L’économie japonaise a poursuivi sa reprise postpandémique en mai et juin, même si celle-ci reste fragile. Selon l’estimation finale pour le mois de mai, la production industrielle s’est contractée de 2,2% m/m en mai mais a augmenté de 4,2% sur un an. Dans le même temps, l’activité du secteur tertiaire a progressé de 1,2% m/m et de 1,8% a/a. La dernière enquête PMI indique par ailleurs que l’activité économique a crû en juin (indice composite en zone d’expansion à 52). Une distinction est néanmoins à opérer entre l’indice du secteur manufacturier, qui est repassé en zone de contraction (49,8), et celui des services, qui a poursuivi sa croissance (54), bien qu’à un rythme moins soutenu qu’au mois de mai.
La confiance des consommateurs s’est à nouveau améliorée en juin grâce à des perspectives d‘emploi et à une croissance des salaires plus favorables. Pourtant, les dépenses de consommation des ménages ont chuté de 1,1% m/m en mai par rapport au mois précédent, portant la baisse sur un an à 4%. La dégradation est particulièrement marquée dans les services de transport et communication (-11,2% a/a) et dans les biens ménagers (-9,2% a/a).
L’inflation a continué sa progression en mai et semble désormais entrainer les salaires dans son sillage. L’inflation sous-jacente, excluant les produits alimentaires frais et l’énergie, progresse de 4,3% a/a. Certaines composantes, comme les biens d’équipements des ménages (+9,6% a/a), et l’habillement (+3,9% a/a) atteignent des niveaux qui n’avaient plus été observés depuis le milieu des années 70. L’inflation des services (+1,7% a/a) se rapproche de la cible de 2%. La Banque du Japon (BoJ) attendra cependant que l’inflation se maintienne durablement autour de la cible des 2 % avant de restreindre sa politique monétaire, notamment par un rehaussement du plafond d’intervention sur les taux souverains à 10 ans.
La croissance des salaires et de la productivité joueront un rôle important dans la décision de la BoJ, comme l’a rappelé Kazuo Ueda lors du forum de Sintra fin juin. Les salaires affichaient une hausse de 2,5% a/a en mai (bonus inclus) selon l’estimation préliminaire du ministère du Travail. Cependant, la productivité n’est pas encore tout à fait positive, à +0,32% a/a dans les services, et -0,5% a/a dans le secteur manufacturier. La banque centrale scrutera donc de près l’évolution de la productivité afin de calibrer ses décisions futures.
La croissance japonaise restera relativement soutenue en 2023 (+1,5% a/a) et 2024 (+1,0% a/a). L’économie nipponne sera impactée par l’inflation et le ralentissement économique mondial, mais elle devrait bénéficier d’effets de rattrapage liés à sa réouverture postpandémique tardive et de la faiblesse du yen qui permettra aux entreprises exportatrices japonaises de gonfler leurs profits rapatriés depuis l’étranger.
Guillaume Derrien avec la collaboration de Louis Morillon (stagiaire). Achevé de rédiger le 18/07/2023.