ÉTATS-UNIS
La croissance américaine ne s’est que légèrement tassée au 1er semestre 2023 (+0,5% t/t en moyenne par trimestre après +0,6% t/t au 2nd semestre 2022), portée par la résistance de la consommation des ménages et les bons chiffres de l’investissement productif. Les effets du resserrement monétaire, s’ils sont nets sur les conditions d’octroi de crédit, demeurent limités sur l’activité et l’emploi. La croissance au 3e trimestre a même été plus élevée qu’au 1er semestre (1,2% t/t selon la première estimation). Un tassement net au 4e trimestre est toutefois attendu, sous l’effet de la disparition du surcroît d’épargne des ménages et de l’essoufflement du moteur de la consommation privée qui devrait s’ensuivre, avant que l’économie ne glisse en récession au 1e semestre 2024. Le pic de l’inflation a été atteint mi-2022, la décrue de l’inflation sous-jacente s’amplifie mais elle reste lente. L’inflation devrait revenir au voisinage de la cible de 2% en 2024. La lenteur du processus de désinflation plaide en faveur du maintien de la politique monétaire en territoire restrictif, malgré l’amorce d’une détente des taux directeurs à la mi-année. La reprise attendue en 2024 s’en trouvera limitée
CHINE
La croissance économique s’est renforcée début 2023 à la suite de l’abandon de la politique zéro Covid, mais le rebond de l’activité s’est essoufflé très rapidement. Le moteur exportateur s’est enrayé en raison de la faiblesse de la demande mondiale et des tensions avec les États-Unis. La demande intérieure est restée freinée par l’importante dégradation de la confiance des investisseurs et des ménages. La crise du secteur immobilier s’est poursuivie, avec le recul continu des ventes, de nouveaux défauts de paiement des promoteurs et des difficultés croissantes de certaines institutions financières. Le gouvernement et la banque centrale ont multiplié les mesures de relance au cours de l’été, visant à soutenir la demande intérieure et l’activité du secteur immobilier. Une légère amélioration de la croissance du PIB est donc apparue au T3 2023 et devrait se poursuivre à court terme. Cependant, les autorités restent prudentes, notamment contraintes par l’excès de dette de l’économie et la fragilité des finances des collectivités locales
ZONE EURO
Selon les derniers chiffres disponibles, la croissance de la zone euro a enregistré un léger rebond au T2 2023 (0,2% t/t) après deux trimestres de stagnation. Les performances disparates entre États membres fragilisent le faible résultat d’ensemble. La France et l’Espagne s’en sortent bien mais l’Allemagne, l’Italie et les Pays-Bas sont à la peine. La montée en puissance des effets négatifs du resserrement monétaire et l’essoufflement des effets positifs de rattrapage post-Covid et de la diminution des tensions sur l’offre, dont atteste la dégradation du climat des affaires, devraient peser sur l’activité économique, qui renouerait avec la stagnation au 2e semestre 2023, avant d’engager une reprise molle. Le reflux de l’inflation se poursuit. S’il demeure lent – l’inflation resterait supérieure à 2% a/a en fin d’année prochaine, obligeant la politique monétaire à rester en territoire restrictif – il apporte, avec le dynamisme des salaires et le maintien de l’emploi, un soutien non négligeable au pouvoir d’achat et à la consommation des ménages, dont le léger rebond attendu permettrait d’éviter la récession à la zone euro. La croissance devrait aussi être soutenue par le déboursement des fonds NGEU.
FRANCE
La croissance a surpris très favorablement au 2e trimestre 2023, l’activité marquant une accélération plus importante qu’attendu (+0,5% t/t, après un 1e trimestre de stagnation et un 4e trimestre 2022 légèrement positif, à +0,1%). Si la consommation et l’investissement des ménages restent déprimés, ce sursaut a été soutenu par l’investissement des entreprises et, surtout, par les exportations. Un contrecoup est prévisible au 3e trimestre. Après son rebond en août, l’inflation est demeurée sur le même rythme élevé en septembre (5,7% a/a en indice harmonisé), une évolution due aux prix de l’énergie. Le processus de désinflation n’est pas remis en cause, comme en atteste la baisse de l’inflation sous-jacente. La remontée des taux d’intérêt devrait continuer de peser sur la demande des ménages en 2023, et donc sur la croissance, attendue à 0,8% en 2023, après 2,5% en 2022.
TAUX ET CHANGE
Aux États-Unis, la hausse de 25 pb des taux en juillet devrait être la dernière de la Réserve fédérale. Une incertitude demeure toutefois, compte tenu de l’inflation sous-jacente toujours élevée et de la résilience de l’activité et du marché du travail à ce stade. Ces éléments plaident en tout cas en défaveur d’une baisse des taux directeurs avant la mi-2024. Parmi d’autres facteurs, l’incertitude résiduelle sur le pic du taux directeur se répercute sur les taux longs, qui restaient orientés en hausse sur les derniers jours d’octobre. À mesure que la perspective d’un desserrement monétaire en 2024 se confirmera, les taux longs devraient repartir à la baisse.
Du côté de la BCE, le relèvement de 25 pb de ses taux en septembre (taux de dépôt à 4,00%, taux de refinancement à 4,50%) devrait aussi marquer la fin du cycle de resserrement, en tenant compte des effets encore à venir du resserrement déjà opéré. Mais il n’est pas non plus encore certain que ce soit vraiment la dernière hausse étant donné l’ampleur encore limitée du reflux de l’inflation sous-jacente.
Autre volet du resserrement monétaire : après l’arrêt complet, à compter de juillet 2023, des réinvestissements de la BCE dans le cadre de l’APP, la prochaine décision à prendre concerne le PEPP. La BCE signale son intention de poursuivre ses réinvestissements au moins jusque fin 2024. Nous tablons sur un arrêt en mars 2024. Les taux longs européens restent orientés en hausse, dans le sillage des taux américains, mais de manière un peu plus contenue : ils devraient également finir par se replier progressivement à mesure que se dissiperont les incertitudes sur la prolongation du resserrement monétaire.
La Banque du Japon (BoJ) a ajusté, le 27 juillet dernier, sa politique de contrôle des taux d’intérêt en autorisant une plus grande fluctuation des taux d’intérêt souverains à dix ans autour de la cible de 0,5%. De nouveaux ajustements de sa politique monétaire sont probables, le pays faisant face à une poussée inflationniste sans précédent depuis le début des années 1990. Néanmoins, la BoJ ne devrait pas augmenter ses taux directeurs cette année mais une remontée est attendue en 2024.
Nous restons baissiers sur le dollar vis-à-vis de l’euro. Le billet vert est surévalué et le différentiel de taux d’intérêt à long terme devrait se resserrer. Le yen devrait se maintenir autour des niveaux actuels à court terme avant de se renforcer face au dollar US puisque les fonds fédéraux devraient avoir atteint leur taux final.
Nous restons structurellement baissiers sur le dollar vis-à-vis de l’euro. Le billet vert est surévalué, les positions sont très longues sur le marché et le différentiel de taux d’intérêt à long terme devrait se resserrer. Le yen devrait se maintenir autour des niveaux actuels à court terme avant de se renforcer face au dollar US puisque les fonds fédéraux devraient avoir atteint leur taux final.