L’activité économique en Chine a rebondi dès la fin janvier, tirée principalement par les services et la consommation des ménages. Dans l’immobilier et la construction, la crise s’est atténuée. Dans le secteur manufacturier, le redressement de la croissance est resté modéré, freiné par le recul de la production automobile et l’affaiblissement des exportations. Le regain de dynamisme de l’économie va se poursuivre à court terme. Cependant, les risques baissiers sur la croissance restent multiples et importants.
Après l’abandon de la politique zéro Covid début décembre, la levée de toutes les restrictions à la mobilité et la fin des perturbations causées par la flambée du nombre de contaminations en décembre-janvier, la croissance économique chinoise a rebondi depuis fin janvier. Le rebond a été principalement tiré par les services, alors que l’amélioration dans l’industrie s’est révélée plus modeste (Graphique 2).
L’activité dans le secteur des services et la consommation des ménages ont redémarré plus rapidement qu’anticipé. Après plusieurs mois de contraction, les volumes de ventes au détail ont augmenté d’environ +2% en g.a. en janvier-février – et ce, malgré le recul des ventes de voitures dû à la fin des incitations fiscales. L’inflation des prix à la consommation est restée faible (+1,6% en g.a. en janvier-février après +1,8% au T4 2022).
Dans les secteurs de la construction et l’immobilier, on observe une atténuation de la crise : les mises en chantiers, les ventes de logements et l’investissement immobilier ont tous continué de se contracter en janvier-février en glissement annuel, mais à des rythmes beaucoup plus faibles qu’au cours des mois précédents. De plus, le prix moyen des logements dans les 70 principales villes a très légèrement augmenté en février (+0,1% mois/mois) après 18 mois de baisse (la baisse totale a toutefois été limitée à 5,2% depuis juillet 2021).
Dans le secteur manufacturier, le redressement de l’activité et de l’investissement est resté modéré : la production totale de véhicules a fortement chuté (mais celle de véhicules à énergie nouvelle a continué d’augmenter vigoureusement), et les secteurs tournés vers l’export ont subi l’affaiblissement de la demande mondiale.
Dans ce contexte difficile mais plus rassurant, le Parlement chinois a tenu sa session annuelle début mars à Pékin. Le gouvernement y a notamment annoncé ses principaux objectifs macroéconomiques pour 2023. La cible de croissance a été établie à « environ 5% », ce qui témoigne du réalisme prudent des autorités. En effet, le taux de 5% devrait être facilement atteint grâce à l’élan donné par les effets de rattrapage post-Covid et le rebond de la demande privée et de l’offre de services. En même temps, en fixant un objectif de croissance peu ambitieux pour 2023, les autorités, d’une part, tablent sur un soutien modéré des politiques budgétaire et monétaire et, d’autre part, reconnaissent l’existence de risques baissiers élevés.
Ces risques sont d’abord liés à la situation du secteur immobilier : les mesures de soutien du gouvernement et la levée des restrictions sanitaires devraient permettre de mettre fin à l’effondrement de l’activité. Néanmoins, les ventes de logements et le démarrage de nouveaux chantiers devraient rester freinés par la confiance toujours dégradée des acheteurs potentiels, les difficultés financières persistantes d’un grand nombre de promoteurs et la lenteur des restructurations de dette. Ensuite, la fragilité des finances des collectivités locales, qui augmente les risques dans le secteur financier, impose des efforts de consolidation budgétaire et contraint leur recours à l’endettement, devrait peser sur l’investissement public. Des risques baissiers sur la croissance proviennent également de l’environnement international, peu porteur, ce qui assombrit les perspectives d’exportation, de production et d’investissement dans le secteur manufacturier.
Les incertitudes persistent également au sujet du marché du travail : son redressement pourrait être limité, notamment si le rebond de l’activité dans l’industrie reste modéré, ce qui continuerait de peser sur le sentiment et les revenus des ménages. Le taux de chômage urbain a d’ailleurs légèrement ré-augmenté en février 2023, atteignant 5,6% en moyenne dans le pays et 18,1% chez les 16-24 ans (contre respectivement 5,2% et 11,9% en 2019).
À ces facteurs baissiers à court terme s’ajoutent les facteurs structurels du ralentissement de la croissance, en particulier les dynamiques démographiques et le ralentissement de la productivité. Enfin, la confiance et la demande du secteur privé pourraient rester affectées par les risques réglementaires internes (manque de visibilité, contrôle renforcé de l’État et du Parti communiste) et les tensions géopolitiques.
Christine Peltier