Eco Perspectives

Zone euro : Y aura-t-il une coupure de la croissance cet hiver ?

15/12/2022

En 2023, l’inflation dans la zone euro devrait très certainement refluer, le PIB se contracter et les taux directeurs de la BCE atteindre leur pic. L’incertitude réside dans l’ampleur de la désinflation et de la récession. Le moment où les taux atteindront leur pic et le niveau de ce pic sont également incertains. Selon nos prévisions, la baisse de l’inflation serait rapide en apparence (l’inflation totale passant d’environ 10% a/a au T4 2022 à 3% au T4 2023) mais elle masquerait une baisse plus lente de l’inflation sous-jacente (qui resterait supérieure à 2% à l’horizon d’1 an, contre 5% aujourd’hui). Face à cette inflation persistante, la BCE porterait son taux de dépôt à 3% d’ici la fin du T1 2023 (+100 pb) et le maintiendrait à ce niveau restrictif tout au long de l’année prochaine, malgré la récession. Celle-ci, que l’on anticipe d’ampleur et de de durée limitées - grâce notamment au soutien budgétaire et à la résistance du marché du travail -, autorise et justifie l’approche restrictive de la BCE.

La récession semble inévitable…

Croissance et inflation

Si la croissance de la zone euro a, de nouveau, favorablement surpris au T3 (+0,3% t/t, relevant l’acquis de croissance à 3,4%), évitant ainsi la contraction attendue de son PIB, la répétition d’une telle performance pour le trimestre en cours, et les deux suivants, paraît difficile. La récession n’est pas certaine mais elle nous semble inévitable. En effet, la confiance des ménages, si elle donne des légers signes de redressement sur les deux derniers mois (octobre et novembre), demeure très déprimée.

Zone euro : PMI composite et indicateur du sentiment économique

La détérioration des enquêtes sur le climat des affaires reste relativement contenue mais elles se situent tout de même en zone de contraction de l’activité (graphique 2). Et nous nous attendons à une poursuite de leur baisse, les pleins effets du choc inflationniste, de la crise énergétique et du resserrement monétaire ne s’étant pas encore fait sentir.

… mais elle pourrait rester d’ampleur et de durée limitées

Le risque d’une récession sévère et prolongée ne peut être écarté compte tenu du cumul et de l’ampleur des chocs susmentionnés. Pour l’heure cependant, le scénario le plus probable est, d’après nous, celui d’une récession qui resterait d’ampleur et de durée limitées. Nous anticipons ainsi une contraction du PIB de 0,4% t/t au T4 2022, puis de -0,5% au T1 2023 et de -0,2% au T2 2023 avant une reprise modérée au second semestre. En moyenne annuelle en 2022, le PIB progresserait de 3,2% avant de reculer de -0,5% en 2023 puis de rebondir de 1,3% en 2024.

Réponse budgétaire au choc inflationniste et à la crise énergétique

Le premier des éléments amortisseurs de la récession attendue sont les importantes mesures de soutien budgétaire engagées aux niveaux nationaux et européen (graphique 3).

À court terme, l’activité devrait également continuer d’être, un peu, soutenue par l’effet de « rattrapage post-Covid » dans les secteurs pouvant encore en bénéficier. L’atténuation des difficultés d’approvisionnement, permettant d’honorer les « arriérés » de commandes, est un autre facteur de maintien de l’activité. Plus globalement, le surcroît d’épargne accumulé par les ménages pendant les confinements et la relativement bonne situation financière des entreprises au début de l’année 2022, constituent des éléments amortisseurs non négligeables. Les ménages et les entreprises ont pu disposer d’une certaine capacité d’absorption des chocs actuels et devraient continuer d’en bénéficier, même si cette capacité a commencé à être entamée par les chocs.