D’après la dernière estimation GDPNow de la Réserve fédérale d’Atlanta pour le T1 2023, la croissance américaine resterait élevée (2,5% en rythme trimestriel annualisé). Le rythme serait quasi identique à celui du T4 2022 (2,6%), comme si la croissance était imperméable au choc inflationniste et au resserrement monétaire important engagé pour y faire face. Au cours du 1er trimestre, l’estimation GDPNow a toutefois beaucoup évolué, partant d’environ 4% début janvier avant de flancher à 0,7% à la fin du mois, puis a fluctué dans une fourchette comprise entre 1,5 et 3,5% pour atteindre 2,5% mi-avril. Cette estimation GDPNow n’est toutefois pas à l’abri d’importantes erreurs de prévision. Notre prévision de croissance pour le T1 en est proche (0,6% t/t) mais on ne peut écarter une surprise le 27 avril, lors de la publication des chiffres du BEA.
Le bilan conjoncturel des données disponibles pour le mois de mars est, par ailleurs, contrasté. Selon les indices ISM, le climat des affaires dans le secteur manufacturier s’est encore dégradé, assez nettement (-1,4 point, à 46,3), et celui dans le secteur non-manufacturier a rechuté (-3,9 points, à 51,2). Mais le son de cloche des indices PMI de S&P Global est plus positif, pour le secteur manufacturier (+1,9 point, à 49,2) comme pour les services (+2 points, à 52,6). Le message n’est pas plus clair du côté de la confiance des ménages, en forte baisse en mars selon l’Université du Michigan mais en légère amélioration pour l’indice du Conference Board.
Ces signes divergents sont peut-être l’amorce d’un retournement à la baisse, prélude à l’entrée en récession de l’économie américaine, que l’on anticipe pour le T3 2023, qui est aussi (clairement) signalée depuis plusieurs mois par l’indicateur composite avancé du Conference Board. Pour le moment, si l’économie ralentit, elle le fait progressivement au regard notamment du lent dégonflement du marché du travail[1].
En mars, l’inflation a pu donner, quant à elle, l’impression de se dégonfler plus vite, avec la baisse marquée du headline (-1 point, à 5% en g.a.). L’impression est trompeuse car l’inflation sous-jacente est légèrement remontée (+0,1 point, à 5,6% en g.a.) : sa baisse n’est donc toujours pas franchement engagée. La composante « logement » contribue à elle seule à un peu plus de la moitié de l’inflation totale. Combinée à la bonne tenue encore du marché du travail, cela fonde, d’après nous, la Réserve fédérale américaine à poursuivre son resserrement monétaire avec une nouvelle – et dernière – hausse de 25 pb du taux des Fed funds début mai.
Hélène Baudchon (achevé de rédiger le 20/04/2023)