Face à une inflation qui s’envole, la Réserve fédérale des États-Unis annonce une normalisation à vitesse accélérée de sa politique monétaire. Maintenu au voisinage de zéro jusqu’en mars, son principal taux directeur devrait remonter autour de 2% en fin d’année. La taille de son bilan sera, quant à elle, réduite. L’économie américaine, qui opère au plein emploi, semble avoir suffisamment bien récupéré de la crise sanitaire pour passer le test. Elle reste toutefois sensible aux conditions du crédit et n’est pas immunisée contre les effets de la guerre en Ukraine.
Les dernières enquêtes de conjoncture ont été moins bonnes aux États-Unis, preuve que la première économie mondiale n’est pas immunisée contre les conséquences de la guerre russe en Ukraine. Preuve aussi que l’épidémie de Covid-19, qui amène à de nouveaux confinements en Chine, n’a pas fini de perturber les chaines de valeur. S’il n’est pas encore question de récession, les commandes passées à l’industrie ont accusé le coup en mars ; les indices régionaux du climat des affaires, tels que ceux de New-York ou de Philadelphie (pour sa composante anticipée) ont été franchement médiocres.
Inflation lutte prioritaire
La flambée du coût des intrants – énergie, métaux, matières premières agricoles, etc. – n’est pas terminée et continuera à court terme d’entretenir l’inflation. Le record de février (+7,9% sur un an) risque donc d’être battu, d’autant que le marché de l’immobilier est en surchauffe et entraîne dans sa hausse les loyers, soit le tiers de l’indice des prix.
Avec un chômage descendu à 3,6% de la population active en mars et un niveau de participation des 20-64 ans désormais proche des records pré-pandémiques, le marché du travail est au plein emploi. Les tensions salariales s’accentuent, notamment là où les difficultés de recrutement post-crise se concentrent : hôtellerie-restauration, transport–entreposage, commerce de détail, etc. Elles dépassent aussi la moyenne dans les services aux entreprises, qui comptent pour près d’un quart des emplois du tertiaire privé et se situent au cœur de la transformation numérique.
Dans l’ensemble, les revalorisations s’échangent contre d’importants gains de productivité, en rupture avec la tendance pré-pandémique (graphique 2). Aussi, la hausse des coûts unitaires du travail (les salaires et prestations rapportés aux volumes de production) demeure-t-elle contenue (+3,7% sur an au quatrième trimestre de 2021) et sans commune mesure avec celle, à deux chiffres, du début des années 1980. Dans la décomposition fournie par le BEA (Bureau of Economic Analysis) elle n’apparaît d’ailleurs pas comme un moteur essentiel de rebond des prix de la valeur ajoutée en 2021, ce dernier tenant davantage aux impôts à la production et à l’importation (eux-mêmes alourdis par la hausse du prix des matières premières) ainsi qu’à la progression des marges.