Initialement estimée à +0,1% t/t, la croissance de la zone euro au T1 2023 est désormais légèrement négative, à -0,1% (après un recul de même ampleur au T4 2022). Cette révision en baisse a été entraînée par celle de la croissance allemande. La succession de deux trimestres de baisse du PIB caractérise une récession « technique », ce dont il s’agit à ce stade : la contraction du PIB est de faible ampleur et n’est pas généralisée à l’ensemble des composantes de la croissance ni aux États-membres. La consommation des ménages a certes reculé pour le deuxième trimestre d’affilée (-0,3% au T1 après -1% t/t au T4) mais c’est la forte baisse de la consommation publique (en Allemagne), en plus de la contribution très négative des variations de stocks, qui a fait basculer dans le rouge le chiffre du T1. Ces deux évolutions étant probablement ponctuelles, on peut s’attendre à un rebond technique au T2. Nous prévoyons +0,2% t/t. Notre modèle nowcast est toutefois moins positif (croissance nulle estimée) et pointe un risque baissier sur cette prévision.
Hormis la confiance des consommateurs qui s’est, à nouveau, légèrement redressée en mai, les enquêtes sur le climat des affaires ont toutes évolué négativement. Du côté de l’indice du sentiment économique de la Commission européenne (ESI), la baisse a été la plus prononcée dans le commerce de détail, puis dans les services, l’industrie et, dans une moindre mesure, la construction. Dans l’industrie, pour l’ESI comme pour le PMI composite, il s’agit de la quatrième baisse d’affilée. À 44,8, le PMI composite manufacturier se situe très nettement en zone de contraction de l’activité et à un plus bas depuis la mi-2012 (hors période Covid-19). Le PMI services est nettement plus haut, à 55,1, mais il s’est légèrement détérioré en mai, pour la première fois depuis novembre 2022.
La situation sur le marché du travail reste positive : poursuite de la baisse du taux de chômage (-0,1 point à 6,5% en avril), créations d’emplois dynamiques (+0,6% t/t au T1 2023), composante « emplois » du PMI confortablement en zone d’expansion (53,8), inquiétudes modérées des ménages concernant l’évolution future du chômage.
Les nouvelles sur le front de l’inflation ont été positives en mai : le headline a baissé de 0,9 point (à 6,1% a/a) et l’inflation sous-jacente de 0,3 point (à 5,3%). Le reflux de cette dernière semble amorcé à son tour mais, comme le souligne Isabel Schnabel, il ne suffit pas que l’inflation sous-jacente ait passé son pic pour clamer victoire. Dans ce contexte, la BCE a opté pour une nouvelle hausse de 25 pb de ses taux directeurs en juin (portant le taux de dépôt à 3,50%). Elle ne devrait pas s’arrêter là : un nouveau relèvement de 25 pb en juillet est hautement probable et, même si l’incertitude augmente, nous anticipons une ultime hausse de même ampleur en septembre.
Hélène Baudchon (achevé de rédiger le 21/06/2023)