Edito

Le coronavirus et le profil de la croissance en 2020 : V, U ou L?

06/02/2020
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D'un point de vue économique, l'épidémie du coronavirus combine chocs de demande, d'offre et de confiance. Le poids de la Chine dans l'économie mondiale, sa contribution à la croissance du PIB mondial et son rôle dans les chaînes de valeur induisent des répercussions internationales bien plus profondes que la crise du SRAS en 2003. Il faut s’attendre à des chiffres économiques médiocres en février et mars. La vraie question est celle de savoir si une reprise apparaîtra dans les enquêtes en avril. Dans le cas inverse, on peut craindre un impact plus durable de l’épidémie sur l’économie, ce qui ouvrirait la voie à un scénario de reprise de type U. Un scénario en L semble encore peu probable, alors qu'une reprise en V suppose une baisse rapide des nouveaux cas de contamination.

Une reprise de la croissance mondiale de type J semblait se dessiner pour 2020. Non pas un J pentu, mais plutôt une croissance molle en début d'année, suivie d'une reprise progressive au second semestre grâce à un redressement des enquêtes de conjoncture, à une baisse de l’incertitude et à des conditions monétaires et financières accommodantes. L'épidémie de coronavirus a changé le scénario et, désormais, la question est de savoir si la reprise sera en V, en U ou en L.

Une reprise de la croissance mondiale de type J semblait se dessiner pour 2020. Non pas un J pentu, mais plutôt une croissance molle en début d'année, suivie d'une reprise progressive au second semestre grâce à un redressement des enquêtes de conjoncture, à une baisse de l’incertitude et à des conditions monétaires et financières accommodantes. L'épidémie de coronavirus a changé le scénario et, désormais, la question est de savoir si la reprise sera en V, en U ou en L.

D'un point de vue économique, l'épidémie combine chocs de demande, d'offre et de confiance. Du côté de la demande, on distingue différents canaux de transmission. La consommation des ménages chinois diminue, ces derniers étant confinés chez eux, souffrant d'une perte de revenu et de l’incertitude, et reportant donc les achats importants. Leurs voyages à l'étranger baissent ainsi que leurs achats de biens étrangers, de sorte que les importations diminuent. Les dépenses publiques augmenteront légèrement – i.e. les investissements en infrastructure de santé - et on ne peut pas exclure des mesures pour soutenir la croissance. L'investissement des entreprises aussi diminuera en raison de la baisse de la demande et, en particulier, d'une incertitude accrue.

La baisse des importations et du tourisme chinois affectent les exportations, et donc le PIB du reste du monde. Les effets sectoriels peuvent être considérables (tourisme, restauration, informatique, matières premières, industrie automobile, etc.).

Les pays, dont les exportations vers la Chine baissent, importeront à leur tour moins d'intrants intermédiaires destinés à leurs exportations. Pour évaluer l'exposition à un choc de croissance en Chine, il convient d’étudier la quantité de valeur ajoutée d'un pays dans la demande finale - demande intérieure et exportations - en Chine. Cette quantité peut à son tour être ramenée au PIB du pays concerné.

Comme le montre le graphique, ce ratio est très faible pour la plupart des pays. On estime que l'épidémie de SRAS, en 2003, a eu un impact de 1% du PIB chinois pour l'ensemble de l'année. Bien sûr, le poids de la Chine dans le PIB mondial est aujourd’hui démultiplié par rapport à 2003[1], mais, même en supposant une chute considérable de la croissance chinoise, le tableau montre un effet limité. Certes, les conséquences indirectes de l’épidémie, telles que les effets multiplicateurs négatifs, une baisse de confiance et une rupture d'approvisionnement, ne sont pas prises en compte.

VALEUR AJOUTÉE PAR PAYS DANS LA DEMANDE FINALE CHINOISE (EN % DU PIB DU PAYS D’ORIGINE)

Sur ce dernier point, la situation est très différente de celle de 2003 où il n'y a pas eu de fermeture d'usine en Chine. Les répercussions mondiales sont également beaucoup plus importantes en raison de l'intégration de la Chine dans les chaînes de valeur mondiales.

La multiplication d’illustrations anecdotiques de rupture d'approvisionnement en provenance de Chine, par exemple dans l’industrie de la téléphonie mobile ou l’automobile, touchant les entreprises occidentales, peuvent même conduire à une surestimation du véritable impact macroéconomique de l’épidémie.

Une épidémie est un choc temporaire. Toute la question est donc de savoir à quoi ressemblera la reprise. Sera-t-elle en V si le nombre de nouvelles victimes diminue rapidement, entraînant alors une chute rapide de l'incertitude, une demande inassouvie en Chine et le restockage, avec des répercussions mondiales positives ? Sera-t-elle en U si le pic de victimes est atteint plusieurs semaines plus tard, ce qui provoquerait une disruption plus durable de la consommation et de l'investissement des entreprises et pèserait sur les décisions d’embauches ? Les marchés financiers seraient également affectés. Ou bien une reprise en L, une version plus extrême qui stopperait net la croissance et ne laisserait entrevoir aucune reprise. Un tel scénario semble encore peu improbable. Il faut s’attendre à des chiffres médiocres en février et mars. La vraie question est celle de savoir si une reprise apparaîtra dans les enquêtes réalisées auprès des entreprises en avril. Dans le cas inverse, on peut craindre un impact plus durable de l’épidémie sur l’économie, ce qui ouvrirait la voie à un scénario de reprise de type U.

Une reprise de la croissance mondiale de type J semblait se dessiner pour 2020. L'épidémie de coronavirus a modifié le scénario et, désormais, la question est de savoir si la reprise sera en V, en U ou en L.

[1] Sur base des Perspectives de l’économie mondiale du FMI, la Chine représentait 4,3% du PIB mondial en 2003 et 16,5% en 2019.

LES ÉCONOMISTES AYANT PARTICIPÉ À CET ARTICLE

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