- Outre la fraude fiscale et les failles du système, les distorsions du régime fiscal ont amputé les recettes potentielles d’au moins un tiers selon l’Agence nationale des impôts et des douanes (DIAN). i/ De nombreux articles ne sont pas assujettis à la TVA (exonérations estimées à 7% du PIB [19]). ii/ Des avantages fiscaux ont été accordés en vue d’encourager l’investissement dans des secteurs prioritaires. iii/ Il existe également des distorsions dans la collecte de l’impôt selon les secteurs et la taille des sociétés (régimes spéciaux préférentiels pour les entreprises). Des augmentations ponctuelles des exonérations (dont des journées sans TVA) sont souvent mises en œuvre pour régler des tensions sociales et des problèmes politiques consécutifs à des hausses des taux d’imposition nominaux [20]. Selon le ministère des Finances, quelque 40% de la collecte potentielle de l’impôt au titre de la TVA et 30 % au titre de l’impôt sur le revenu donnent lieu à de la fraude fiscale.
- Manque à gagner fiscal à court terme engendré par certaines réformes : i/ la réforme de la fiscalité de 2012 s’est traduite par une perte de recettes estimée à 1,2 point de pourcentage du PIB du fait de la suppression de la taxe sur les transactions financières et les plus-values (0,8% du PIB) ainsi que de l’impôt sur la fortune (0,4 % du PIB). ii/ La réforme fiscale de 2018 a également été très critiquée pour avoir entraîné une perte permanente de recettes à hauteur de 0,8% du PIB suite à la baisse de l’impôt sur les sociétés[21]. La loi de finances initiale de 2018 était censée n’avoir aucune incidence sur les recettes à moyen terme avec un élargissement de l’assiette de la TVA. Cependant, cet aspect de la réforme n’a jamais été accepté par le Congrès.
Troisièmement, des biais optimistes en matière de planification ont contribué à nuire à la crédibilité de l’action publique notamment concernant la trajectoire de consolidation budgétaire à moyen terme [22] :
- Hypothèses de recettes pétrolières [23]. Comme les comptes publics continuent de dépendre fortement des secteurs pétrolier et minier (graphique 17), les hypothèses relatives à l’évolution des cours des matières premières ont tendance à avoir d’importantes conséquences sur les prévisions de recettes et la capacité du gouvernement à atteindre ses objectifs budgétaires. Selon le FMI, le moyen le plus efficace d’enrayer la hausse de la dette publique aurait été de procéder à des estimations plus conservatrices des recettes pétrolières [24].
- Capacité à réaliser des gains d’efficacité au sein de l’administration fiscale. Dans ses deux dernières propositions de réforme fiscale, l’administration prévoyait que les recettes générées par une plus grande efficacité dans la collecte de l’impôt représenteraient près de 0,3% du PIB. Ces prévisions se fondaient sur les améliorations apportées au système informatique [25] et à la gouvernance de l’administration fiscale (DIAN), ainsi que sur le renforcement des sanctions pour enrayer la fraude fiscale. Pour l’instant, la Colombie n’a pas de solides antécédents en matière de mise en œuvre de sanctions (sévères) pour évasion fiscale.
- Hypothèses relatives à la croissance économique. À de rares exceptions près, le cadre budgétaire à moyen terme du gouvernement a systématiquement tablé sur une croissance supérieure au potentiel depuis 2012 [26]. Et les écarts de projections peuvent avoir des effets conséquents. D’après les estimations du gouvernement, un repli d’un point de pourcentage de la croissance du PIB réel se traduirait par une perte de recettes publiques d’environ 0,4% du PIB.
Compte tenu de la i/ compressibilité limitée des dépenses courantes, ii/ de la nécessité d’engager des dépenses exceptionnelles pour contrecarrer les effets de chocs extérieurs, iii/ de la sous-performance des recettes publiques (due à la baisse des recettes pétrolières, à une croissance insuffisante du PIB ou à des gains d’efficacité non réalisés), les autorités ont parfois été contraintes de réduire les subventions publiques et les dépenses d’infrastructures, ou de recourir à des recettes exceptionnelles afin d’atteindre les objectifs budgétaires à défaut de quoi ces derniers étaient révisées [27]. Les autorités ont ainsi procédé à la vente d’actifs et recouru à des opérations de désinvestissement (par voie de cession de participations dans ISA, société de services aux collectivités, et dans Ecopetrol). Mais, ces types de recettes étant non récurrentes, elles ne représentent pas une solution structurelle pour parvenir à la consolidation des comptes budgétaires, et sont ainsi (typiquement) perçues défavorablement par les agences de notation.
Choc de la Covid-19 : quel coût pour les finances publiques?
