Malgré une bonne gestion de l’épidémie, la Grèce ne va pas échapper à une forte récession en 2020. Le tourisme, qui compte pour près de 20% de l’activité du pays, n’offre aucune certitude de reprise solide. Les risques d’une résurgence de foyers épidémiques en Europe vont peser sur ce secteur pendant de nombreux mois encore. Le système bancaire grec va être davantage fragilisé et la dette publique va s’accroître fortement. Cependant, le soutien de la Banque centrale européenne a été renforcé en mars avec la création du PEPP, qui permet à la BCE d’acheter de la dette souveraine grecque. Les taux souverains sont restés sous contrôle. Dans un tel contexte, l’élaboration d’un plan de relance devrait inciter le gouvernement à développer de nouveaux secteurs, détachés du tourisme.
La Grèce est une des nations européennes ayant le mieux géré l’épidémie de Covid-19. Le pays enregistrait début juillet moins de 200 décès liés au virus et un taux de contamination par habitant parmi les plus bas d’Europe. Le plan de déconfinement, enclenché le 4 mai, et qui s’est étalé sur une période 45 jours, est maintenant terminé. Depuis le 1er juillet, le pays a rouvert ses frontières aux touristes étrangers venant de 14 pays extérieurs à l’UE, en excluant cependant les voyageurs en provenance des Etats-Unis, de la Chine, du Brésil et de la Russie.
Malgré cette bonne gestion, l’économie grecque va être fortement impactée sur le plan économique. La contraction du PIB était contenue au T1 (-1,6% t/t), en raison de la mise en place d’un confinement strict tard dans le trimestre (23 mars). Néanmoins, le secteur touristique était à l’arrêt et la consommation a chuté brutalement en avril, les ventes au détail ayant enregistré une baisse mensuelle record de 27,6%. L’indice des directeurs d’achat (PMI) pour le secteur manufacturier a remonté en juin (49,4) mais continue d’indiquer une faible activité. Selon la Commission européenne, le PIB chutera de 9,0% en 2020, avant un rebond de 6,0% en 2021.
En réponse à la crise, le gouvernement a mis en place un programme budgétaire à hauteur de 10% du PIB[1]. Ce plan inclut des aides pour le secteur de la santé, des suspensions de charges sociales et de TVA, une aide de 800 euros[2] pour les employés sans activité en raison de l’épidémie, une extension de l’assurance chômage, ainsi que des prêts garantis par l’Etat via la Banque hellénique pour le développement.
Le premier ministre Kyriakos Mitsotakis a, par la suite, présenté un plan de relance de EUR 24 mds centré sur le tourisme. Ce plan prévoit notamment la baisse de la TVA de 24% à 13% sur les tickets de transport (ferries, avions, bus) ainsi que sur les boissons non alcoolisées. Le gouvernement continuera de subventionner une partie des salaires des employés affectés grandement par la crise, en s’appuyant notamment sur le programme européen SURE. [3]
L’évolution du marché du travail sera évidemment scrutée de près. Le taux de chômage avait chuté en février sous la barre des 16%, son niveau le plus bas en neuf ans. Le gouvernement table sur une remontée du chômage autour de 20% à la fin de cette année.[4]
En effet, le rebond de l’activité touristique reste très incertain. Le manque de contrôle de l’épidémie aux Etats-Unis, en Inde, au Brésil et en Russie, a déjà contraint l’Union européenne à interdire toute arrivée de touristes en provenance de ces pays. Si une résurgence de l’épidémie apparaissait en Europe (comme entrevu au Portugal, en Espagne et en Allemagne), cela obligerait le gouvernement à imposer de nouvelles restrictions, réduisant plus encore l’activité.
La crise du covid-19 va davantage fragiliser le secteur bancaire. Bien qu’ayant diminué ces dernières années, les prêts non-performants représentaient encore 36,45% de l’encours des prêts des banques grecques à la fin 2019, selon le FMI. Le programme de titrisation bancaire mis en place à l’automne dernier (Hercules), et qui avait pour objectif de réduire les encours douteux détenus par les banques au-dessous de 20% d’ici à la fin 2021, va être perturbé. Les taux souverains grecs sont néanmoins restés contenus, en partie grâce à l’appui de la BCE et du programme d’achat d’actifs pandémie (PEPP) lancé par l’institution de Francfort en mars. La dette souveraine grecque fait partie des actifs éligibles à l’achat. La Commission européenne prévoit désormais un déficit budgétaire de 6,4% du PIB en 2020, qui se réduirait ensuite à -2,1% en 2021. Le ratio de dette sur PIB grimperait ainsi de 176,6% en 2019 à 196,4% en 2020, avant de baisser à 182,6% en 2021.