Perspectives économiques
Le PIB belge a enregistré une croissance trimestrielle de 0,5% au T1 2022, portée par un rebond de l’investissement et de la consommation privée. Toutefois, les pressions sur les prix et les incertitudes géopolitiques pèsent fortement sur les perspectives économiques. Le PIB devrait rester atone au cours de l'été et il ne repartirait à la hausse qu'à la fin de l'année, lorsque l'inflation aura atteint son point d'inflexion. La croissance attendue de 2,3% sur l'ensemble de l’année semble attester de la vigueur de l'économie mais près de 2% de cette croissance est attribuable à un effet de base élevé dû à la vigueur de la reprise en 2021. Nous tablons sur une normalisation progressive de la croissance du PIB et de l'inflation vers la fin 2023.
Les ménages pénalisés
L'IPC a progressé de 9,9% a/a en mai, un record historique. L'IPCH pour le même mois devrait battre le record de février, l'estimation flash s’établissant actuellement également à 9,9%. Pour l'heure, les prix de l'énergie restent la cause principale de cette évolution. Toutefois, les prix des denrées alimentaires sont également en forte augmentation, avec une hausse de 1% en moyenne par mois depuis le début de l’année. L'inflation sous-jacente devrait atteindre son point haut juste après la fin de l'été.
Tous les ménages ne sont pas pénalisés dans la même proportion par la hausse des prix. Une étude récente de la banque centrale (BNB) montre que pour les ménages du quintile de revenu le plus bas, le taux d'inflation est supérieur de 1% à celui des quintiles les plus élevés, bien que certaines mesures, telles que les tarifs sociaux, aient permis d’atténuer les effets de l'inflation. La BNB souligne que l'accroissement du revenu réel restera positif en 2022 grâce à la hausse de l'emploi. Le revenu réel par habitant devrait toutefois rester atone. Contrairement à la situation qui prévaut globalement dans la zone euro, les salaires réels en Belgique devraient enregistrer une hausse significative (4,5%) sur 2022-2024, dont la majeure partie aura lieu en 2023.
L’épargne cumulée (forcée) est principalement détenue par les ménages à haut revenu. Or, ceux-ci ne devraient pas contribuer beaucoup à la consommation du fait de leur plus forte propension à épargner.
À court terme, la situation actuelle devrait déprimer la consommation. Malgré le retour aux niveaux pré-covid des dépenses nominales en mai (d’après nos indicateurs internes), la situation reste préoccupante. En volume, la consommation privée, première composante du PIB total, reste en deçà de son niveau pré-pandémie, et nous prévoyons une nouvelle détérioration en raison de la perte de pouvoir d'achat, avant une stabilisation à la fin de l'année.
Entreprises : l’investissement devrait croître
Les investissements des entreprises non financières ont progressé de presque 3% au T1 2022. Cette dynamique devrait perdurer, un nombre plus faible d'entreprises évoquant les pénuries de main-d'œuvre ou d'équipements comme un frein à la production. Plus particulièrement, les entreprises du secteur manufacturier, qui connaissent des taux d'utilisation élevés, seront sans doute en mesure d'accroître leurs capacités de production à court terme.
Les coûts salariaux horaires pourraient connaître une augmentation de 12% sur la période 2022-2023, une évolution due presque entièrement au mécanisme d'indexation salariale. Sur la même période, on pourrait assister à une détérioration d'environ 5% de l'écart salarial avec la France, l'Allemagne et les Pays-Bas.
Une étude récente de la BNB sur les micro-entreprises belges fournit une estimation de la capacité des entreprises à répercuter la hausse des coûts sur leurs prix. Elle est estimée à 60% et elle est généralement plus élevée pour les entreprises sensibles aux coûts énergétiques. La majorité des entreprises belges qui participent à l'enquête de confiance des entreprises signalent également leur intention de relever leurs prix de vente au cours des trois prochains mois. Au total, les marges bénéficiaires devraient diminuer quelque peu, mais rester supérieures à leur moyenne à long terme sur l'ensemble de la période de prévision, ce qui est favorable à l’investissement et peut aussi expliquer le nombre encore contenu des faillites.
Finances publiques : un assainissement est nécessaire
Les perspectives demeurent négatives du point de vue des finances publiques. Les mesures de soutien des revenus visant à lutter contre la hausse des prix de l'énergie, le coût de la campagne de rappel vaccinal et les dépenses liées aux réfugiés ukrainiens ont contribué à la hausse des dépenses publiques. Le déficit ne devrait pas être ramené en deçà du seuil de 3% en 2023. Un nouvel assainissement budgétaire est toutefois nécessaire, la hausse des taux d’intérêt ayant cessé d'être une perspective lointaine.