L’INE, l’institut de la statistique espagnol, a légèrement rehaussé sa deuxième estimation du taux d’inflation harmonisée pour novembre, de 6,6% à 6,7% a/a. Le repli de l’inflation reste toutefois marqué depuis juillet (10,7%) et l‘Espagne enregistre désormais la hausse des prix à la consommation (IPCH) la moins élevée de la zone euro. Principal contributeur à cette décélération, les prix énergétiques rentrent un peu plus dans le rang, passant d’une hausse de +8,0% a/a en octobre à +4,5% a/a en novembre. La mesure 3m/3m illustre encore mieux l’ampleur de la baisse récente : elle plonge à -49,3%, soit la plus importante baisse depuis le début des statistiques actuelles en 2002. Si l’accélération de l’IPCH sous-jacent (hors énergie et produits alimentaires périssables) s’accentue de 6,2% à 6,3% a/a, la mesure 3m/3m (4,4%) fléchit pour le troisième mois consécutif, laissant présager une baisse du glissement annuel cet hiver.
Même si le pic d’inflation semble donc passé, le taux de croissance de l’IPCH risque de se maintenir sur un plateau élevé en 2023. Pour limiter ce risque, le gouvernement envisage d’élargir ses mesures anti-inflation – qui ont montré leur efficacité sur les prix énergétiques – aux denrées alimentaires. Les contours de cette intervention restent cependant à définir1.
La croissance des salaires se maintenant sous l’inflation, le pouvoir d’achat des ménages continue de se détériorer. Selon l’INE, les salaires nominaux ont progressé de 0,7% t/t au troisième trimestre, et de 2,9% au cours des douze derniers mois. Hors « primes et retard de paiements » (catégorie INE), les rémunérations augmentent moins fortement, de 0,3% sur le trimestre et de 2,3% sur l’année écoulée.
La hausse des salaires acceptable par les entreprises pourrait toutefois se heurter à la dégradation de la conjoncture économique (que notre baromètre retrace). Selon l’enquête de la Commission européenne, la confiance des industriels espagnols s’est détériorée en novembre (-3,4 points à 7,7). Cela reflète principalement la baisse de la demande, qui se fait de plus en plus manifeste. Les mesures des carnets de commande, des commandes à l’exportation et de la production poursuivent leur repli entamé au printemps. Si l’indice PMI manufacturier augmente légèrement en novembre (+1 point à 45,7), il se maintient très largement en zone de contraction. À en croire ces enquêtes, la production industrielle, stable depuis le début de l’année, décrochera. C’est déjà le cas dans certaines industries particulièrement touchées par la crise énergétique : l’industrie chimique (-10,1% depuis le début de l’année), l’industrie papetière (-4,7%), et le secteur du bois (-15,9%).
Guillaume Derrien
Les indicateurs du radar sont transformés en « z-scores » (écarts par rapport à la valeur moyenne de long terme exprimée en écart-type). Ces z-scores ont une moyenne de zéro et leur valeur fluctue ici entre -3 et +5. Sur le radar, la zone en bleu indique les conditions économiques actuelles. Elle est comparée aux conditions 4 mois auparavant (pointillés). Un élargissement de la zone bleue indique une amélioration de l’indicateur d’activité.