Eco Perspectives

En réponse à l'inflation, un resserrement monétaire et budgétaire coordonné

29/06/2022
PDF

Après avoir été pénalisée par le variant Omicron, l’activité économique est repartie à la hausse dès le mois de février et devrait continuer de progresser, permettant à la croissance d’atteindre 4% en 2022. À son corps défendant, la Norvège est la grande gagnante de la guerre en Ukraine grâce à la hausse substantielle de ses rentes pétro-gazières qui devraient atteindre NOK 1 500 mds en 2022 (environ EUR 143 mds). Malgré une inflation plus modérée que dans les autres pays européens, la Banque centrale norvégienne s’est dite déterminée à resserrer autant que nécessaire les conditions monétaires pour casser la dynamique inflationniste. Pour ramener l’inflation à sa cible, la NorgesBank prévoit de relever, progressivement, son taux de dépôt jusqu’à 2,5% d’ici la fin 2023.

La Norvège a été sévèrement touchée par le variant Omicron en dépit des mesures sanitaires préventives mises en place fin 2021. L’activité a pâti de ces restrictions et le PIB mainland (hors activités pétrolières) a baissé de -1% (m/m) au mois de janvier avant de se redresser en février (+0,6% m/m), puis en mars (+1,2% m/m). Sur l’ensemble du 1er trimestre 2022, le PIB a reculé de -0,6% t/t mais il reste bien supérieur à son niveau d’avant-crise (à hauteur de 2,7%). En tant que producteur d’énergie (8e producteur mondial de gaz naturel, 15e producteur mondial de pétrole), la Norvège est très peu dépendante de la Russie (moins de 8% de sa consommation d’énergie) et, par extension, elle est peu touchée, de ce point de vue, par le conflit russo-ukrainien. Le pays fait même figure, à son corps défendant, de grand gagnant de cette crise, car il bénéficie à la fois des hausses des prix de l’énergie et de nouvelles commandes de la part des pays souhaitant diversifier leurs approvisionnements. La banque Nordea estime que les revenus pétro-gaziers devraient atteindre presque NOK 1 500 mds en 2022 (soit environ EUR 143 mds).

NORVÈGE : INDICATEURS D’ACTIVITÉ
CROISSANCE ET INFLATION

Comparativement aux autres pays européens, la Norvège est bien moins touchée par la montée de l’inflation (+6,2% en mai 2022 sur un an, contre 8,1% en zone euro). Malgré une inflation plus modérée, le gouvernement a mis en place plusieurs mesures de soutien au pouvoir d’achat : subventions directes, réduction des taxes sur l’électricité, augmentation des allocations logement. Le coût total de ces mesures devrait frôler NOK 9 mds (soit EUR 860 mns). Le taux de chômage norvégien évolue, par ailleurs, à un niveau très bas (2,9% en mars 2022) et la hausse sensible du nombre d’emplois vacants (+41,4% a/a au T1) accroit le pouvoir de négociation des salariés.

Les organisations syndicales et les dirigeants d’entreprises anticipent une hausse des salaires de 4% en 2022 d’après l’enquête trimestrielle de la Banque centrale du T2 2022 (NorgesBank). Grâce à une détérioration limitée du pouvoir d’achat, la consommation des ménages conserve une bonne dynamique (+0,6% m/m en avril), et dépasse très largement son niveau d’avant-crise (+4,8% par rapport à fin 2019).

Face aux pressions inflationnistes, la NorgesBank a été une des premières banques centrales à entamer une normalisation de sa politique monétaire. Alors que son taux directeur était à 0% jusqu’en septembre 2021, elle a depuis opéré trois hausses de 25 points de base (pb). Mais compte tenu de l’accélération plus rapide que prévu des prix, l’institut national de statistique (SSB) s’attend à une hausse inédite de 50 pb à la fin du mois de juin (plus forte hausse depuis une décennie). Pour être en ligne avec son objectif de stabilité des prix, soit une inflation sous-jacente proche de 2% à moyen terme, la Banque centrale a d’ores et déjà annoncé que son taux de dépôt devrait atteindre 2,5% à la fin 2023. Dans le même temps, le gouvernement a déclaré qu’il ferait aussi sa part du travail pour contenir l’inflation en limitant l’augmentation des dépenses publiques. Cela passera notamment par la suspension de plusieurs projets de construction. La Norvège se distingue ainsi par une coordination du levier monétaire et budgétaire (Policy Mix) tandis que la plupart des pays européens engagent encore des mesures de soutien.

LES ÉCONOMISTES AYANT PARTICIPÉ À CET ARTICLE

Découvrir les autres articles de la publication

Global
Les inquiétudes sur les perspectives de croissance grandissent

Les inquiétudes sur les perspectives de croissance grandissent

Aux États-Unis comme dans la zone euro, le niveau d’activité est très élevé mais la croissance a déjà nettement marqué le pas. Elle devrait rester faible en glissement trimestriel jusqu’à la fin de l’année [...]

