Eco Perspectives

L’une des économies les plus résilientes d’Europe

30/09/2020
PDF

Jusqu’ici, l’économie finlandaise a été l’une des moins affectées en Europe par la crise économique déclenchée par la pandémie de Covid-19. Au deuxième trimestre, le PIB s’est contracté de « seulement » 4,5%. De surcroît, la récession va certainement rester moins forte en Finlande que dans les autres pays d’Europe.

Tout d’abord, le pays a été relativement épargné par la crise sanitaire. Le taux de mortalité est parmi les plus bas d’Europe avec environ cinquante décès par million d’habitants, soit deux fois moins qu’en Allemagne et dix fois moins qu’en Suède ou en France. Cela, associé à un système de santé solide, a permis au gouvernement finlandais de mettre en place des mesures de restriction plus souples que dans la plupart des autres pays d’Europe – à l’exception notable de la Suède – d’après l’Oxford Covid-19 Government Response Tracker.

Par ailleurs, le gouvernement finlandais s’est largement mobilisé pour soutenir l’économie. Il a ainsi mis en place des mesures de soutien direct aux entreprises, augmenté l’assurance chômage et les prestations sociales, ou encore baissé temporairement les cotisations retraite du secteur privé. Le ministère des Finances estime que ces mesures s’élèveront à un total de EUR 6 mds en 2020, soit environ 2,5% du PIB de 2019. De plus, le gouvernement a promis des garanties de prêts pour plus de EUR 10 mds (4,2% du PIB de 2019), des capitalisations et l’assouplissement des modalités de paiement des impôts cette année. Les stabilisateurs automatiques devraient aussi apporter un soutien important aux entreprises et aux ménages en limitant leurs pertes de revenus. Au total, le FMI estime que, combiné à ces stabilisateurs, l’ensemble des mesures (fiscales, de liquidité et réglementaires) du gouvernement pourrait représenter un stimulus équivalant à près de EUR 30 mds.

En ce qui concerne la politique monétaire, la Banque centrale européenne a significativement assoupli sa politique, notamment par l’augmentation massive de ses achats d’actifs ainsi que par l’extension et la baisse des coûts de ses programmes de refinancement pour les instituts de crédit.

Des risques qui pèsent sur l’économie

CROISSANCE ET INFLATION (%)

Si l’économie finlandaise apparaît bien positionnée pour sortir de la crise, elle présente des fragilités qui pourraient retarder, voire annihiler, la reprise.

Tout d’abord, le pays est très dépendant des échanges de biens intermédiaires, ce qui le rend vulnérable aux perturbations des chaînes d’approvisionnement. Cela pourrait constituer un frein important à la reprise si le commerce mondial tardait à rebondir. Dans tous les cas, le ralentissement structurel des échanges depuis la crise financière mondiale devrait se poursuivre, et pourrait avoir des répercussions durables sur cette petite économie ouverte.

De plus, les finances publiques de la Finlande vont sortir de la crise sensiblement affaiblies. Le ministère des Finances anticipe un déficit du gouvernement supérieur à 8% cette année, qui relèverait le ratio de dette publique sur PIB de plus de douze points de pourcentage, à plus de 70%. Il prévoit aussi que le ratio continuera d’augmenter les années suivantes. Néanmoins, la Finlande peut compter sur une dette publique limitée comparée à celle des pays du sud de l’Europe.

Cependant, la fragilisation des finances publiques pourrait devenir un problème de taille à long terme, compte tenu du défi démographique à venir. En 2014, le gouvernement a mis en place des réformes pour relever l’âge de la retraite à 65 ans et l’indexer sur l’espérance de vie à partir de 2027. Néanmoins, cela pourrait ne pas suffire à redresser les finances publiques étant donné le vieillissement rapide de la population. Le ratio de dépendance démographique des personnes âgées – défini comme le ratio entre le nombre de personnes âgées de plus de 65 ans et celui de personnes en âge de travailler –, est de l’ordre de 36% en 2020. Il est parmi les plus élevés d’Europe, et d’après Eurostat, il devrait atteindre près de 50% en 2050 et plus de 60% en 2100[1].

Des risques existent aussi du côté des ménages, où les ratios de dette sur PIB et de dette sur revenus ont augmenté au cours des dernières décennies – même s’ils restent inférieurs à ceux de la Suède ou du Danemark, par exemple.

Cela étant dit, les risques pour la soutenabilité de la dette – tant publique que privée – resteront certainement limités tant que les taux d’intérêt seront bas.

