Cette dynamique inflationniste pèse sur le pouvoir d’achat des ménages (-1,8% t/t au 1er trimestre selon l’Insee) et leur consommation (-1,5% t/t). La baisse du pouvoir d’achat a été limitée par les mesures adoptées par le gouvernement mais non évitée. Le gel du tarif réglementé du gaz au niveau d’octobre 2021, la hausse plafonnée à 4% de celui de l’électricité en février 2022 et la ristourne de 18 centimes par litre sur le carburant (jusqu’en juillet 2022, et probablement prorogée) ont évité deux points d’inflation (selon nos estimations et celles de l’Insee). Toutefois, ce n’est qu’à partir du 3e trimestre qu’un rebond du pouvoir d’achat devrait survenir (+0,9% t/t selon nos prévisions). Un nouveau paquet de mesures est attendu dans les prochaines semaines, dont la hausse du traitement des fonctionnaires et celle des retraites (coûts respectifs de EUR 4 mds et EUR 5 mds en 2022 avec une hypothèse à +4% d’augmentation) et la perspective d’un chèque alimentation ponctuel en septembre (que nous estimons à EUR 1,2 md). En définitive, la perte de pouvoir d’achat atteindrait 0,8% en 2022 selon nos estimations, un chiffre légèrement moindre qu’en 2013 (-1,1%), le pire de l’histoire, mais avec une cause différente, puisque c’est l’accroissement de la fiscalité qui l’avait à l’époque pénalisé. En 2022, selon nos calculs, l’action du gouvernement est inversement favorable, puisque la perte de pouvoir d’achat aurait pu atteindre 3,1% sans les mesures anti-inflation.
Conséquence de ce choc inflationniste, plus important que précédemment anticipé, notre prévision de croissance pour 2022 est nettement revue à la baisse, de 0,9 point de pourcentage, à 2,3% en moyenne annuelle.
L’existence de relais de croissance
Pour atteindre ce chiffre, la croissance française devrait progressivement se renforcer. Nous anticipons une croissance nulle au 2e trimestre et un léger rebond de 0,3% t/t au 3e trimestre. Ce n’est nullement parce que le choc inflationniste cesserait de peser, même s’il devrait moins peser, mais parce que des relais de croissance vont se manifester. La normalisation de l’économie post-Covid reste partielle et la levée des restrictions sanitaires à partir de février 2022 devrait la favoriser. Il est ainsi probable que le secteur de l’hébergement-restauration et les services de transport retrouvent, d’ici au 3e trimestre, leur niveau de consommation d’avant-Covid.
En parallèle, l’aéronautique a nettement contribué à la croissance des exportations dès le 1er trimestre. À partir du 2e trimestre, le tourisme devrait s’y ajouter. Par exemple, le Grand Paris a accueilli près de 12,1 millions de touristes entre janvier et mai, dont 80% sont des étrangers (contre 3,7 millions et 15,1 millions sur la même période de 2021 et 2019). Certes, ces deux éléments vont masquer une dynamique des autres postes d’exportation plus mitigée (en adéquation avec une croissance qui ralentit également dans les autres pays, notamment en zone euro), mais ils devraient permettre de maintenir les exportations en croissance.
Ces relais devraient permettre à l’économie française de renouer avec la croissance à partir du 3e trimestre et la soutenir de façon plus modérée par la suite. Il sera donc nécessaire que les déterminants fondamentaux de la croissance - la consommation des ménages et l’investissement - se raffermissent pour qu’elle dure.