La pandémie de Covid-19 a frappé l’Amérique latine de plein fouet. Si les cas étaient peu nombreux aux premiers jours de la crise, le retard a été rapidement comblé, la Colombie totalisant plus de 135?000 décès à la mi-février 2021 (graphique 18). Pour évaluer l’ampleur du choc pandémique pour les finances publiques, nous étudierons tour à tour ci-après la situation budgétaire à l’orée de la crise, les mesures mises en place pour y faire face et l’impact de la crise sur les indicateurs budgétaires.
Situation budgétaire : conditions initiales
Par rapport à la crise financière de 2007-8, la crise de la Covid-19 a frappé la Colombie à un moment où elle était affaiblie sur le plan budgétaire, avec des marges de manœuvre plus réduites et une croissance moins dynamique.
À l’orée de la pandémie, l’économie commençait à retrouver un rythme de croisière plus soutenu (+3,3% en 2019) après des années de croissance anémique dans le sillage du choc pétrolier de 2014-15 (taux moyen sur 5 ans : +2,4% en 2019, contre +5,5% en 2007). L’environnement extérieur était moins favorable : le prix du baril, supérieur à 100 USD en septembre 2007, avoisinait 48 USD en février 2020. La taille moyenne du déficit budgétaire était comparable au cours des 5 années précédant les chocs : 3,6% du PIB (2003-2007) contre 3,1% (2015-2019). En revanche, la dette publique avait été réduite de quelque 12 points de PIB au cours des 5 années précédant la crise financière, à 32 % du PIB en 2007. Elle a, au contraire, augmenté régulièrement entre 2012 et 2019, d’environ 14 points de PIB sur la période, en dépit des plans budgétaires élaborés conformément à la règle budgétaire[28]. Cette évolution reflète pour une large part la «?dynamique mécanique de la dette?» (annexe 4). En effet, d’après les calculs du FMI, elle est imputable à hauteur de 6,5 points de PIB aux composants cycliques (pétrole et production) et à hauteur de 6,5 points également à la dépréciation du taux de change induite par la baisse du cours du pétrole [29]. La trajectoire de la dette publique masque toutefois le fait qu’entre temps, le cadre institutionnel budgétaire s’est renforcé, le coût de la dette est devenu plus abordable, le pays a amélioré sa capacité de résistance aux chocs externes et, plus important encore, un accord de paix avec les FARC a été signé.
Plans de soutien budgétaire et monétaire
Le soutien budgétaire apporté par la Colombie à son économie a été plus important en 2020 que pendant la crise financière de 2007-8. Il reste néanmoins inférieur à celui des autres grandes économies de la zone (graphique 19). Selon le Fiscal Monitor du FMI, les mesures discrétionnaires «?above the line » (hors garanties de crédit) ont représenté environ 4% du PIB, en ligne avec la moyenne observée en Amérique latine (environ 4,5% du PIB)[30]. Afin de déployer les dépenses d’urgence, l’administration a activé une clause dérogatoire permettant de suspendre les règles budgétaires jusqu’à fin 2022 [31].
Les mesures ont ciblé particulièrement le soutien aux personnes les plus vulnérables, à travers des allègements de charges et des aides financières, outre les initiatives prises pour combattre la pandémie (annexe 2)[32]. Un fonds national d’intervention d’urgence (FOME) a été créé pour gérer ces dépenses, mobilisant le fonds de pension national des administrations locales et centrale (FONCET), le fonds d’épargne et de stabilisation alimenté par les redevances pétrolières (FAE) et le budget de l’administration centrale.
Si les mesures initiales de soutien budgétaire s’inscrivaient dans la moyenne observée dans la zone, les autorités ont choisi de prolonger l’aide accordée, tirant parti de la hausse de prix des matières premières [33]. À la différence de nombreuses autres économies émergentes, qui ont mis fin aux aides d’urgence, la Colombie a décidé de poursuivre sa politique de soutien jusqu’à la fin de 2022 «?pour protéger les plus vulnérables et soutenir la reprise?». Au total, en prenant en compte les dépenses supplémentaires, les instruments de financement et les garanties (mesures hors budget) notamment, les mesures budgétaires ont avoisiné les 10 % du PIB (graphique 20).
Impact sur les indicateurs budgétaires
La crise sanitaire a affecté les équilibres budgétaires et la dette publique par le biais de multiples canaux :
- la diminution des recettes (induite par l’effondrement de l’activité économique, les allègements de charges, la baisse des recettes d’exportation de matières premières)
- les stabilisateurs automatiques (indemnisation du chômage)
- les dépenses à caractère social
- la dépréciation du change (environ un tiers de la dette étant libellée en devises étrangères)
- la chute brutale du PIB nominal (l’effondrement de la demande a été particulièrement vertigineux en Colombie par rapport aux autres pays de la zone)[34]
- une campagne de vaccination tardive (rendant nécessaire le maintien des mesures de soutien à l’économie sur des périodes plus longues que dans les économies développées).
