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France : une « drôle » de récession

27/01/2023

L’économie française fait face à la fois à des éléments négatifs et positifs. Le risque d’une récession est réel, tant l’accélération de l’inflation a pesé et continuera de peser sur la consommation des ménages. Pourtant, des éléments continuent de soutenir la croissance, en particulier le retour progressif des différents secteurs à leur production d’avant Covid. Si la plupart y est parvenue, l’industrie (et singulièrement l’aéronautique et l’automobile) reste confrontée à des obstacles élevés sur sa production. Que ces derniers se réduisent et la croissance pourrait surprendre à la hausse.

Transcription

La France connait, comme l’ensemble des autres pays européens, une situation économique complexe. La croissance subit depuis près de 3 ans des hypothèques qui la contraignent et peuvent en même temps la libérer lorsqu’elles sont levées.

La Covid en a été une. L’épidémie s’est déclenchée sans laisser le temps aux entreprises de se prémunir des conséquences qu’elle pourrait avoir sur leur production, engendrant une forte récession lorsque des contraintes sanitaires conséquentes ont fortement réduit l’activité, mais lorsque les contraintes ont été levées, la croissance est revenue plus rapidement que l’on n’aurait pu l’anticiper, d’abord en 2021, puis encore une fois en 2022, qui a vu le tourisme, la restauration ou les services de transport effacer le choc du Covid.

Aujourd’hui, certains secteurs industriels peinent encore à retrouver leur capacité de production pré-Covid, comme l’automobile ou l’aéronautique, alors même que la demande est là. Plus globalement, l’industrie ou le bâtiment font davantage état de difficultés à produire que de problématiques de demande.

Une autre hypothèque s’est déclenchée fin 2021 et n’a cessé de s’accroître au fil de l’année 2022 : il s’agit de l’énergie. Une contrainte de prix d’abord, qui a entrainé un repli brutal de la consommation des ménages dès le 1er trimestre 2022. Une contrainte de prix à nouveau avec une hausse du prix de l’électricité qui a atteint son paroxysme à l’été 2022, aggravant les contraintes qui pèsent sur les entreprises. Une contrainte potentielle de quantité, enfin, lorsqu’il est devenu évident que la production d’électricité serait cet hiver nettement inférieure au regard des précédents hivers.

Hors, il est survenu une baisse de la consommation d’électricité en moyenne encore supérieure. Par exemple, début janvier 2023, cette dernière était inférieure d’un quart à la moyenne des 5 dernières années, lorsque la production n’avait baissé que d’un sixième selon les données de RTE. Le risque de délestage a donc pour le moment pu être écarté.

Toutefois, ce choc sur l’énergie, au travers de sa composante prix, n’a pas fini de produire ses effets. Les coûts de production des entreprises augmentent et l’inflation devrait encore s’accélérer. Si l’on considère l’inflation sous-jacente, qui permet le mieux d’observer les effets de second tour liés à la transmission de la hausse du prix de l’énergie aux autres secteurs, la désinflation n’est pas pour tout de suite : nos prévisions indiquent que l’inflation sous-jacente resterait ainsi supérieure à son niveau de décembre 2022 (4,2% a/a selon l’indice harmonisé) pendant l’essentiel de l’année 2023. Suffisant pour que la consommation des ménages reste déprimée en 2023. Un élément qui devrait tirer vers le bas la croissance de l’économie, mais un élément qui n’interdit pas dans le même temps que certains secteurs réussissent à lever les hypothèques qui contraignent leur production et parviennent ainsi à nous surprendre, comme le rebond de la restauration nous avait surpris au printemps 2022.

LES ÉCONOMISTES AYANT PARTICIPÉ À CET ARTICLE