Comme la grande majorité des économies, le Japon entrera en récession en 2020. Le rebond anticipé en 2021 pourrait être relativement limité. Les derniers indicateurs conjoncturels font état d’une situation économique encore nettement dégradée par rapport à une période normale. Le levier budgétaire est actionné, une nouvelle fois, dans une ampleur importante. Le risque de hausse des coûts de financement en lien avec la hausse attendue de la dette publique devrait être largement atténué par la politique monétaire menée par la Banque du Japon, notamment par le biais de la Yield Curve Control.
Le choc pandémique de la Covid-19 intervient alors que la croissance japonaise était déjà fragilisée. Au T4 2019, la hausse du taux de TVA ainsi que le passage d’un violent typhon avaient sensiblement affaibli la demande interne.
Une nouvelle année difficile sur le front économique
Après avoir baissé de 1,9% au T4 2019 en rythme trimestriel (t/t), le PIB japonais s’est contracté de 0,6% au T1 2020. Cette baisse s’explique par un nouveau repli de la consommation des ménages et un recul très marqué des exportations. Le T2 2020 devrait être nettement plus dégradé avec une chute du PIB de l’ordre de 5% (t/t). En effet, les dernières informations dont nous disposons font état de grandes difficultés.
L’indicateur Tankan de la Banque du Japon (cf. graphique 1) atteint des niveaux historiquement faibles dans le secteur manufacturier comme dans le secteur non manufacturier. Après un point bas atteint en avril, l’indice des directeurs d’achat (PMI) composite s’est redressé suite à la levée de l’état d’urgence dans l’ensemble du pays à la fin du mois de mai. L’activité économique reste toutefois très détériorée. Le PMI composite japonais était de seulement 38 en juin 2020, après 28 et 26 respectivement en mai en avril.
Au total, nous anticipons une récession au Japon de l’ordre de 5% en 2020 avant un rebond, relativement timide, en 2021 de +2,1%.
Stimulus budgétaire et soutien monétaire
Pour limiter les conséquences négatives de la crise actuelle sur son économie, le gouvernement a mis en place un plan de soutien budgétaire d’ampleur. Le package global, de l’ordre de 20% du PIB, recouvre des soutiens directs aux ménages et aux entreprises ou des transferts vers les gouvernements locaux. Selon les estimations du Fonds monétaire international (FMI)[1], la dette publique japonaise, qui était déjà la plus élevée au monde avant la pandémie, atteindrait 252% du PIB cette année. Le risque de liquidité ou de solvabilité demeure néanmoins limité car cette dette est détenue dans l’immense majorité par des agents économiques locaux et bénéficie d’une politique monétaire accommodante. À ce titre, la Banque du Japon a amplifié ses mesures d’assouplissement quantitatif. En particulier, l’une de ses missions principales sera d’utiliser l’outil de Yield curve control (YCC) afin d’éviter une hausse du coût de financement pour l’Etat japonais. Cette idée est corroborée par le dernier communiqué de politique monétaire de la Banque[2]. Par ailleurs, le plafond d’achat d’ETF (Exchange traded fund) a été doublé. Le bilan de la Banque, déjà à 100% du PIB japonais, continue donc de progresser. Ces dynamiques s’inscrivent dans un contexte de risque de déflation, dont le Japon a longuement pâti dans son histoire économique.