En 2020, le déficit budgétaire du gouvernement central a atteint 8,1 % du PIB (contre une projection avant crise de 2,2 %), avec une charge d’intérêt de la dette absorbant quelque 2,5 % du PIB (graphique 21). La loi de finances pour 2021 prévoyait un nouveau creusement du déficit global en 2021 (8,6% du PIB) et un maintien à un niveau encore considérable en 2022 (7%). Les projections de déficit pourraient toutefois être ramenées en deçà de 7% du PIB sur la période, compte tenu d’une croissance du PIB réel plus dynamique qu’attendu en 2021 (10,6% en glissement annuel) et d’un acquis de croissance important en 2022 (5,3 points de pourcentage).
Pour faire face à des besoins de financement inhabituellement élevés (environ 10% du PIB) en 2020-22, les autorités ont eu recours à cinq grandes sources de financement :
- le fonds d’épargne et de stabilisation (FAE, 1,2% du PIB),
- le fonds de pension national pour les administrations locales (FONCET)
- l’émission sur le marché de USD 13 à 16 mds d’emprunts obligataires en moyenne (les banques ont notamment été invitées à acheter USD 2,5 mds « d’obligations solidaires » en 2020)
- les financements extérieurs (entre USD 10 et 11 mds par an en règle générale auprès de la CAF, de la BIRD, de la BID, y compris certains financements d’urgence du FMI)
- les privatisations (USD 3,5 mds en 2021 et USD 1,7 mds attendu en 2022) et un «?impôt de solidarité?» créé à titre provisoire [35].
En 2020, la dette de l’administration centrale a augmenté de 13 points de pourcentage (pp) à 59% du PIB (+13 pp également pour la dette des administrations publiques et +15 pp pour la dette du secteur public non financier à 71% du PIB). Le fardeau de la dette a ainsi augmenté en 2020 pratiquement d’un même montant qu’au cours des huit années précédentes, la dette doublant pratiquement en pourcentage du PIB depuis l’instauration de la règle budgétaire en 2011. L’augmentation du fardeau de la dette se situe à un niveau supérieur à la moyenne latino-américaine (+10 pp). Elle est comparable avec la moyenne mondiale (+13 pp), mais inférieure à celle des économies avancées (+16 pp) [36]. À l’instar de nombreux autres pays, la prolongation des garanties a par ailleurs accru les obligations contingentes (contingent liabilities) à hauteur de 2,6% du PIB [37].
Post choc Covid-19 : trajectoire possible des indicateurs de la dette
L’évolution du ratio de dette sur PIB d’un pays dépend essentiellement des trajectoires futures du solde primaire, des taux d’intérêt, du taux de change et des perspectives de croissance (annexe 4). Surtout il repose, dans une large mesure, sur l’interaction entre les taux d’intérêt et la croissance :
- si l’économie croît à un rythme supérieur au taux d’intérêt moyen de la dette publique, il est possible de stabiliser, voire de réduire, la dette publique en pourcentage du PIB, même avec un déficit primaire. Par conséquent, « des taux d’intérêt faibles peuvent autoriser une expansion soutenable de la position budgétaire » [38].
- si le taux d’intérêt moyen de la dette publique excède le taux de croissance de l’économie, un excédent primaire est indispensable (dont la taille peut être calculée) pour stabiliser le ratio de dette publique, faute de quoi elle continuera mécaniquement d’augmenter.
Dans la première sous-section, nous passons en revue les déterminants sous-jacents du ratio de dette publique au regard du contexte social du pays, des événements politiques des dernières années et des effets de la pandémie de Covid-19. Cela nous donnera une idée de leur évolution probable.
Dans la deuxième sous-section, nous tirons parti des enseignements de la section précédente pour élaborer les hypothèses macroéconomiques à partir desquelles nous pourrons établir un scénario de base concernant la trajectoire de la dette publique. À partir de ce scénario de base, et des chocs susceptibles de le contrarier, nous pouvons établir une comparaison par rapport aux projections officielles (telles qu’elles ressortent du cadre budgétaire à moyen terme du gouvernement.)
Evaluation des déterminants du ratio d’endettement public à l’ère post-Covid -19
Déterminant n° 1 – Un solde primaire vraisemblablement en déficit pour les 5 prochaines années.
De la même manière que la Constitution de 1991 a conduit à une forte augmentation des dépenses [39], les autorités devront composer au cours des prochaines années avec des pressions budgétaires importantes qui devraient maintenir le solde primaire en situation de déficit à moyen terme.
L’administration a choisi de continuer de soutenir l’économie et la population vulnérable jusqu’à la fin de l’année 2022 sous la forme de dépenses de santé, de transferts aux ménages, de mesures de soutien aux entreprises et d’investissements (tableau 1).
Les pressions exercées pour une augmentation des dépenses sociales persisteront :
- l’accord de paix signé en 2016 avec le FARC a déplacé une partie des préoccupations de la population de la sphère sécuritaire à la sphère sociale. Des questions de société se sont ainsi imposées plus vigoureusement au sein du débat public et de progressivement modifier la structure du paysage politique (annexe 3).
