Après la récession la plus sévère de l’histoire récente, l’activité économique se redresse sous l’effet du déconfinement progressif mis en œuvre en Suisse et dans les pays voisins. L’orientation exceptionnellement accommodante de la politique monétaire et budgétaire helvète est également favorable à la reprise économique. Les PME ont recouru au programme de prêts spéciaux et les salariés ont bénéficié du dispositif de chômage à temps partiel. Pour autant, la reprise sera lente et l’activité économique ne devrait pas retrouver ses niveaux d’avant-crise d’ici à la fin 2022. Le gouvernement est convaincu que la dette liée à l’épidémie de Covid-19 pourra être remboursée sans qu’il soit nécessaire d’augmenter les impôts.
Le creux de la récession a été atteint en avril
Le coronavirus et les mesures adoptées pour endiguer la pandémie ont abouti à la pire récession de l’histoire récente. Avec la mise en place de mesures de confinement, des pans entiers de l’économie ont été mis à l’arrêt. Alors même que ces mesures ne sont entrées en vigueur qu’en mars, le PIB s’est replié de 2,6 % au premier trimestre 2020 par rapport au trimestre précédent.
Les industries les plus durement frappées sont celles qui ont été directement affectées par les mesures de fermeture obligatoire, comme le secteur de l’hôtellerie-restauration et une partie du commerce de détail. La récession s’est encore aggravée au deuxième trimestre. Le baromètre conjoncturel du KOF a atteint un point bas historique en avril, l’activité économique étant inférieure d’environ 20 % à 30 % à son niveau habituel. Avec le déconfinement progressif mis en place à partir de la fin avril, le baromètre a regagné du terrain dans les mois suivants, indiquant que le pire était passé. Cependant, l’activité a continué à se dégrader dans l’industrie manufacturière suite à la contraction des carnets de commandes.
Une politique macroéconomique très accommodante
Dès l’entrée du pays en confinement, en mars, le Conseil fédéral a adopté un train de mesures d’urgence d’un montant de CHF 72,2 mds (10,4 % du PIB de 2019), dont CHF 41,4 mds de sûretés et garanties, couvrant les crédits aux petites et moyennes entreprises (PME). Pour obtenir un crédit garanti, les entreprises concernées doivent simplement en faire la demande auprès de leur banque principale. Les prêts de faible montant sont garantis à 100 % par l’État, tandis que les crédits d’un montant supérieur à un certain plafond sont garantis à hauteur de 85 %. Ces derniers sont soumis à un examen de la part des banques, qui garantissent les 15 % restants. Pour accroître rapidement le volume des crédits bancaires accordés, la Banque nationale suisse (BNS) a mis en place une facilité de refinancement Covid-19 (FRC). Cette facilité permet aux établissements bancaires d’obtenir des liquidités auprès de la BNS, celle-ci acceptant, comme sûretés, les crédits garantis par la Confédération.
Le Conseil fédéral a, par ailleurs, élargi l’accès aux dispositifs de chômage partiel pour y inclure également les travailleurs sous contrat à durée déterminée, les intérimaires, les apprentis et les indépendants. De plus, la période d’attente prévue pour accéder à ces dispositifs a été supprimée et les procédures administratives ont été simplifiées. Au début du mois de juillet, le Conseil fédéral a prolongé de six mois les indemnités de chômage partiel. La contribution fédérale au régime d’assurance-chômage en Suisse a été augmentée de 20,2 mds. Depuis le mois d’avril, 190 000 entreprises ont déposé une demande de chômage partiel pour 1,9 million de salariés, soit environ 36 % de l’ensemble des travailleurs.
Compte tenu du ralentissement économique et de la chute des prix, la politique monétaire va probablement rester très expansionniste. La BNS devrait maintenir son taux directeur inchangé à -0,75 %. Elle a également annoncé sa volonté d’intervenir sur le marché des changes pour empêcher une appréciation du franc suisse.
La longue marche vers la reprise
Grâce à des politiques très accommodantes et à la poursuite du déconfinement en Suisse et dans les pays voisins, l’activité économique devrait connaître un rebond notable au T3. En conséquence, la chute du PIB pourrait se limiter aux environs de 6 %. En tout état de cause, la reprise prendra certainement du temps et il faudra attendre 2022 pour voir l’économie renouer avec son niveau d’avant-crise.
La crise a également entraîné une nette détérioration des finances publiques. Le Conseil fédéral estime le manque à gagner fiscal pour 2020 à plus de CHF 5 mds, en partie dû aux reports d’impôts. Le déficit public global devrait s’établir aux environs de 5 % en 2020. Selon les prévisions du Conseil, le budget de l’État restera déficitaire jusqu’en 2024. Cependant, Ueli Maurer, le ministre des Finances, est convaincu que la dette liée à la pandémie pourra être remboursée sans qu’il soit nécessaire d’augmenter les impôts.