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Eco Emerging // 4 trimestre 2020 (achevé de rédiger le 28 septembre 2020)
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des niveaux record, tandis que le contingent de travailleurs découragés
est actuellement estimé à 5,5 millions. Dans les services, des pertes
d’emplois ont été enregistrées au cours des six dernières enquêtes PMI.
Quelques embellies sont toutefois à noter : l’emploi dans le secteur
manufacturier et la construction a commencé à se redresser de sorte
qu’il y a eu plus de créations que de destructions d’emplois formels en
juillet pour la première fois depuis février, et les demandes d’allocation
chômage ont baissé de près de 20% en août.
CREUSEMENT RECORD DU DÉFICIT BUDGÉTAIRE
%
PIB
Intérêts
Balance primaire
Balance budgétaire globale
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FIN DE L’ASSOUPLISSEMENT MONÉTAIRE, DÉBUT DE LA
FORWARD GUIDANCE
Après neuf baisses consécutives du taux SELIC, la banque
centrale brésilienne (BCB) a interrompu, en septembre, son cycle
d’assouplissement monétaire en maintenant son taux directeur à 2%
Juillet 2020
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(
contre 6,5% à la mi-2019). Le comité de politique monétaire (Copom) a
par ailleurs signalé son intention de ne relever ses taux que lorsque son
scénario de référence pour les projections d’inflation se rapprocherait
de la cible à l’horizon 2021 (cible à 3,8%) et 2022 (3,5%). Cet outil
GRAPHIQUE 2
SOURCES : TRÉSOR NATIONAL, IBGE, BNP PARIBAS
de communication se rapproche des pratiques de forward guidance ayant continué de baisser (4% du PIB contre 4,5% en janvier et bien
adoptées par plusieurs grandes banques centrales depuis la crise loin des 7,2% du PIB observé en janvier 2016). D’après les calculs de
financière de 2008. Il est destiné à mieux guider les anticipations de l’IPEA, 70% de l’augmentation du déficit primaire du gouvernement
marché au moment où la pente de la courbe des taux continue de central est lié à la hausse des dépenses primaires, le reste étant dû
subir des pressions haussières en raison des incertitudes entourant la à la perte de recettes, qui s’établit à BRL 150 mds sur la période de
situation budgétaire.
janvier à juillet, soit environ 2% du PIB. Le déficit budgétaire devrait
terminer l’année à un peu plus de 17% du PIB, en raison notamment de
la reconduite partielle, jusqu’à la fin de l’année, du programme d’aides
Du fait de la remontée de l’inflation, le taux directeur en termes
réels est, depuis juillet, passé en territoire négatif. En effet, outre la
hausse des prix du carburant et des denrées alimentaires, la reprise
de la consommation, soutenue par le versement des aides d’État, et
l’apparition de goulets d’étranglements du côté de l’offre, dus à une
insuffisance de stocks et des difficultés logistiques, ont conduit à une
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d’urgence aux plus démunis . Ce programme a notamment permis au
président Bolsonaro de bénéficier d’un regain de popularité et pourrait
profiter à son gouvernement à l’approche des élections municipales en
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novembre .
remontée du glissement annuel des prix à la consommation (de 1,9% Les négociations autour du budget 2021 (présenté à la fin de l’été)
en mai à 2,4% en août). Dans le même temps, le prix des intrants dans devraient cristalliser les tensions entre l’exécutif et le législatif
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l’industrie a fortement augmenté en raison, notamment, de pénuries concernant le respect du plafond des dépenses primaires . Certains
auprès de fournisseurs et de la faiblesse du real.
députés poussent en effet à l’abandon ou à la flexibilisation de la règle
budgétaire. C’est aussi un sujet de discorde au sein de l’exécutif entre
les partisans de la discipline budgétaire et ceux en faveur d’une hausse
La BCB ne semble pas pour l’instant préoccupée par le risque
inflationniste car l’inflation sous-jacente (hors énergie et alimentation)
demeure stable et les anticipations d’inflation restent largement
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des dépenses sociales et d’investissement.
inférieures à la cible. Elle semble ne pas se soucier non plus de la En respectant la contrainte du plafond des dépenses primaires, le
faiblesse du real (dépréciation de 30% contre le dollar depuis le début budget, dans sa configuration actuelle (c’est-à-dire un déficit primaire
de l’année). La forte volatilité du BRL reste cependant un vrai casse- ramené à 3% du PIB), ne laisse pratiquement aucune marge de
tête pour les autorités (la BCB est déjà intervenue une vingtaine de manœuvre au gouvernement pour continuer de soutenir l’économie. Au
fois sur le marché des changes cette année). Depuis juin, on observe vu des fortes pressions qui pèsent sur la classe politique pour étendre
un retour mesuré des flux de portefeuille de la part des non-résidents. les programmes sociaux, la crédibilité de la politique budgétaire devrait
Toutefois, la tendance à la dépréciation du real, sa volatilité, de même rester une question majeure dans les prochains mois.
que la baisse structurelle des taux d’intérêt sont autant de facteurs qui
participent à tenir les investisseurs éloignés des marchés locaux. Entre
janvier et août, les sorties nettes s’élevaient ainsi à USD 25 mds.
Auchapitredesréformes,legouvernementaproposéd’unifierdeuxtaxes
fédérales à la consommation (PIS et Cofins) en une taxe fédérale sur la
valeur ajoutée. L’exécutif a aussi présenté au Congrès une proposition
de réformes de la fonction publique visant notamment à restructurer
les carrières et à ajuster les plans salariaux des fonctionnaires. La
réforme, selon le ministre de l’Économie Paulo Guedes permettrait
d’économiser près de BRL 300 mds sur 10 ans. Toutefois, ses effets sur
les comptes publics ne seront visibles qu’à moyen terme.
DÉFICIT BUDGÉTAIRE RECORD, ARBITRAGES DIFFICILES À VENIR
Le déficit budgétaire du gouvernement central a plus que doublé depuis
le début de l’année (-11,9% du PIB en juillet contre -5,5 % en janvier sur
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2 mois glissants). Cette hausse traduit la forte dégradation du déficit
primaire (-7,9% du PIB contre -1,1% en janvier), les intérêts de la dette
Salim HAMMAD
salim.hammad@bnpparibas.com
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L’aide de BRL 600 par personne a été réduite de moitié à BRL 300, et environ 5 millions de Brésiliens ne seront plus éligibles à cette aide. Environ 65 millions de personnes ont
bénéficié de ces transferts avec un coût estimé à près de BRL 45 mds. En comparaison le programme social Bolsa Familia a coûté BRL 33 mds pour l’ensemble de 2019.
D’après une enquête de Datafolha, dans le nord-est du pays – région traditionnellement acquise à la cause du parti des travailleurs (PT) – le taux de rejet du président aurait
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chuté de 52% à 35%. Il est même plus bas au sein des strates socio-économiques les plus défavorisées.
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Celles-ci ne peuvent pas croitre plus rapidement que l’inflation. En 2020, cette règle budgétaire, instituée en 2016, a été suspendue à titre exceptionnel.
Le président voulait par exemple instituer un nouveau programme social, Renda Brasil, qui devait prendre le relais de l’aide d’urgence accordée jusqu’à fin 2020.
La banque
d’un monde
qui change