- la Colombie a connu une progression plus lente de ses indicateurs sociaux au cours des dernières années. Même si dans l’ensemble, le progrès social s’est poursuivi ces 15 dernières années, en observe en Colombie, comme dans de nombreux pays de la zone, un ralentissement des indicateurs de progrès social depuis la fin du supercycle des matières premières [40]. Le niveau de pauvreté atteint un niveau élevé pour un pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure. Depuis quelques années, près d’un tiers de la population vit avec moins de 5,50 dollars US par jour (seuil de pauvreté) et près de 2 millions de Colombiens sont en situation d’extrême pauvreté, un phénomène encore accentué par la pandémie de Covid-19 (graphique 22) du fait notamment de ses effets sur le marché du travail [41].
La Colombie figure parmi les pays du monde où les inégalités de revenu sont les plus marquées (1% de la population concentre 20% du revenu total) et arrive au quatrième rang en Amérique Latine. De nombreux facteurs perpétuent ces inégalités qui se sont encore creusées à l’échelle du pays dans le contexte de l’épidémie de Covid-19 [42](graphique 23) : (a) la forte concentration de la propriété foncière, (b) un taux de chômage structurellement élevé (près de 10 % au cours des 10 dernières années), (c) une proportion élevée d’emplois informels (avec un niveau de protection sociale limité, une faible couverture retraite et une probabilité plus élevée de basculer dans la pauvreté en cas de perte d’emploi), (d) la prédominance des universités privées au sein de l’enseignement supérieur (plus de 70%, avec des coûts d’accès jugés prohibitifs par une grande partie de la population) et (e) une industrie minière à forte intensité capitalistique (même si le secteur est source de croissance et de revenu pour l’économie, il ne crée cependant pas beaucoup d’emplois et n’est typiquement pas un vecteur de mobilité sociale) [43].
Ainsi, une conscience sociale plus forte conjuguée à une progression plus lente des indicateurs sociaux ont engendré ces dernières années une multiplication des mouvements sociaux revendiquant une meilleure protection sociale, la réduction des inégalités et l’amélioration de l’accès à l’emploi (encadré 2). Certains observateurs estiment que l’absence de mesures d’atténuation de la crise sur la distribution des revenus, conjuguée aux effets de la pandémie sur les plus vulnérables, pourrait à terme alimenter davantage les troubles sociaux, et entretenir un cercle vicieux (la baisse de la croissance induit un creusement des inégalités qui entraîne des troubles sociaux puis une baisse de la croissance, etc. [44]). Chercher à éviter ce piège serait en soi une incitation suffisante au maintien des mesures de soutien en place et à l’augmentation des dépenses pour la santé et l’éducation, aujourd’hui parmi les plus faibles de la zone (graphique 25).
Des pressions croissantes sur d’autres postes de dépenses sont également susceptibles d’apparaître au cours des prochaines années, y compris :
des coûts d’intégration de migrants (les pressions migratoires pourraient subsister, au vu de l’aggravation de la crise socio-économique au Venezuela et des effets du changement climatique)
des coûts liés à la mise en œuvre de l’accord de paix de 2016 (tant que les parties prenantes au niveau local que la communauté internationale continueront de militer pour une meilleure mise en œuvre de l’accord),
du contrôle du trafic de stupéfiants et de la lutte contre le crime organisé (une des nombreuses conséquences de la pandémie de Covid-19 a été l’augmentation de la consommation de stupéfiants et du crime organisé?; dans le même temps, la hausse de la pauvreté et le creusement des inégalités ont également favorisé les recrutements au sein de réseaux criminels)[45],
des coûts de la transition énergétique (dans le cadre de la COP26, la Colombie s’est engagée à réduire ses émissions de 50 % d’ici 2030) et des pressions sur les dépenses induites par la transition démographique (le profil démographique du pays exigera des modifications majeures des systèmes de retraite et de santé au cours des prochaines années).
Déterminant n° 2 - Taux d’intérêt : la tendance est à la hausse
Les finances publiques vont devoir composer à l’avenir avec la hausse des taux d’intérêt :
- l’augmentation de l’inflation tire progressivement les taux courts à la hausse. Pendant la pandémie, la banque centrale de la Colombie (BanRep) a abaissé son taux directeur à un plus bas historique. Cependant, comme dans de nombreux pays émergents, l’inflation a repris une tendance haussière (graphique 26) induite par les cours élevés des matières premières, les perturbations sur les chaînes d’approvisionnements au niveau mondial, les effets retardés de la dépréciation de la monnaie et le fort rebond de la consommation [46]. En Colombie, en plus de ces facteurs, un mouvement national de protestation, en mai et juin 2021, a entraîné une augmentation du prix des denrées alimentaires, l’agitation ayant affecté les circuits de distribution des produits de première nécessité. À ce stade, la BanRep a été l’une des dernières grandes banques centrales d’Amérique latine à initier son cycle de normalisation monétaire (graphique 27). Mais tous les facteurs militent pour un resserrement plus rapide des taux d’intérêt en 2022, autant pour des raisons intérieures qu’extérieures (la normalisation de la politique monétaire au sein de certaines économies avancées pourrait affecter les rendements obligataires, les flux de capitaux et la valorisation de la dette des pays émergents).