[1]https://ec.europa.eu/eurostat/web/products-datasets/-/tps00200

LES ÉCONOMISTES AYANT PARTICIPÉ À CET ARTICLE

Découvrir les autres articles de la publication

Global
Après le rebond, les interrogations

Après le rebond, les interrogations

Depuis plusieurs semaines, l’amélioration des données économiques semble marquer le pas. D’un côté, ce constat n’est pas surprenant car il succède à un rebond spectaculaire qui ne pouvait pas durer [...]

LIRE L'ARTICLE
États-Unis
Confort monétaire, malaise politique

Confort monétaire, malaise politique

Les barrières érigées contre la pandémie de Covid-19 ont sévèrement entravé l’économie américaine au deuxième trimestre de 2020, qui a vu le PIB chuter de 9,1%, un record [...]

LIRE L'ARTICLE
Chine
Des ménages toujours inquiets

Des ménages toujours inquiets

Le redressement de la croissance économique se poursuit. D’abord principalement tiré par le redémarrage de la production industrielle et de l’investissement, il s’est étendu au cours de l’été notamment grâce au rebond des exportations [...]

LIRE L'ARTICLE
Japon
Continuité des politiques économiques

Continuité des politiques économiques

Le choc économique provoqué par la pandémie de Covid-19 sera long à effacer au Japon. Malgré des mesures sanitaires moins restrictives que dans d’autres pays, la chute du PIB japonais en 2020 sera historique. Le rebond attendu pourrait être limité [...]

LIRE L'ARTICLE
Zone euro
Reprise : la dynamique s’essouffle

Reprise : la dynamique s’essouffle

Après le rebond de l’économie plus marqué qu’attendu à la sortie du confinement, la dynamique semble moins allante [...]

LIRE L'ARTICLE
Allemagne
Après le virus, la menace des « zombies »

Après le virus, la menace des « zombies »

Un fort rebond est attendu au troisième trimestre (7,2 %) avec la levée progressive des restrictions [...]

LIRE L'ARTICLE
France
De rapide, le retour à la normale se fait plus asymptotique

De rapide, le retour à la normale se fait plus asymptotique

Après un redémarrage rapide en mai et juin, l’économie est revenue à 95% de son niveau normal en août [...]

LIRE L'ARTICLE
Italie
Vers une reprise incertaine

Vers une reprise incertaine

Au T2 2020, le PIB réel s’est effondré de 12,8 %, retrouvant les niveaux des années 1990. La récession s’explique principalement par la chute de la demande intérieure : les ménages ont réduit leurs dépenses et les investissements ont baissé de 15 % [...]

LIRE L'ARTICLE
Espagne
Vers un recentrage des mesures de soutien ?

Vers un recentrage des mesures de soutien ?

L’Espagne a enregistré une chute record d’activité de 22,7% au premier semestre 2020 [...]

LIRE L'ARTICLE
Pays-Bas
Des ressources budgétaires suffisantes pour financer la relance

Des ressources budgétaires suffisantes pour financer la relance

La contraction économique (-8,5 %) est moins importante que dans les pays voisins. Les données d’activité confirment un rebond au troisième trimestre malgré le poids des règles de distanciation sociale, en particulier dans les services [...]

LIRE L'ARTICLE
Belgique
Plus robuste qu’attendu, mais la prochaine coalition devra faire des choix difficiles

Plus robuste qu’attendu, mais la prochaine coalition devra faire des choix difficiles

L’économie belge pourrait se contracter de 7,5% cette année, puis croître de 4,6 % en 2012 [...]

LIRE L'ARTICLE
Portugal
Quelques marges budgétaires pour soutenir la reprise

Quelques marges budgétaires pour soutenir la reprise

La bonne gestion de l’épidémie n’a pas permis au Portugal d’éviter un choc économique sévère [...]

LIRE L'ARTICLE
Royaume-Uni
De Charybde en Scylla ?

De Charybde en Scylla ?

Si le PIB britannique a rebondi depuis mai et a rattrapé la moitié du retard causé par la pandémie de Covid-19, la crise économique est encore loin d’être terminée [...]

LIRE L'ARTICLE
Norvège
Une économie résistante au double choc qu’elle a subi

Une économie résistante au double choc qu’elle a subi

La Norvège a non seulement été affectée par la pandémie de Covid-19 mais elle a aussi dû faire face à une forte chute des prix de son principal produit d’exportation : le pétrole [...]

LIRE L'ARTICLE