LIRE L'ARTICLE
États-Unis
Accélération de la normalisation monétaire

Accélération de la normalisation monétaire

Le rebond inattendu de l’inflation en mai a contraint la Réserve fédérale des États-Unis (Fed) à accélérer la normalisation de sa politique monétaire [...]

LIRE L'ARTICLE
Chine
Dégradation des perspectives de croissance

Dégradation des perspectives de croissance

L’activité s’est contractée en avril et mai 2022 en raison de sévères restrictions à la mobilité imposées dans des régions industrielles comme Shanghai [...]

LIRE L'ARTICLE
Japon
Une singularité assumée, mais jusqu'à quand ?

Une singularité assumée, mais jusqu'à quand ?

Depuis le début de l’année 2022, le Japon fait face à une remontée de l’inflation, certes modérée, mais inédite depuis 2014, tandis que sa croissance a reculé au T1 [...]

LIRE L'ARTICLE
Zone euro
Plus d’inflation que de croissance

Plus d’inflation que de croissance

Jusqu’ici relativement résistante aux chocs, la croissance de la zone euro devrait plus nettement ralentir dans les prochains mois [...]

LIRE L'ARTICLE
Allemagne
Après l'inflation importée, l'inflation domestique ?

Après l'inflation importée, l'inflation domestique ?

L’Allemagne fait partie des pays de la zone euro les plus touchés par le conflit russo-ukrainien, ce qui se traduit par de faibles perspectives de croissance et une inflation élevée [...]

LIRE L'ARTICLE
France
Un choc de pouvoir d’achat dilué, mais bien présent

Un choc de pouvoir d’achat dilué, mais bien présent

L’économie française est prise en étau entre trois évolutions aux effets divergents : un choc inflationniste qui pèse sur la consommation des ménages, un choc d’offre négatif (contraintes d’approvisionnement dans l’industrie) et la levée des restrictions sanitaires (qui bénéficie à la croissance à partir du 2e trimestre, après avoir pesé au 1er). Les mesures gouvernementales, qui ont limité l’inflation, n’ont pas empêché une croissance négative au 1er trimestre. Toutefois, l’impact positif de la levée des restrictions sanitaires et un rebond du pouvoir d’achat devraient permettre le retour à une croissance positive au 3e trimestre (+0,3% t/t). [...]

LIRE L'ARTICLE
Italie
Une reprise de meilleure qualité dans un monde plus complexe

Une reprise de meilleure qualité dans un monde plus complexe

À la différence des précédentes récessions, l’économie italienne a déjà rattrapé le terrain perdu en 2020. L’acquis de croissance pour 2022 s’élève à 2,6 % après que le PIB ait progressé de 0,1% au T1 2022 [...]

LIRE L'ARTICLE
Espagne
Bonne résistance aux chocs

Bonne résistance aux chocs

Après un rebond d’activité en 2021 plus faible que ses voisins européens, l’Espagne devrait connaitre un taux de croissance soutenu en 2022, supérieur à 4% [...]

LIRE L'ARTICLE
Pays-Bas
De l'inflation au-delà des prix à la consommation

De l'inflation au-delà des prix à la consommation

Avec un mix énergétique composé à près de 90% d’énergies fossiles, les Pays-Bas sont touchés de plein fouet par la forte hausse des prix du gaz et du pétrole depuis le début du conflit russo-ukrainien [...]

LIRE L'ARTICLE
Belgique
En attendant le rebond

En attendant le rebond

Le PIB belge a progressé de 0,5% au premier trimestre 2022, tandis que l’inflation continue de battre des records. La confiance des ménages a été mise à mal au début de l’invasion russe en Ukraine, ce qui pourrait plomber la croissance du PIB belge [...]

LIRE L'ARTICLE
Grèce
Des perspectives toujours encourageantes

Des perspectives toujours encourageantes

À plus de 10% au printemps, l’inflation constituera le principal frein à l’activité en Grèce en 2022. L’économie a néanmoins bien résisté jusqu’à présent [...]

LIRE L'ARTICLE
Royaume-Uni
Au bord de la récession ?

Au bord de la récession ?

L’inflation se poursuit, portée par les singularités de l’économie britannique [...]

LIRE L'ARTICLE
Danemark
Souveraineté industrielle : du rêve à la réalité

Souveraineté industrielle : du rêve à la réalité

Le Danemark se singularise par une reprise économique bien plus forte que dans les autres pays européens. L’économie danoise a ainsi retrouvé très vite son niveau d’avant-crise, et même dépassé sa trajectoire de croissance pré-pandémie [...]

LIRE L'ARTICLE