- les incertitudes entourant l’action publique affectent la partie longue de la courbe des taux. Les pressions sociopolitiques (hausse des mouvements sociaux) et les préoccupations plus importantes des investisseurs relatives aux risques budgétaires et politiques (en partie liés aux élections) ont contribué à alimenter les anticipations d’inflation, à écarter les primes de risque et, par voie de conséquence, à induire une hausse des coûts d’emprunt. Résultat, les rendements d’État à dix ans ont déjà augmenté de 300 points de base par rapport à la fin de l’année 2020. Des mesures monétaires de contrôle des taux longs, comme la mise en place d’un programme de rachat de la dette publique sur le marché secondaire paraissent peu probables. Même si la banque centrale a été autorisée pendant la crise de Covid-19 à mettre en place des mesures d’assouplissement quantitatif, elle en a fait usage avec parcimonie et dans un contexte d’urgence. À l’avenir, il est plus probable que la BanRep continue de se concentrer avant tout sur les anticipations d’inflation et la taille de l’output gap pour orienter sa politique monétaire.
- à la suite du choc du Covid-19, l’économie va devoir s’adapter à un nouvel équilibre macroéconomique qui devrait se traduire par la hausse des taux d’intérêt réels. Une conséquence importante du choc de la Covid-19 a été d’induire une expansion des déficits jumeaux (en particulier en 2021 avec un déficit du compte courant à -5,7% du PIB). L’ajustement de ces déséquilibres macroéconomiques va exiger soit une politique budgétaire moins expansionniste (i.e. accélération du processus de consolidation budgétaire), soit un ajustement plus rapide de la politique monétaire. Celle-ci est depuis la crise toujours en territoire expansionniste (le taux directeur réel s'établissait à environ -3% en février 2021, bien en deçà du taux neutre (d'équilibre) estimé à 1,5% [47]). Compte tenu du l'orientation actuelle de la politique budgétaire et de la convergence probable de l'épargne privée vers sa moyenne historique (17% du PIB avant la pandémie contre 20 % du PIB actuellement), la BanRep devra procéder à une augmentation de ses taux à des niveaux plus proches du taux neutre si elle souhaite réduire les déséquilibres extérieurs [48].
Déterminant n° 3 - Taux de change : une appréciation nominale anticipée à moyen terme.
Historiquement, le taux de change (USDCOP) a eu tendance à afficher une relation étroite avec le prix du pétrole (graphique 4) ainsi qu’avec le dollar en taux pondéré par le commerce extérieur (USTWI)[49]. Ainsi, avec le retournement du super-cycle des matières premières, le peso a perdu environ 40% de sa valeur contre le dollar entre juillet 2014 et mars 2015. Depuis, il a continué sur une tendance baissière, et ce malgré la signature des accords de paix en 2016 (graphique 28). À noter que depuis la crise de la Covid-19, le taux de change effectif réel (et nominal) affiche un découplage plus important par rapport aux prix du pétrole. Pour faire état de cette plus grande divergence, plusieurs explications ont été avancées : hausse des risques politiques internes (manifestations sociales, changements au sein du paysage politique), perception dégradée du risque souverain par les marchés (écartements des spreads CDS), dégradation des équilibres extérieurs et resserrement plus lent (par rapport aux pairs régionaux) de la politique monétaire.
Une réorientation de la politique de change actuelle de la BanRep paraît peu probable à moyen terme. Elle n’est, du moins, pas anticipée dans le cadre de nos simulations. Historiquement, la Colombie est passée d’un régime de change à parité glissante (crawling peg, à partir des années 1960) à un régime de change flottant en 1999. Le flottement de la monnaie s’est en réalité avéré davantage administré (managed float) que pur (pure float). En accord avec son mandat de contrôle de l’inflation et de maintien de la stabilité financière, la BanRep intervient en effet de manière discrétionnaire ou programmée sur le marché des changes dans le but de satisfaire trois principaux objectifs: 1/ accumuler des réserves de change 2/ freiner une volatilité excessive de la monnaie (atténuer les problèmes de liquidité sur le marché) 3/ corriger les déséquilibres importants du taux de change [50]. Ainsi, si la BanRep peut être amenée à contrer une appréciation ou une dépréciation excessive de la monnaie sans pour autant avoir un objectif explicite concernant le niveau du taux de change nominal ou réel. Pour les simulations, nous supposons une tendance à l’appréciation du taux de change nominal. En effet, la plupart des fair value models mobilisés pour estimer le taux de change d’équilibre – qu’ils soient basés sur les prix (comme ceux basés sur la théorie de la parité du pouvoir d’achat ou PPA) ou sur les fondamentaux (behavioral equilibrium exchange rate ou BEER) – font état d’une sous-évaluation chronique du peso contre le dollar au cours des dernières années. Nous formulons donc l’hypothèse que ce déséquilibre sera amené à se résorber sur un horizon de moyen à long terme.
