Au second semestre 2018, l’économie italienne est de nouveau entrée en récession, la troisième depuis dix ans. Le PIB réel a reculé de 0,1 % t/t au T3 et au T4. La contraction est le résultat de la contribution négative des stocks (-0,4 % au T4) et de l’atonie de la demande intérieure, tandis que les exportations nettes ont soutenu la progression du PIB. Elles ont augmenté davantage que les importations, ajoutant 0,4 % à la croissance globale au second semestre.
Récession sur fond de demande déprimée
Le ralentissement a principalement concerné les moteurs de la précédente reprise. En 2018, alors que les secteurs des services et la construction continuaient à se redresser modestement, dans le secteur manufacturier la valeur ajoutée a enregistré quatre contractions consécutives, le taux de croissance annuel passant de +5 % au T3 2017 à -1,1 % au T4 2018. La production automobile a reculé de plus de 15 % entre juillet et décembre.
Les conditions d’ensemble du marché du travail se sont encore dégradées. Le taux de chômage a dépassé les 10,5 %, tandis que celui des 15-24 ans est resté inchangé à 33 %. Remarquable depuis 2014, le redressement de l’emploi s’est interrompu, le nombre de personnes ayant un emploi étant resté quasiment stable, autour de 23,2 millions. La progression modeste du revenu et la légère hausse des prix à la consommation ont contribué à rogner le pouvoir d’achat des ménages (-0,7 % au second semestre 2018). Devant cette évolution décevante, la propension à épargner des ménages italiens a continué à diminuer, passant à 7,6 % au T4 2018.
Entre janvier et septembre 2018, le patrimoine financier des ménages a chuté de EUR 125 mds, à EUR 4 100 mds, soit une perte de près de EUR 2 000 par personne. Les ménages italiens ont fait preuve d’une extrême prudence dans leurs décisions de dépenses, entraînant une stagnation de la consommation au cours des trois derniers trimestres de 2018, ainsi que dans leurs décisions d’investissement en augmentant la part des placements en dépôts, épargne-retraite et produits d’assurance.
Au cours du second semestre 2018, les conditions économiques et financières des entreprises italiennes se sont légèrement détériorées, avec une rentabilité de nouveau en retrait. La valeur ajoutée des sociétés non financières a dépassé la barre des EUR 800 mds, un record depuis vingt ans. Cela n’a pas empêché l’excédent brut d’exploitation rapporté à la valeur ajoutée de reculer en dessous des 42 %. L’incertitude persistante entourant le scénario économique global a pesé sur le moral des chefs d’entreprises, qui n’a cessé de se replier depuis un an et demi, pour atteindre son plus bas niveau depuis le début de 2015. L’évolution de l’investissement est restée décevante, se maintenant à près de 20 points de pourcentage en dessous du niveau de 2008.
Creusement du déficit budgétaire
Le gouvernement italien a approuvé le Document économique et financier pour 2019. L’augmentation des investissements publics, le nouveau plan d’aide aux revenus, la révision du régime des retraites et toutes les autres mesures approuvées ou en cours de discussion devraient avoir, selon les estimations, un effet positif global sur l’économie avec une croissance supplémentaire de 0,1 %. En 2019, le PIB réel devrait croître de 0,2 %, contre une progression attendue de +1 % dans la loi de finances de décembre 2018, tandis que l’emploi devrait reculer de 0,2 % et le taux de chômage augmenter à 11 %. Le déficit structurel devrait croître, selon les estimations, à 1,5 % contre 1,4 % en 2018, et le ratio de la dette sur le PIB devrait atteindre 132,6 %.
La population baisse…
La crise financière et la récession qui ont frappé l’économie mondiale il y a plus de dix ans ont eu des répercussions néfastes et durables sur la démographie. L’envolée du chômage a découragé les projets d’enfants, entraînant une baisse plus rapide que prévu du taux de fécondité. En Europe, l’impact de la récession mondiale sur la fécondité est particulièrement marqué en Espagne, en Grèce et en Italie.
