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Eco Emerging // 1 trimestre 2021
economic-research.bnpparibas.com
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budget augmente rapidement. Elle a absorbé 15% des recettes du
gouvernement en 2020, contre 10% en 2019, et elle ne peut que
s’alourdir dans les années à venir. De plus, avec les deux tiers du stock
de la dette libellés en devise étrangère, la trajectoire de la dette est
également vulnérable au risque de change.
ENVIRONNEMENT MONÉTAIRE
%
TND/Eur
Taux directeur (é.d.)
Inflation (é.d.)
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.5
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COMPTES EXTÉRIEURS : UNE STABILITÉ PRÉCAIRE
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Pour l’instant, la chute significative des importations, induite par la
contraction de l’activité économique et la baisse des cours du pétrole,
a permis d’absorber le choc externe. Malgré l’effondrement des
recettes touristiques et, dans une moindre mesure, des exportations
manufacturières, le déficit des comptes courants s’est résorbé, les
réserves de changes se sont reconstituées et le dinar est resté stable
face à l’euro, s’appréciant donc légèrement contre le dollar US. Avec
des réserves de change de USD 8,2 mds pour un besoin de financement
extérieur estimé à un peu plus de 6 mds en 2021 (dont 1 milliard
d’Eurobond sur 2 tranches avec une garantie américaine), le risque
d’un défaut imminent de l’État sur sa dette obligataire internationale
est faible.
3.0
2
.5
.0
2
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2
010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020
GRAPHIQUE 2
SOURCES : INS, BANQUE CENTRALE
Néanmoins, l’équilibre reste fragile. Même en diminution par rapport
à son niveau de pré-crise, le déficit des comptes courants demeure
élevé (autour de 7-8% du PIB) alors que l’évolution de la pandémie
la masse salariale des employés de la fonction publique est attendue à
6,6% du PIB cette année.
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continue de peser, directement ou indirectement, sur les principaux La politique monétaire est également contrainte. La baisse continue
secteurs pourvoyeurs de devises. En outre, le rebond attendu de du taux d’inflation grâce à la bonne tenue du dinar a certes permis
l’économie tunisienne, bien que timide, va générer une demande à la banque centrale de baisser son taux directeur de 150 points de
accrue d’importations. À cela s’ajoutent des pressions baissières sur base à 6,25% (voir graphique 2), mais l’approche reste prudente car les
les investissements directs étrangers qui ne devraient pas excéder taux réels sont encore positifs. En outre, l’assouplissement monétaire
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% de PIB cette année, soit moins de 25% du déficit courant attendu. n’améliore qu’à la marge la mauvaise santé du secteur bancaire. Avec
L’écart à combler reste donc significatif, ce qui pourrait se traduire un taux de créances non-performantes de 14% fin 2019 provisionnées
par de nouvelles tensions sur les réserves de change et sur le dinar à 55%, la qualité du portefeuille des banques était déjà dégradée
si l’assistance financière des bailleurs étaient insuffisantes. La avant la crise, en particulier au sein des banques publiques (un tiers
persistance des déséquilibres extérieurs va aussi continuer d’alimenter du système). Le moratoire sur le remboursement des prêts a permis
l’endettement extérieur qui devrait s’approcher de 110% du PIB fin de contenir l’impact jusqu’à présent. Néanmoins, la pression sur le
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021, soit un niveau de moins en moins soutenable.
système bancaire va s’intensifier en raison de sa forte exposition aux
secteurs les plus vulnérables (industries manufacturières : 23% des
encours fin 2019 ; commerce : 16,7% ; tourisme : 4,8%).
CROISSANCE : DES EFFETS PROBABLEMENT DURABLES
Le rebond attendu de la croissance en 2021 (4% après une récession
estimée à 8,5% en 2020) reste très hypothétique. Même s’il se confirme,
le PIB réel resterait inférieur de 4,8% à son niveau de 2019. Le choc de
l’épidémie risque d’être durable car il frappe une économie fragilisée
par une décennie de croissance molle (1,6% en moyenne entre 2011 et
La capacité de l’économie à se redresser est très incertaine. L’année
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020 avait déjà mal commencé avec une baisse du PIB de 2% en
glissement annuel au T1. L’activité s’est violemment contractée de 21%
au T2 sous l’effet combiné d’un confinement strict, de l’effondrement
du secteur touristique et de la chute de la demande européenne (75%
des exportations tunisiennes). Malgré une reprise au T3, en particulier
du secteur manufacturier, la Tunisie a affiché une des plus sévères
récessions de la région (-9,6% en moyenne sur les 9 premiers mois
de l’année). De plus, l’économie est de nouveau menacée par la
recrudescence de l’épidémie aussi bien localement (entre 1000 et 1500
cas quotidiens depuis la mi-octobre contre moins de 50 cas lors de
la première vague) que chez les principaux partenaires commerciaux
du pays. Des efforts importants ont été déployés pour sécuriser
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019), conséquenced’uneffortd’investissementprivétendanciellement
en baisse (de 17,5% en moyenne sur la période 2000-2010 à 15,2% de
011 à 2019) et de la dégradation de ses fondamentaux. En particulier,
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la nécessité de consolider les finances publiques va imposer de trouver
de nouveaux relais de croissance pour résorber un chômage qui atteint
désormais à 16,2%.
Achevé de rédiger le 18 janvier 2021
l’approvisionnement en vaccins, notamment grâce
à
l’initiative
Stéphane ALBY
stephane.albyc@bnpparibas.com
«
Covax » de l’Organisation mondiale de la santé. Néanmoins, la
campagne de vaccination ne devrait démarrer qu’au début du T2.
Face à cela, les marges de manœuvre sur le plan budgétaire sont
inexistantes. Les dépenses en investissement programmées dans la loi
de finances 2021 dépassent à peine 3% du PIB, soit plus de deux points
de moins qu’en 2019, et il est à craindre qu’elles ne servent de variable
d’ajustement en cas de tensions de trésorerie. À titre de comparaison,
La banque
d’un monde
qui change