Déterminant n° 4 – Une croissance potentielle affaiblie par la pandémie de Covid-19
Pour son développement économique, la Colombie s’est davantage appuyée sur l’accumulation des facteurs de production plutôt que sur les gains de productivité. Entre 2003 et 2012, cette accumulation a expliqué 4 points de pourcentage de croissance du PIB contre 0,5 point pour la productivité globale des facteurs (PGF) [51]. Ces dernières années, toutefois, la contribution de la PGF à la croissance du PIB est devenue négative (graphique 29). Au fil du temps, des facteurs démographiques impliquent que la contribution du travail à la croissance devrait aller en diminuant.
Des obstacles structurels ont limité les gains de productivité et expliquent la faible contribution de la PGF à la croissance dans le temps. Parmi ceux-ci : un taux élevé de travail informel, des barrières au commerce international (en particulier des barrières non tarifaires et la lenteur des procédures douanières), un déficit d’infrastructures considérable (graphique 30), l’inadéquation des compétences avec le marché du travail, une réglementation lourde, un manque d’innovation (faible effort de recherche et de développement), etc. Ces facteurs structurels sont autant de freins à la croissance potentielle.
Depuis plusieurs années, la croissance potentielle pâtit des effets de chocs spécifiques dont il est difficile de déterminer s’ils sont transitoires ou non :
- le choc des termes de l’échange de 2014-15 : la baisse des revenus du pétrole a pesé sur la croissance potentielle via l’affaiblissement de l’accumulation de capital.
- le choc sanitaire de 2020. La pandémie de Covid-19 a entraîné une perte permanente du niveau de production potentielle (potential output) liée i/ à la perte de capital humain (du fait de la fermeture prolongée des écoles) et ii/ du lent retour des femmes au sein de la population active (produit du déséquilibre entre les sexes dans la prise en charge des tâches ménagères et la garde des enfants.[52]) Si l’on compare les prévisions de croissance de moyen terme du FMI à horizon 2026 avant et après la pandémie (2019 vs. 2021), on remarque une baisse de 0,25 point de pourcentage de la projection (celle-ci s’établissant à 3,5%, soit un niveau à peu près en ligne avec les projections officielles de croissance potentielle (3,3%)). Ces estimations sont moins dégradées qu’attendu. En effet, elles tiennent compte du choc d’offre positif sur le facteur travail résultant de l’afflux de migrants vénézuéliens [53] depuis 2018-19 (le choc devrait partiellement compenser les effets défavorables sur l’accumulation de capital et de travail liés respectivement à la pandémie et la transition démographique). Pour l’essentiel, les estimations de croissance potentielle oscillent dans une fourchette de 2,5 à 3,5%[17] (graphique 31).
Simulations : risques sur la dette publique
Dans cette section, nous envisageons des hypothèses alternatives à celles énoncées dans le cadre budgétaire à moyen terme du gouvernement (medium-term fiscal framework, MTFF). Nous traduisons une partie des éléments mentionnés dans la section précédente sous forme chiffrée afin d’évaluer quelques évolutions possibles de la dynamique de la dette publique.
Benchmark : le scénario MTFF
En juin 2021, les autorités colombienne ont procédé à d’importantes révisions du cadre budgétaire à moyen terme (MTFF), anticipant des déficits budgétaires considérablement plus élevés des administrations publiques par rapport aux MTFF précédents. Ces ajustement proviennent en partie du fait que les objectifs de déficit paraissaient inatteignables en raison des effets de la pandémie[54]. Les modifications vont beaucoup plus loin. Les points importants sont résumés dans l’encadré 3, le tableau 2, et les graphiques 32 et 33.
Selon le MTFF, le ratio de dette publique culminerait à près de 70% du PIB en 2022-23 et porterait le niveau de dette à environ 60% du PIB en 2032. Toutefois, afin de se conformer pleinement à la règle budgétaire, le gouvernement prévoit, qu’en plus des recettes fiscales de 1,2% du PIB (anticipés dans le cadre de la réforme fiscale de 2021), les administrations publiques devront procéder à un ajustement budgétaire supplémentaire à hauteur de 0,6% du PIB notamment sur la période 2023-26 (l’ajustement serait plus faible par la suite.) Ainsi un nouvel ensemble de réformes devrait être nécessaire à court terme.