Au début de 2019, l’Italie comptait 60,4 millions d’habitants d’après les données de l’Istat, un chiffre en repli pour la quatrième année consécutive. Le nombre d’enfants par femme s’établit aujourd’hui à 1,32, avec des valeurs supérieures à la moyenne dans les régions septentrionales (autour de 1,37) et inférieures dans le sud (1,29 en moyenne, la Basilicate, le Molise et la Sardaigne enregistrant les chiffres les plus bas avec un enfant par femme environ). La baisse de la natalité s’est accompagnée d’une diminution de la mortalité, entraînant un net accroissement de l’espérance de vie à la naissance, de 66,5 ans en 1950-1955 à 83,26 en 2015-2020, un chiffre parmi les plus élevés au monde, après le Japon (84,0 ans), la Suisse (83,56) et l’Espagne (83,36).
… et vieillit
L’allongement de l’espérance de vie a, à son tour, entraîné un accroissement significatif de la proportion des personnes âgées : les plus de 65 ans, en particulier, représentent 22,8 % de la population italienne totale en 2019, contre 8,1 % à peine en 1950. Sur la même période, la tranche d’âge de 0 à 14 ans s’est repliée de 26,7 % à 13,2 %. Selon des estimations de l’Istat et de la Banque d’Italie, le taux de dépendance des personnes âgées (soit le rapport entre les plus de 65 ans et la population de 20 à 64 ans) a crû de 14,3 % en 1950 à 37,8 % en 2015 (dernière année disponible pour les comparaisons internationales), soit la valeur la plus élevée au monde après le Japon (46,2 %). Sur la même période, la part de la population en âge de travailler par rapport à la population totale, après avoir atteint le taux maximum de 70 % au début des années 1980, a commencé à se replier et, selon les dernières prévisions, elle atteindre un plus bas de 52,3 % en 2050.
La démographie a eu un impact négatif sur la croissance économique italienne au cours des 25 dernières années. C’est ce qui ressort de l’analyse du revenu par habitant au regard de trois facteurs : la production par personne ayant un emploi, le taux d’emploi et le rapport entre la population en âge de travailler et la population totale. Selon une estimation basée sur une série longue (de 1861 à 2016), le facteur qui a le plus contribué à la croissance du revenu par habitant a été la productivité, en particulier au cours des années 1950 et 1960. La contribution de cette variable est moins importante – voire quasiment nulle – depuis le début des années 2000. Le taux d’emploi a eu un impact positif sur la croissance, en particulier dans la deuxième moitié du 20e siècle, tandis que ce que l’on a appelé le « dividende démographique » (population en âge de travailler rapportée à la population totale), après avoir sensiblement contribué à la croissance au cours des années 1980, est devenu insignifiant depuis le début des années 1990.
Un défi démographique de taille
Selon des statistiques récentes de l’Istat, l’Italie va connaître une réduction progressive des cohortes de personnes en âge de procréer (14-50 ans) dans les prochaines années et une augmentation des cohortes de personnes âgées (plus de 65 ans). Cela devrait se traduire par un allongement de l’espérance de vie à la naissance, à 86,1 ans pour les hommes et à 90,2 ans pour les femmes à horizon 2065. La population devrait rester stable à l’horizon 2025, mais elle connaîtra un repli notable en 2045. Elle devrait alors s’établir à 59 millions d’habitants, un repli qui pourrait se confirmer en 2065 avec une nouvelle baisse de 4,5 millions d’habitants (à 54,1 millions).
En 2025, la population italienne en âge de travailler devrait reculer à 63,2 % de la population totale, contre 64 % en 2019. On s’attend à une chute notable dans le deuxième segment des prévisions (de 2025 à 2045), à l’issue duquel les personnes en âge de travailler devraient représenter un peu plus de la moitié de la population totale (54,5 %) ; l’âge moyen de la population serait alors de 50 ans. En 2045, un Italien sur trois environ aura plus de 65 ans.