trimestre par rapport au deuxième. Autrement dit, la croissance a marqué un ralentissement par rapport au taux de 1,7 % enregistré au printemps, qui constituait en soi un plus haut sur la période 1980-2019. Un indicateur de l’activité économique totale, établi à partir des données agrégées sur les transactions bancaires, montre un léger décrochage de la reprise depuis début août.
Les dépenses de consommation, autre indicateur basé sur des données internes, ont finalement retrouvé leurs niveaux (saisonnalisés) de 2019 juste avant l’été. Elles les ont nettement dépassés pendant le mois de juillet, mais se sont repliées dans les semaines qui ont suivi. Cela pourrait signifier que l’effet largement évoqué de la « demande contenue » a déjà eu lieu.
La confiance des consommateurs est revenue à son pic du mois de juillet, les craintes du chômage étant quasi inexistantes. Juste avant l’été, la consommation privée, l’une des composantes du PIB, était toujours inférieure de 6 % aux niveaux pré-Covid. Nous ne prévoyons pas une pleine reprise de la consommation privée d’ici la fin de 2022.
Volée des prix
L’IPCH, un indicateur plus volatil que l’IPC, a fait ressortir une flambée des prix de 4,7 % (g.a.), en août dernier. Cette envolée est principalement le résultat d’un effet technique, la période traditionnelle des soldes ayant eu lieu en août et non au mois de juillet, comme l’année dernière. Quoi qu’il en soit, l’inflation mesurée par l’IPC était également en hausse, s’établissant tout récemment à 2,7 %.
Les prix des logements augmentent sous l’effet d’un fort rebond des transactions. L’introduction, au début de 2020, d’un régime fiscal moins favorable aux propriétaires immobiliers avait provoqué une montée en flèche des transactions quelques mois auparavant et entraîné, de fait, une anticipation des ventes. Au ralentissement consécutif des achats de logements est venue s’ajouter l’adoption de la première série de mesures de distanciation sociale, interdisant, à un moment donné, la visite des biens en vente par les acheteurs potentiels. Depuis, ces mesures ont été assouplies et la demande s’est rapidement redressée, retrouvant les niveaux de la mi-2019.
L’indice des prix de l’immobilier résidentiel, établi par la Banque des règlements internationaux (BRI), a grimpé de 6,7 % au cours des douze derniers mois. Un rythme comparable à celui des pays voisins. D’après la Banque nationale de Belgique (BNB), la surévaluation du marché immobilier belge est de 14 %. D’après les modèles de la BCE, les prix pourraient être supérieurs de 20 % au niveau justifié par les fondamentaux. La persistance des nouveaux comportements récents, comme l’augmentation du télétravail, pourrait jouer un rôle significatif dans l’évolution future du marché.
Difficultés des entreprises à recruter
Stijn Baert (Université de Gant), économiste spécialisé dans le marché du travail, a récemment indiqué que le marché belge avait affiché la plus grande stabilité des 27 pays membres de l’UE depuis le début de la pandémie de Covid-19. Selon son analyse, les taux de chômage et d’inactivité (personnes sans emploi et qui n’en recherchent pas) ont peu évolué entre 2019 et 2020. Le déploiement rapide du dispositif de chômage partiel pourrait y avoir largement contribué.
Toutefois, il semble plus difficile, depuis peu, de recruter du personnel. L’indice des offres d’emplois non pourvus enregistre un net rebond. Dans sa toute dernière publication, il s’approche du pic de 4,5 % atteint en 2018. Les résultats des dernières enquêtes de la BNB révèlent que près de 80 % de l’ensemble des entreprises belges signalent des problèmes de recrutement, le manque de candidats à l’embauche étant le problème le plus criant.
Le nombre de travailleurs indépendants reste orienté à la hausse, ce qui pourrait expliquer en partie la pénurie naissante de candidats à l’embauche. Le taux de croissance sur douze mois de cette catégorie d’actifs a atteint son niveau le plus élevé depuis 1996. En revanche, le nombre de salariés n’a retrouvé ses niveaux pré-Covid qu’à l’approche de l’été.
Finances publiques
Les mesures de soutien à l’économie tout au long de la pandémie ont pesé sur les finances publiques. Le déficit a ainsi atteint 9,4 % du PIB l’année dernière. L’augmentation consécutive de la dette publique brute va exercer des pressions supplémentaires sur un schéma de dépenses déjà difficile à maintenir.
Le FMI a évalué l’impact de la pandémie sur les finances publiques belges. Ses économistes tablent ainsi sur une hausse annuelle du déficit de l’ordre de 2 points de pourcentage, sur toute la durée de l’horizon prévisionnel (2022-2025).
L’Agence de la dette belge, chargée du sourcing des financements extérieurs, est parvenue à la même conclusion. Elle prévoit une augmentation des besoins de financement de EUR 10 à 20 mds en base annuelle, par rapport à ses estimations pré-Covid. Sur une note plus optimiste, le coût du service de la dette reste orienté à la baisse. Les charges d’intérêts de l’État fédéral, qui s’élevaient à 1,75 % du PIB l’année dernière, pourraient atteindre un point bas, en deçà de 1,2 %, au cours des deux prochaines années.
Une fois encore, la baisse des taux d’intérêt sur l’encours de la dette offre au gouvernement belge un contexte favorable pour remédier au déficit budgétaire. Il reste à savoir si la large coalition du gouvernement De Croo saura répondre aux attentes dans ce domaine.