Scénario de base et scénarios alternatifs
À la lumière des éléments discutés précédemment, nous présentons dans les notes du tableau 3 les hypothèses macroéconomiques de notre scénario de base pour chaque déterminant du ratio de dette publique. À noter que nous avons pris en compte les nouvelles données macroéconomiques publiées depuis la présentation du MTFF en juin 2021. Le rebond du PIB a été par exemple beaucoup plus fort qu’anticipé dans le MTFF, tandis que la dépréciation monétaire a été dans le même temps relativement contenue. Nous évaluons en outre des trajectoires alternatives du ratio de dette publique en soumettant le scénario de base à plusieurs chocs :
- Choc du solde primaire : nous envisageons dans ce scénario des déficits primaires plus importants dans le temps. Plusieurs événements pourraient donner vie à ce scénario : des prix du pétrole moins favorables, des besoins de dépenses plus importants sur le plan social, une croissance plus décevante dans le temps ou un manque à gagner sur le plan des réformes (e.g. réformes fiscales édulcorées par le Congrès). Dans ce scénario, le solde primaire subit un choc supplémentaire de 0,8% du PIB par rapport au scénario de base, et ce sur l’ensemble de la période de projection (le choc représente la moitié d’un écart-type de la balance primaire au cours de la période 2010-20).
- Choc de taux d’intérêt : nous prenons en compte dans ce scénario une dynamique d’inflation plus forte et des conditions de financement extérieures durcies. Par rapport au scénario de base, nous appliquons ainsi sur la période de projection un choc de 100 points de base aux taux d’intérêt locaux et de 50 points de base aux coûts d’emprunt étrangers (les chocs sont à peu près équivalent à environ un écart-type, lorsque l’on considère les taux historiques sur le plan local et étranger, au cours des dix dernières années).
- Choc de croissance : dans ce scénario, nous appliquons pendant une période de deux ans (2024-25) un choc d’un écart-type (3,5 points de pourcentage sur la période 2010-2020) aux taux de croissance du scénario de base. Cela implique une légère récession au cours des deux années.
- Choc de taux de change : nous anticipons dans le scénario de base des gains progressifs de la monnaie par rapport au dollar (hypothèse de retour à l’équilibre à moyen terme alors que la monnaie est sous-évaluée depuis plusieurs années.) Pour contrebalancer nos hypothèses plutôt optimistes sur le change par rapport aux projections officielles, nous introduisons dans ce scénario deux chocs dépréciatifs (un sévère et l’autre modéré) sur la monnaie contre le dollar. D’abord, nous supposons en 2025 une dépréciation nominale du peso contre le dollar d’une ampleur similaire à celle observée en 2015 (36%) à la suite du retournement du super-cycle des matières premières. Un épisode plus modéré est ensuite introduit en 2028 (correspondant à l’équivalent d’un écart-type sur la période 2010-2020).
En dépit de l’utilisation d’hypothèses plus conservatrices (afin d’atténuer le biais optimiste évoqué plus haut dans le texte) concernant notamment le PIB réel et le solde primaire, nous voyons dans le tableau 3 que dans le scénario de base, le ratio dette/PIB culmine à peu près à 67% en 2023-24, soit en deçà des projections officielles. Cette évolution plus favorable tient en partie à la forte reprise économique observée en 2021, laquelle a permis de stabiliser le ratio de dette beaucoup plus tôt que prévu. En revanche, sur la seconde moitié de l’horizon de projection les hypothèses du scénario de base pèsent plus lourdement sur la dynamique de dette. En effet, le ratio de dette diminue moins rapidement que dans les projections officielles.
De manière générale, toutefois, nous remarquons que malgré des hypothèses dans l’ensemble plus pessimistes, la dégradation reste, somme toute, assez modeste. Cela s’explique en partie par le fait que les « composantes automatiques » de la dynamique de dette (appendice 4) ont tendance à jouer favorablement tout au long de l’horizon de projection (tendance à l’appréciation du taux de change nominal, et différentiel croissance/taux d’intérêt favorable). De plus, nous voyons dans le tableau 4 que les conditions nécessaires pour stabiliser le ratio de dette (en termes d’ajustement du déficit primaire) semblent dans l’ensemble à portée de main, réduisant ainsi les inquiétudes par rapport à la soutenabilité de la dette publique. Concernant l’effet des chocs (graphique 34), on constate que la trajectoire de la dette publique est très sensible au choc du taux de change, en raison de la part relativement importante de la dette libellée en devises. À l’exception des chocs de change, la dette à tendance à se stabiliser en moyenne de 5 à 10 points de pourcentage au-dessus des projections officielles. Ainsi, bien que l’exercice de projection à long terme soit sujet à d’importantes incertitudes, nous constatons que même dans des situations de scénarios moins favorables, la dégradation du ratio de dette reste dans l’ensemble contenue. En définitive, les risques sur la dette colombienne tiennent moins à son niveau mais plutôt à certains aspects de son profil (part de la dette en devises, détention de la dette par des non-résidents dans un contexte où les besoins de financement externes sont plutôt importants).
Conclusion : faut-il s’inquiéter ?
Notre analyse[1] a montré que la réalisation des objectifs de consolidation budgétaire à moyen terme pourraient s’avérer difficiles. Compte tenu de ce diagnostic, y a-t-il lieu de se préoccuper de la trajectoire des finances publiques en Colombie??
