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BCE : mesures ciblées et flexibilité des instruments

15/03/2020
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Ciblage des mesures et assouplissement des conditions de financement

Face au choc économique lié à l’épidémie de Coronavirus, la Banque centrale européenne (BCE) prend acte des risques importants entourant le scénario macroéconomique en zone euro. L’institution revoit à la baisse ses projections, notamment en 2020 où la croissance du PIB de la zone euro atteindrait 0,8% (contre une prévision de 1,1% en décembre 2019). Compte tenu de la date limite de réalisation des projections, le scénario de la BCE n’intègre toutefois qu’une petite partie du choc, et l’activité pourrait être nettement moins dynamique[1].

Dans ce contexte, la BCE a décidé, de manière unanime, la mise en place de plusieurs mesures :

L’assouplissement des conditions appliquées aux prêts à long terme à destination des banques de la zone euro (TLTRO III), les taux assortis pouvant désormais atteindre -0,75% (-25 pb par rapport au taux de facilité de dépôt). Ces opérations seront appliquées entre juin 2020 et juin 2021 ;

La mise en place, en combinaison avec le programme existant d’achats d’actifs (Quantitative easing), d’une enveloppe supplémentaire de EUR 120 mds d’ici la fin de l’année, spécifiquement pour répondre à la crise actuelle. Ce montant additionnel offre une certaine flexibilité, aucun montant mensuel arrêté n’ayant été annoncé. Plus important encore, cette enveloppe supplémentaire sera ciblée en particulier sur le secteur privé.

Des opérations additionnelles de refinancement à plus long terme, temporaires et sur une base hebdomadaire, seront opérées jusqu’à fin juin 2020 (date de la prochaine opération TLTRO III). La présidente de la BCE a indiqué que, malgré l’absence de signe de tensions sur les liquidités, ces opérations constitueraient un garde-fou en cas de tout durcissement des conditions financières.

Concernant l’absence de nouvelles baisses des taux d’intérêt de la Banque centrale européenne – pourtant anticipées par les marchés – Mme Lagarde a indiqué qu’elles auraient été moins efficaces que les mesures effectivement annoncées. Il est vrai que des mesures ciblées sont plus à même de répondre au choc actuel. Une baisse de taux n’a qu’un effet très limité dans le cas d’un choc exogène et de difficultés du côté de l’offre.

Des interrogations subsistent

Mme Lagarde a insisté sur le fait que la BCE utilisera toute la flexibilité que lui offre son programme de rachats d’actifs. Ainsi, une déviation par rapport au issuer limits[2]apparaît donc possible, mais la limite des 33% reste la règle à suivre. Une hausse de cette limite est pour le moment exclue.

Malgré des hésitations dans la communication[3] et une réaction immédiate décevante des marchés, la BCE agit et semble prête à accroître son rôle pour défendre l’économie européenne dans cette crise.

Une nouvelle fois, Christine Lagarde a appelé les Etats membres de la zone euro à agir de manière coordonnée et ambitieuse.

Les dernières annonces des gouvernements semblent à ce titre aller dans le bon sens. Eviter la récession économique dépendra des interventions de politiques publiques, en particulier du côté de la politique budgétaire.

[1] A ce titre, la BCE retient par exemple 56,4 USD/baril comme hypothèse technique pour le prix du pétrole en 2020. Or, compte tenu des tensions sur le marché du pétrole et du niveau de prix atteint aujourd’hui par le baril, celui-ci pourrait être nettement inférieur en moyenne cette année.

[2] La BCE ne peut acheter plus de 33% d’une même ligne obligataire.

[3] Mme Lagarde a indiqué que ce n’était pas le rôle de la BCE d’intervenir sur l’écartement des spreads souverains. Elle a toutefois corrigé ses propos immédiatement après la réunion.

LES ÉCONOMISTES AYANT PARTICIPÉ À CET ARTICLE