La reprise, en dépit du ralentissement européen
La reprise économique se poursuit, et reste, à ce stade, globalement en ligne avec le scénario des créanciers et des institutions internationales. Après 1,4% en 2017, la croissance a accéléré à 1,9% en 2018, s’établissant ainsi dans la partie basse des anticipations, qui tablent sur une croissance annuelle comprise entre 2% et 2,5% au cours des années qui suivront la fin du programme d’ajustement. L’an dernier, l'activité a été principalement tirée par le rebond des exportations de biens et services et par la forte croissance de la consommation privée. Fin 2018 et début 2019, ces deux moteurs ont toutefois ralenti et ramené la croissance du PIB à 1,3% g.a. au T1 2019. Les enquêtes suggèrent également que le climat des affaires et la confiance restent bien orientés mais ils ne se sont plus améliorés au printemps.
Il est toutefois probable que le soutien des ménages à la croissance se maintienne, voire se renforce, au cours des prochains trimestres. La croissance de leur pouvoir d’achat est en effet soutenue par celle de l’emploi (2,1% g.a. en mars) et par la faiblesse de l’inflation (0,6% en mai). Au cours des prochains trimestres, les revenus bénéficieront également de l'augmentation des salaires minimums (10,9%), mise en place début 2019 malgré le taux de chômage toujours très élevé (18,1% en mars), et d'un ensemble de mesures en faveur des ménages prises par le gouvernement Tsipras début mai, à quelques jours des élections européennes. Freinée par le ralentissement conjoncturel européen, la contribution du commerce extérieur devrait diminuer quelque peu, malgré les bonnes performances attendues du tourisme. Portée par des effets de rattrapage puissants, la croissance devrait s’établir au-dessus de 2% en moyenne au cours des prochaines années. Pour 2019, notre prévision de hausse du PIB de 2,4% est toutefois assortie d’un risque clairement baissier.
Alternance politique
À la suite des mauvaises performances de son parti aux élections européennes et locales[1], Alexis Tsipras s’est résolu à convoquer les élections législatives anticipées du 7 juillet dernier. Sans surprise, elles ont été assez largement remportées par le parti de centre-droit Nouvelle Démocratie (ND) avec un peu moins de 40% des suffrages[2], presque 32% à Syriza. Compte tenu de la prime électorale de 50 députés accordée au parti vainqueur, son leader, Kyriakos Mitsotakis, devrait disposer d’une majorité absolue relativement confortable à la Vouli, le Parlement grec.
Alors que, dans son dernier rapport de surveillance, la Commission européenne a fait part d’une certaine inquiétude quant à la taille et à la composition du paquet fiscal mis sur pied par le précédent gouvernement[3], le raccourcissement de la période pré-électorale a permis de limiter la pression et les risques qu’une campagne fait peser sur les finances publiques. La plate-forme électorale de ND mettait l’accent sur l’allègement de la bureaucratie et la baisse des taxes, mais sans remettre en cause la trajectoire budgétaire élaborée à la sortie du programme de financement sous la pression des créanciers, et la nécessité de s’y conformer. De fait, l'excédent budgétaire grec a encore augmenté en 2018 pour atteindre 1,1% du PIB. Au même moment, le ratio d'endettement a culminé à 181,8% du PIB (EUR 334,6 mds), et devrait entamer une décrue, qui promet d’être longue, à compter de 2019. Le retour progressif de l’État grec sur le marché des capitaux est en cours, avec déjà deux émissions cette année à 5 et à 10 ans, pour un total EUR 5 mds. Dans un environnement favorable à la baisse des taux européens, les taux grecs à 10 ans étaient proches de 2,5% fin juin, en baisse d’environ 200 points de base depuis le début de 2019.