La situation est loin d’être critique et la Colombie est en bonne capacité de soutenir sa dette. Elle fait face à une charge d’intérêts et à un coût du service de la dette relativement stables et raisonnables alors que le différentiel taux d’intérêt/croissance a tendance à lui être globalement favorable. En outre, la Colombie présente des risques haussiers plus importants que ses pairs (au niveau régional) en matière de croissance potentielle et de maintien des taux bas. Le ratio de la dette publique a considérablement augmenté et il faudra du temps pour renouer avec les ratios d’endettement de l’avant pandémie.
Mais une gestion active de la dette et le renforcement de la position extérieure nette du pays ont permis de réduire l’exposition aux risques de taux, de change et de refinancement. Les risques à moyen terme sont par ailleurs limités par la faiblesse des obligations contingentes (lesquelles sont typiquement bien identifiées et font l’objet de provisions) ainsi qu’un cadre institutionnel robuste qui comprend notamment un certain nombre de garde-fous (pas de monétisation de la dette publique) – facteurs qui devraient à terme permettre de maintenir les dépenses et la dette publique à des niveaux soutenables. L’effet de la volatilité des cours des matières premières sur les comptes publics est aussi atténué en partie par la règle budgétaire, laquelle devrait être encore renforcée.[2]
Cependant, l’on dénombre trois vecteurs de risque qui pourraient – s’ils ne font pas l’objet d’une attention particulière – accentuer les inquiétudes pesant sur les finances publiques :
- si aucun effort n’est déployé pour rétablir la crédibilité de l’action publique sur le plan budgétaire en procédant notamment à une révision des objectifs de moyen terme sur la base d’hypothèses macroéconomiques plus conservatrices.
- si les gouvernements futurs sont incapables de générer des sources nouvelles et pérennes de revenus, auquel cas un risque de dérapage budgétaire pourrait se matérialiser (si les recettes et la croissance enregistrent des performances décevantes ou si les futurs gouvernements n’adhèrent pas au plan budgétaire actuel, un scénario fort envisageable au vu des mutations structurelles à l’œuvre au sein du paysage politique (appendice 3)).
- si peu d’efforts sont faits pour combler le fossé entre les attentes sociales et la réalité (social expectation gap).
Si elle ne s’emploie pas à relever ces défis, la Colombie pourrait peiner à apaiser les agences de notation et à renforcer la confiance des investisseurs. Cela pourrait à terme compromettre sa capacité à conserver un accès au marché à des conditions favorables.
Pour répondre aux aspirations du MTFF, à savoir favoriser un cercle vertueux entre le social, l’économique et le budgétaire, la priorité pour la Colombie devrait être de se focaliser sur l’amélioration du pacte social existant et le renforcement des mécanismes de dialogue social. Des économistes du FMI font remarquer qu’au lendemain de la pandémie, entre l’augmentation de la pauvreté et la défiance croissante à l’égard des institutions dirigeantes, les pays susceptibles d’arborer les meilleures perspectives (tant sur le plan la croissance que de la capacité à réformer) seront ceux les plus à même de se retrouver autour d’un pacte budgétaire – produit d’un large consensus social et d’une forte cohésion politique autour de questions essentielles touchant aux finances publiques.[3]
Une telle feuille de route permettrait, dans le cas de la Colombie, de contrer en partie les trois vecteurs de risque susmentionnés. Le FMI souligne la nécessité de renforcer le dialogue social pour discuter « des mesures à mettre en place pour élargir les filets de sécurité sociale […] », adresser la question de « leur financement, afin d’évaluer les préférences de la société aussi bien sur le plan fiscal que sur celui des dépenses. Ce dialogue public devrait servir de fondement aux processus législatifs qui auront lieu au cours des deux prochaines années – lesquels se porteront sur la révision des systèmes de retraite, de santé et d’éducation et la réforme des cadres budgétaires destinés à les soutenir ». Les auteurs du rapport soulignent par ailleurs l’importance d’améliorer l’efficacité et la flexibilité des cadres de responsabilité budgétaires : « l’adoption formelle de cibles budgétaires, la mise en place ou le renforcement des organismes de supervision de la politique budgétaire, et le perfectionnement des stratégies de communication amélioreront l’efficacité de l’action publique et réduiront les risques budgétaires – permettant en retour le maintien des taux d’intérêt à des niveaux bas et l’élargissement des marges de manœuvre budgétaires ». À cet égard, la modification récente de la règle budgétaire représente un pas dans le bon sens. Un calibrage plus conservateur des plans budgétaires à moyen terme et la création (comme le préconise l’OCDE) d’un organisme indépendant de contrôle (independent fiscal council), chargé de prévoir et chiffrer l’impact des mesures de politique budgétaire à des horizons proches et lointains ne feraient que renforcer la crédibilité de l’action publique.
Achevé de rédiger le 16 février 2022